La rencontre du journalisme et du numérique a suscité beaucoup d’espoirs, largement diffusés par les médias eux-mêmes. Ces espoirs reposaient d’abord sur des évolutions techniques. La légèreté et le faible coût des nouveaux outils de capture et de diffusion, la rapidité toujours accrue des transmissions, et surtout le rapprochement entre texte, son et image allaient susciter de nouveaux usages et l’accès à de nouveaux terrains.

Des journalistes plus mobiles et polyvalents pourraient transporter leur salle de rédaction sur leur dos (backpack journalism), voire dans leur poche (mobile journalism). Les possibilités de l’écriture web autoriseraient la délinéarisation des contenus (webdocumentaires), l’interactivité rapprocherait producteurs et consommateurs d’information, qui pourraient aller jusqu’à se confondre dans un « journalisme ambiant » (ambient journalism) outillé par les smartphones et les réseaux socionumériques.

S’il est indéniable que le numérique a changé le journalisme, comme il a changé nombre d’aspects de nos vies quotidiennes, il faut cependant se garder d’en limiter l’analyse à des discours d’accompagnement relevant du déterminisme technique, laissant de côté les dimensions sociale, politique et économique. Les promesses du « tous journalistes » et de la participation généralisée ont cédé devant le constat du maintien, voire du renforcement, des différenciations sociales dans l’accès et l’usage des technologies numériques.

Illusions technologiques

La richesse et l’inventivité narratives des web-documentaires n’ont pas résisté à l’absence de modèle économique. L’équipement en smartphones dans les chaînes d’information en continu, à l’image des déclinaisons locales de BFMTV, a été plus motivé par des économies en personnel et en matéri