Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !
Logo du site
Dossier : Impuissants face aux crises ?

Des ressources insoupçonnées Introduction

© Orla/iStock
© Orla/iStock

Pour domestiquer un éléphant, on lui apprend l’impuissance : petit, la corde qui le retient est plus forte que lui. Devenu adulte, il n’essaie même plus de s’en libérer, alors qu’il en aurait les capacités. L’éléphant domestiqué a des ressources qu’il ne soupçonne plus. L’ampleur des crises que nous traversons – sanitaire, économique et environnementale – a de quoi susciter la sidération, fragiliser les individus et bousculer le sens du collectif. Mais, comme les éléphants, nous avons des ressources insoupçonnées pour prendre des décisions éclairées, malgré les incertitudes.

Face aux défis qui se posent à nous, ce numéro propose des pistes pour prendre du recul. Nous revisitons des philosophes du siècle passé. Simone Weil et Albert Camus – tous deux ont connu la Seconde Guerre mondiale – nous éclairent et nous aident à discerner par temps de catastrophe. Une manière de réaliser comment, crise après crise, les mêmes questionnements reviennent, inlassablement. Un détour par la Centrafrique permet d’interroger le concept de résilience et ses limites : être résilient ne signifie pas tout endurer. On ne saurait se passer d’éthique.

Nous questionnons aussi la pertinence de l’échelon local pour renforcer la solidarité et la durabilité d’une société. La nécessité de se relier à son voisinage paraît une évidence. Pourtant, celui-ci ne doit pas être synonyme de repli sur soi. Le local peut être une vraie ressource lorsque, à l’image de ce qui se cherche en Suisse dans des coopératives d’habitat partagé, nous prenons en compte nos interdépendances et interrogeons le type de liens que nous entretenons, du plus proche (notre voisin) au plus lointain (les ouvrières qui produisent nos chaussures).

Il nous faut, encore et toujours, analyser les causes de nos malheurs et cultiver notre capacité à chercher, ensemble, un horizon commun.

Il nous faut, encore et toujours, analyser les causes de nos malheurs et cultiver notre capacité à chercher, ensemble, un horizon commun. La démocratie n’est pas une donnée, mais l’aune à laquelle interroger les choix du passé, pour discerner et agir, au présent comme à l’avenir. Elle ne peut être l’affaire d’une seule personne, ni même celle de quelques-uns. En ces temps incertains, l’intelligence collective nous est ainsi apparue comme un puissant levier pour ouvrir d’autres chemins d’action. Cela implique aussi de cultiver notre écoute, notamment celle d’autres voix qui tentent de se faire entendre. Celle des jeunes, tels les Youth for Climate. Désabusés par ce monde tel qu’il va, ils et elles cherchent à nouer dès aujourd’hui des liens plus respectueux de chacun·e. Des liens plus solides pour affronter demain.

Ce dossier nous invite enfin à accueillir la fiction dans notre quotidien, pour ouvrir le champ étriqué de nos pensées. Le pire n’est jamais certain. Les mutations en cours pourraient faire naître en nous des ressources inattendues.


Sommaire du dossier

Les plus lus

Les Marocains dans le monde

En ce qui concerne les Marocains, peut-on parler de diaspora ?On assiste à une mondialisation de plus en plus importante de la migration marocaine. On compte plus de 1,8 million de Marocains inscrits dans des consulats à l’étranger. Ils résident tout d’abord dans les pays autrefois liés avec le Maroc par des accords de main-d’œuvre (la France, la Belgique, les Pays-Bas), mais désormais aussi, dans les pays pétroliers, dans les nouveaux pays d’immigration de la façade méditerranéenne (Italie et ...

L’homme et Dieu face à la violence dans la Bible

Faut-il expurger la Bible ou y lire l'histoire d'une Alliance qui ne passe pas à côté de la violence des hommes ? Les chrétiens sont souvent gênés par les pages violentes des deux Testaments de la Bible. Regardons la Bible telle qu’elle est : un livre à l’image de la vie, plein de contradictions et d’inconséquences, d’avancées et de reflux, plein de violence aussi, qui semble prendre un malin plaisir à multiplier les images de Dieu, sans craindre de le mêler à la violence des...

