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Dossier : De Prométhée à Noé

Homo viabilis


Crises pétrolières, crises bancaires, boursières et bulles spéculatives, crises économique et écologique, crises diplomatiques… De crises en crises, ne sommes-nous pas en réalité dans un processus continu, dans une grande transformation qui ne constituerait en réalité qu’une seule et même crise ? Quel en serait alors le sens ?

-L’empreinte écologique d’une population humaine de plus en plus nombreuse

Cette grande transformation, s’effectuant sur longue période, affecterait la nature sous la pression de l’accroissement de la pression démographique mondiale, et les sociétés sous l’emprise du mécanisme de mondialisation de l’économie. La croissance démographique reste en effet un des phénomènes les plus impressionnants de notre époque. Entre 1950 et 2000, la population mondiale est passée de 3 à 6 milliards, et entre 2000 et 2050, elle va encore s’accroître de 3 milliards avant de plafonner. Cette vague démographique est une singularité : pendant les 2 000 ans qui nous ont précédés, la population est restée assez stable, autour de quelques centaines de millions de personnes. Cette population est répartie très inégalement par rapport à l’espace vital et aux ressources : surpopulation dans beaucoup de régions d’Asie, faible densité en Amérique du Sud. L’histoire nous l’apprend, le peuplement résulte de migrations perpétuelles et c’est le processus principal par lequel s’est organisée la correspondance entre ressources et besoins. La pression migratoire n’a donc pas de raison de cesser.

Cette population mondiale consomme des biens en quantité de plus en plus importante, une consommation motivée à une extrémité par la nécessité de survivre, et à l’autre par le goût sans limite du confort. Au fur et à mesure que s’accroît la proportion de ceux qui sortent de la pauvreté, comme dans les « pays émergents », la consommation par personne augmente et se diversifie. Cette croissance se comprend dans une logique d’imitation et de rattrapage des classes moyennes par rapport aux catégories sociales plus aisées. Le processus semble sans fin, dans la mesure où il est alimenté par un désir infini d’inventer des objets de consommation nouveaux. Mais on perçoit que cette augmentation de consommation va rencontrer de plus en plus de bornes du côté des ressources, ce qui commence à être le cas pour le pétrole. La première cause potentielle de crise est donc simplement malthusienne : la population planétaire se heurte peu à peu à des limites.

La saturation progressive de l’espace habité se traduit par la dégradation des écosystèmes. Ceux-ci, et plus largement la biosphère, constituent la base de l’activité biologique sur terre. Pour produire leur alimentation et survivre, les sociétés ont inévitablement déforesté et affecté le fonctionnement des écosystèmes depuis le néolithique. Dans la période contemporaine, la fin de la vague démographique se traduit par un rythme d’une rapidité sans précédent dans la déforestation et la dégradation : altération des cycles naturels de l’eau entraînant des baisses de nappe phréatique et des pénuries dans les régions très peuplées, surtout dans les régions à pluviométrie insuffisante. D’où un processus inéluctable de désertification. Les « services écologiques » rendus par la nature sont altérés : perte de carbone séquestré dans les sols et les écosystèmes, perte de fertilité naturelle des sols, perte de la capacité de rétention en eau et accroissement de l’érosion… La conséquence la plus grave est sans doute la perte de biodiversité. L’agriculture « simplifie » les paysages en substituant un faible nombre d’espèces cultivées aux espèces antérieures. Elle tend d’ailleurs de plus en plus à en limiter le nombre, l’alimentation humaine reposant principalement sur une dizaine d’espèces végétales et animales. La biodiversité est aussi menacée par le changement climatique. Or les pertes de biodiversité peuvent avoir des effets incommensurables : disparition à tout jamais d’espèces ou de variétés susceptibles de permettre des adaptations futures, de fournir des molécules utiles, ou perte de résilience des écosystèmes face aux fluctuations climatiques. Nous vivons une véritable crise à l’échelle « géologique » avec ce que les biologistes qualifient de « sixième » extinction des espèces, la plus connue des cinq précédentes étant celle des dinosaures. Cette extinction est due à notre espèce et à son caractère envahissant et fortement transformateur des milieux naturels.

L’accroissement de la population et de sa consommation se traduit aussi par l’épuisement des ressources naturelles exploitées. Cela concerne tout d’abord les ressources limitées, comme les gisements géologiques. Depuis que la Chine a accru sa propre consommation de manière très significative, plusieurs matières premières sont devenues rares. Il en résulte une vive compétition mondiale pour y accéder. Les sociétés sont incitées à les économiser, à trouver des matières de substitution et à les recycler. D’autres ressources sont renouvelables, mais pour conserver une production, il faut en limiter l’exploitation à des quantités qui autorisent leur reproduction. Dans bien des cas, il est difficile d’empêcher les utilisateurs de dépasser les limites vitales pour ces ressources : excès de pêche menaçant la survie d’espèces, déboisement, dégradation des cycles de l’eau. Beaucoup de ces ressources étant en accès libre, et faute d’existence d’une instance unifiée défendant l’intérêt général, chacun participe à leur dilapidation.

