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Alors qu’une majorité de Français affirment que, même avec suffisamment d’argent, ils continueraient de travailler, la question du sens de la « valeur travail » se pose plus que jamais.
Troquer les mots pour les motos. Un jour, l’universitaire Matthew Crawford décide d’abandonner son poste à la tête d’un important think-tank américain. À la place, il ouvre un atelier de réparation de deux roues. Lassé de l’inconsistance des mots, il opte pour un travail taché de cambouis. De cette reconversion, il tire un essai1 sur la valeur du travail : « J’ai eu souvent la sensation que le travail manuel était plus captivant d’un point de vue intellectuel. » Plus gratifiant, aussi, par l’« exécution intégrale d’une tâche susceptible d’être anticipée intellectuellement dans son ensemble et contemplée comme un tout, une fois achevée ».
Quelques années plus tard, le socio-ethnologue David Graeber jettera, lui aussi, un pavé dans la mare en publiant un livre au titre à sensation : Bullshit Jobs (Les liens qui libèrent, 2018). On évalue mal l’ampleur (de l’ordre du tiers !) de ces « boulots à la con », emplois inutiles n’ayant d’autre raison d’être que le maintien artificiel au travail d’un grand nombre d’actifs. Mais, dénués de sens, ce type de fonctions génèrent non seulement des burn out, mais aussi des brown out (mise hors-circuit) et des bore out (pathologie de l’ennui).
Permettre de s’accomplir, tel est le « sens du travail », le sens dans et par le travail. A du sens ce qui répond aux aspirations et besoins fondamentaux de la personne humaine, habitée par un « désir d’être », selon le philosophe Jean Lacroix, plus profond que tous les désirs, et dont la satisfaction conditionne la possibilité de se réaliser. L’homme, dira Jonathan Sacks, est « un animal qui cherche du sens ». Par conséquent, a du sens l’engagement dans le travail qui prend place e
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