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Dossier : Mobilités en Europe : où allons-nous ?

Les mobilités vues d’Espagne L’Europe loin des préoccupations

 © Pixabay/Vane Monte
© Pixabay/Vane Monte

L’Union n’a pas bonne presse en Espagne, que ce soit à cause des politiques européennes ou d’une logique interne, de plus en plus favorable à l’auto-détermination. Et il y a peu de chances que cela change d’ici les prochaines élections.


Les élections pour les députés du Parlement européen du 26 mai prochain coïncideront, en Espagne, avec les élections municipales et celles des parlements régionaux1. Elles seront, à n’en pas douter, les élections les moins européennes de ces dernières années.

La crise économique de la dernière décennie a eu comme premier résultat la mise en œuvre de politiques d’austérité rigoureuses. Et en 2011, la révision de la Constitution espagnole introduisait le concept de stabilité présupposée, stipulant que le paiement de la dette publique primait sur les autres dépenses prévues au budget général de l’État. Mais cette réforme a été interprétée par une large part de la population comme une perte grave de souveraineté. Et la détérioration de certains services publics, due aux coupes budgétaires, a mis fin au bipartisme jusque-là prédominant2. L’Europe a alors été perçue comme un pouvoir supérieur qui, avec ses exigences économiques, portait atteinte au bien-être des citoyens.

Les politiques migratoires ont également alimenté cette perception négative. On a dénoncé le manque de solidarité entre pays européens dans la gestion des frontières, se défaussant sur les États géographiquement proches de l’arc méditerranéen, et l’hypocrisie de ceux qui, d’un côté, affirment défendre les droits humains, mais qui, de l’autre, externalisent les contrôles frontaliers (au Maroc, en Turquie ou en Libye). La Méditerranée est devenue un mur plus difficile à franchir que celui voulu par Trump.

Pour autant, les facteurs qui risquent de peser lors des prochaines élections européennes relèvent d’une logique interne. Il s’agit d’abord de la corruption, qui a affecté de manière particulière le parti qui a gouverné l’Espagne jusqu’au 1er juin 2018 : le Parti populaire. Mais aussi de la procédure judiciaire engagée contre les chefs du processus indépendantiste de Catalogne. L’un des leaders en prison, Oriol Junqueras, député européen de 2009 à 2011, a proposé de mener une coalition avec les partis favorables au droit à l’auto-détermination. L’électorat indépendantiste souhaite que la voix de sa cause politique atteigne le cœur de l’Europe.

L’électorat indépendantiste souhaite que la voix de sa cause politique atteigne le cœur de l’Europe.

Troisième facteur : celui du rôle joué par des forces émergentes dans le panorama politique espagnol. Aux élections de 2014, ce fut Podemos qui entra au Parlement européen, avec un discours pro-européen critique, mais recevable par les groupes parlementaires de gauche qui siègent à Strasbourg. En 2019, on verra pour la première fois un parti au discours ultra-nationaliste et eurosceptique chercher alliance avec les autres forces de l’extrême droite européenne. Après son succès en Andalousie, Vox aura de nouveau l’occasion d’exprimer son programme électoral marqué par la thématique anti-migratoire et un fort nationalisme.

Certes, une partie de la population est consciente de ce qui se joue en Europe, de l’agenda de l’Union européenne sur la fiscalité, les accords commerciaux, la défense des droits humains… Mais elle est minoritaire dans l’électorat, dans les médias et les débats politiques. En Espagne, les élections risquent d’être les moins européennes et rien ne permet de penser que cela puisse changer dans les mois à venir.

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1 Ces élections concerneront 13 des 17 communautés autonomes.

2 En 2011, 73 % des votes sont allés aux deux partis majoritaires (Parti populaire et Parti socialiste ouvrier espagnol), contre 55 % en 2016.


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