Ils en ont parfois rêvé dès la classe de troisième ou de seconde. En France, ils ont tout donné pour accéder aux très sélectifs cursus de formation au journalisme. En Belgique, ils savent la difficulté à entrer dans la profession au terme de leur stage. Tout comme est connue l’importance de la précarité dans les premières années. Ils sont pourtant toujours aussi nombreux à ressentir cette vocation.

Néanmoins, en quelques années, nombreux sont celles et ceux qui se reconvertissent dans d’autres professions dans un climat assez général de doute. Pour comprendre ce paradoxe, il faut revenir aux motivations de départ de ces impétrants du journalisme1, à ce qu’ils valorisent dans l’exercice du métier, et prendre la mesure du décalage dont ils font l’expérience dès les premiers mois, une fois en activité.

Personne ne s’engage dans cette voie par hasard. Une forme de consensus s’impose autour de l’idée d’un « métier passion », qui se traduit d’abord par la volonté d’être utile, aux autres et à la société. Dans pratiquement toutes les bouches, le journaliste est « au service des gens ». Il serait une sorte de médiateur social, un intermédiaire entre le monde, les événements et le public.

Les aspirants journalistes ont conscience que ce métier s’exerce en rédaction, mais se représentent celui-ci comme jouissant d’une autonomie, qui leur permettra de s’exprimer et de se réaliser. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de contradiction, à leurs yeux, entre la motivation du service et de l’utilité et l’aspiration à faire un métier « pour soi », dans lequel il leur sera possible d’apprendre, de s’enrichir intellectuellement et humainement ainsi que d’accéder à des lieux, des personnalités et des situations exceptionnelles ou totalement ordinaires.