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Nationalisme, souverainisme, universalisme… Cerner ces notions est parfois difficile tant elles font l’objet de luttes d’appropriation dans l’arène médiatique. Ce dossier ne pouvait faire l’économie d’une mise au diapason lexicale.
Le nationalisme est un principe politique qui apparaît à la fin du XVIIIe siècle. Il consiste à invoquer la primauté des droits et des intérêts « nationaux » pour justifier des actions politiques. Le nationalisme est la volonté de faire coïncider la forme culturelle et la forme politique de la nation.
Appréhender le nationalisme est complexe car la notion même de « nation » fait l’objet d’interprétations variées et parfois contradictoires. Le nationalisme a par exemple joué un rôle important dans la formation des États-nation européens, puis durant la décolonisation au travers du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Dans le même temps, le nationalisme comme volonté d’exaltation de la nation a pu prendre des formes belliqueuses, totalitaires et impérialistes. Aujourd’hui encore, le nationalisme est régulièrement invoqué par les groupes et institutions politiques pour sa puissance mobilisatrice.
Le souverainisme est une doctrine politique qui soutient historiquement la préservation de la souveraineté d’un pays par rapport à des instances supranationales. Dans le contexte européen, le souverainisme renvoie à une critique de la dépendance des États membres vis-à-vis de l’Union européenne. Parce qu’il peut se réclamer tant de la « souveraineté nationale » que de la « souveraineté populaire », le souverainisme peut prendre plusieurs formes et se situer aussi bien à droite qu’à gauche de l’échiquier politique.
Le particularisme politique concerne des populations qui revendiquent une autonomie vis-à-vis de l’État.
Le particularisme politique est défini par Le Robert comme l’« attitude d’une communauté, d’un groupe qui veut conserver ses usages particuliers, son autonomie » Apparue en 1866, la notion désigne plus spécifiquement un discours prenant la défense d’une identité culturelle particulière – généralement liée à un territoire – distincte de la culture dominante ou générale. Dans sa forme la plus fréquente, le particularisme politique est régional et s’oppose au national. Il concerne des populations qui cherchent à conserver leurs traditions et revendiquent une autonomie complète ou partielle vis-à-vis de l’État.
L’universalisme est la doctrine selon laquelle il est possible d’accéder à des idées ou d’élaborer des projets à vocation universelle. En politique, « l’universalisme suppose l’existence […] d’une unité fondamentale du genre humain dont il est possible de dégager les valeurs et les principes fondamentaux » (Olivier Nay, Lexique de science politique, 2017). On le renvoie généralement à la doctrine française de l’ « universalisme républicain » qui considère tous les citoyens comme égaux en droits et s’oppose à tout particularisme. L’universalisme comme doctrine historique fait aujourd’hui l’objet de nombreuses critiques car il ne tient compte ni des situations particulières, ni des choses « en train de se faire », mais repose à l’inverse sur des conceptions figées, idéales et abstraites. Par ailleurs, l’universalisme a motivé – au nom de l’extension de ses valeurs – un grand nombre de violences religieuses, impériales ou coloniales.
La philosophie multiculturaliste appelle à respecter et à défendre les droits des minorités.
Le multiculturalisme se caractérise au sein d’une société par la coexistence de plusieurs cultures définies à partir de critères pluriels (religieux, ethniques, territoriaux, langagiers, etc.). Ces cultures sont associées à des communautés, lesquelles tirent leur existence et leur légitimité des représentations collectives. La philosophie multiculturaliste qui se développe à partir des années 1980 appelle à respecter et à défendre les droits des minorités, si nécessaire par le recours à des politiques spécifiques de discrimination positive (« affirmative action »). Cette idée d’une reconnaissance des identités et des cultures dans l’espace public est régulièrement critiquée, tant par les tenants de l’« universalisme républicain » que par les nationalistes identitaires.
Le cosmopolitisme est un concept créé par Diogène de Sinope à partir des mots grecs cosmos (univers) et politês (citoyen). Il renvoie à la revendication d’une appartenance politique universelle – « cosmopolitique » – et se distingue du multiculturalisme. À partir du XVIIIe siècle, avec Emmanuel Kant, le terme est associé à l’idée d’une « citoyenneté du monde » basée sur une humanité commune. À cette conception sont souvent associées une approche universelle des droits de l’homme, la défense de la libre circulation des personnes et la promotion de la solidarité entre les nations.