Le clerc en sursis ?

La plupart des confessions religieuses excluent les femmes des charges sacerdotales. Pour combien de temps ? Patriarcale au superlatif, l’Église catholique voit son modèle vaciller. Le patriarcat demeure la règle dans le monde religieux. Dans des contextes très différents, les trois monothéismes le pratiquent. Tous invisibilisent les femmes, contrôlent leur corps et les tiennent éloignées de la sphère publique. Circonstance aggravante, ce bastion bien défendu l’est par...

Du même dossier

Trois pistes pour se préparer à l'inattendu

Alors que le contexte économique, sanitaire et écologique requiert de tous et de chacun un effort supplémentaire de solidarité, notre addiction à notre confort individuel nous fait prendre un tout autre chemin. Bernard Perret, socioéconomiste, dégage trois pistes pour orienter nos choix et nos actions dans un souci de préservation de l’humanité. Notre situation historique a quelque chose d’inédit, pour laquelle le mot « crise »...

Féconde incertitude

Face aux crises qui se succèdent, certains souhaitent un pouvoir fort et décidé, pour baliser le futur. Mais c’est la démocratie qui prépare le mieux les citoyens à soutenir le compagnonnage de l’incertitude. Nous avions de quoi nous inquiéter avec le réchauffement climatique, l’effondrement de la biodiversité, la pollution de l’air et des eaux, la menace de pénurie des ressources naturelles. Sont venues s’y ajouter la pandémie provoquée par ...

Militer à l’ombre des catastrophes

La conscience des catastrophes à venir est de plus en plus développée chez les militants. Comment continuer à s’engager pour plus de justice, quand la peur et l’incertitude du monde de demain grandissent ? Entretien avec Luc Semal, auteur de Face à l’effondrement. Militer à l’ombre des catastrophes (Puf, 2020). D’après vos réflexions1, quelle place prend la peur des catastrophes dans les mouvements écologistes aujourd’hui ?...

Du même auteur

Créer de la proximité : un défi collectif

Santé, logement, revenu de solidarité… Aujourd’hui, en France, des millions de personnes en précarité peinent à accéder à leurs droits. Le fossé entre ces personnes et l’action publique se creuse. Parmi celles qui pourraient toucher le RSA, 34 % ne le perçoivent pas. Ce constat, partagé par le Conseil d’État1 Conseil d’État, « L’usager du premier au dernier kilomètre de l’action publique : un enjeu d’efficacité et une exigence démocratique », étude annuelle 2023 [en ligne].1 et les acteurs asso...

L’aide sociale reprend la rue

Claude, 42 ans, yeux bleus et sourcils broussailleux, vient à Houplin pour être tranquille. Depuis sept mois, il vit dans une tente, à Loos, près de Lille. Il a dû quitter son appartement : trop de retards de loyer. « Au terrain, on entend l’autoroute, les klaxons qui veulent klaxonner. On ne dort pas tranquille. »« Houplin », c’est Houplin-Ancoisne, une petite ville de 3 300 habitants à une douzaine de kilomètres au Sud-Ouest de Lille. « Houplin », c’est aussi « la maison », un lieu de répit o...

Un camping-car pour faire du lien

En Indre-et-Loire, un camping-car, le Bureau itinérant et solidaire, va à la rencontre des gens du voyage pour les aider à accéder à leurs droits. Une solution associative essentielle, que les services publics devraient reprendre à leur compte. Comment est née l’idée de ce Bureau itinérant et solidaire (BIS) ?Romain Crochet – Après la crise du Covid-19, nous avons répondu à un appel à projets dans le cadre du plan gouvernemental France relance. On y a vu...

Vous devez être connecté pour commenter cet article
Aucun commentaire, soyez le premier à réagir !
* Champs requis
Séparé les destinataires par des points virgules