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Dossier : L’imagination au pouvoir

Le matheux et le politique

École de créativité, les mathématiques nous invitent à embrasser une pensée « hors cadre ». Saurait-elle inspirer des réinventions de nos modes de gouvernement ?


Parler d’imaginaire en mathématiques pourrait paraître incongru, celles-ci étant connues pour être le domaine par excellence de l’efficacité et de la rigueur. Les mathématiciens auraient-ils accès au rêve ? Il est vrai que le fameux nombre imaginaire – celui qui est tel que « i = - 1 » – a suscité des cauchemars chez bien des étudiants. Mais de là à défendre la thèse que l’imagination en mathématiques concerne la politique, on se croirait dans Alice au pays des merveilles.

« Inventer, c’est penser à côté », disait Albert Einstein. Pour un mathématicien, l’imaginaire est d’abord la pensée « hors cadre ». L’invention du nombre imaginaire en est un exemple parfait. Face à l’impossibilité de trouver une résolution générale aux problèmes d’équations du second degré, on choisit une nouvelle perspective en plongeant ces équations dans le monde des nombres complexes, où la solution émerge comme une rose au jardin. À la manière des robots-tondeuse de nos pelouses, certains mathématiciens ou physiciens butent inlassablement contre les limites de leur carcan théorique. Ils veulent donc penser hors du cadre.

C’est là qu’est le règne de l’imagination, celui des nombres transcendantaux tels que π ou e, des nombres « univers » qui contiennent l’entièreté de la connaissance ou des nombres non standards tels que 0+, le plus petit réel supérieur à zéro. D’après les scientifiques, la beauté mathématique a atteint son sommet avec l’identité d’Euler (1707-1783), qui relie étrangement et simplement les nombres naturels, imaginaires et transcendantaux. Il y a là comme un récit de l’histoire de l’imaginaire, car si Archimède découvrit « π » trois siècles avant Jésus-Christ, ce n’est qu’au XVIe siècle que Bombelli inventa « i » et à la fin du XVIIe que Leibniz définit la constante de Nepe

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