Ces dégradations résultent surtout de l’extension des surfaces agricoles. L’histoire du monde a été émaillée de disettes et de famines faute de disposer des espaces suffisants ou des techniques permettant d’obtenir des rendements meilleurs par unité de surface. Ces famines sont encore localement récurrentes aujourd’hui. Mais on peut s’interroger sur la capacité de la planète à fournir la quantité nécessaire d’aliments à long terme. En effet, il faudra limiter la déforestation, réduire l’utilisation d’eau en raison d’une plus grande rareté, faire inévitablement une place pour la production de carburants et denrées diverses à partir de produits agricoles en substitution du pétrole, et réduire les surfaces dans la proximité des très grandes villes qui vont s’étendre. Le changement climatique risque de réduire la production en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie du Sud. Enfin, les techniques conventionnelles (semences, engrais, pesticides, irrigation, forte utilisation d’énergie) se renchérissent, sont de plus en plus contestées par les sociétés et connaissent des plafonnements de rendements. Il y a, là aussi, une situation potentielle de crise et une nécessité de mutation dans les technologies et les politiques agricoles.

Le changement climatique constitue une autre menace. On en connaît les origines sur lesquelles il y a un consensus de la recherche mondiale, malgré la controverse animée de manière tonitruante par quelques-uns. La mutation climatique annoncée résulte de l’émission de gaz à effet de serre depuis un siècle et demi. Les conséquences potentielles pour les générations futures sont redoutables : nouvelles géographies du climat et de la production agricole en faveur des régions à faible population et en défaveur des régions pauvres et à forte densité de population, montée des eaux marines et déplacements de population, menaces fortes sur la biodiversité. Certains scénarios bâtis pour représenter la situation en cas de hausse incontrôlable ne permettent toujours pas de calculer les conséquences, tellement celles-ci seraient complexes et profondes.

L’urbanisation représente une autre transformation rapide. La population croît désormais dans les pays en développement, surtout en ville. Durant la première moitié du xxie siècle, une partie importante des trois milliards d’habitants supplémentaires s’installe dans les villes des pays en développement. Faute de ressources financières, cette explosion urbaine prend la forme d’une « bidonvillisation ». Les campagnes, en effet, fonctionnent selon ce que l’on qualifie de « biais urbain » : la pauvreté urbaine amène les gouvernements à arbitrer les mécanismes économiques de formation des prix agricoles au détriment des agriculteurs afin que les prix alimentaires urbains restent bas. Il en résulte, en plus de la pauvreté urbaine, une grande pauvreté rurale. Cette urbanisation en bidonvilles se fait au détriment de l’ordre public et de la loi, favorise la violence et rend les populations vulnérables aux épidémies. Ces villes, et les industries qui leur sont attachées, produisent pollutions et déchets en quantités importantes. Pollutions et déchets renforcent le caractère de danger épidémiologique. Les coûts de santé restent trop élevés par rapport aux capacités d’épargne des sociétés. L’urbanisation des méga-cités constitue un des phénomènes problématiques majeurs de l’avenir de la planète et des sociétés.

La santé connaîtra t-elle des crises ? On peut là encore s’interroger. De nouvelles pathologies (les « maladies émergentes ») sont liées à l’évolution des écosystèmes et de l’urbanisation. Avec les défrichements, les populations sont de plus en plus en contact avec de nouveaux animaux réservoirs de pathogènes, notamment de virus. Les villes et les grandes conurbations deviennent des lieux de contact entre animaux et humains, ce qui accélère les possibilités d’épidémie et de mutation des grippes. La mondialisation des transports accroît par ailleurs la vitesse de propagation des épidémies, qui atteignent en particulier les populations pauvres. Mais d’autres populations, celles qui ont accès à davantage de nourriture, connaissent de manière accrue des maladies « de civilisation » : obésité, maladies cardiovasculaires, diabète de type II. Ainsi, la sortie de la pauvreté s’accompagne rapidement de l’émergence de maladies de bien-être.

-Des fluctuations économiques incontrôlées

On perçoit bien, à partir de ces éléments d’analyse, que l’ensemble des éléments de crise à caractère environnemental a une incidence forte sur les sociétés. Mais celles-ci ont aussi des mécanismes économiques de crise spécifiques, qui sont bien connus et qui s’expriment dans des périodes de temps plus courtes. Il en va ainsi des crises boursières, financières et économiques. Elles sont liées aux défauts de fonctionnement des marchés et aux fortes distorsions qui les caractérisent. Par nature, les marchés sont fluctuants et connaissent des cycles d’expansion et de repli. La mondialisation de l’économie donne à ces fluctuations une ampleur nouvelle. La base de la crise actuelle semble bien provenir de la libéralisation du commerce mondial depuis trois décennies. Le jeu des avantages comparatifs s’est exprimé au bénéfice des pays dits « émergents » (Chine, Inde, Brésil), comme cela avait déjà été le cas avec les nouveaux pays industriels d’Asie et les divers « tigres et dragons ». Les investissements industriels se réalisent de préférence dans ces pays, avec une désindustrialisation des vieux pays dont la croissance se voit ralentie. Les pays émergents ont, quant à eux, une croissance forte et accumulent de l’épargne et des réserves de change. Les vieux pays industriels leur empruntent d’autant plus que leurs classes moyennes, toujours candidates à plus de consommation, ont pris l’habitude de vivre à crédit. La crise des subprimes vient du financement par les banques américaines du crédit immobilier risqué. Cette crise s’inscrit dans un cadre plus général où le déséquilibre commercial et financier qui a résulté de la nouvelle distribution internationale de la production (entre vieux pays industriels et pays émergents) ne pouvait que déboucher sur des crises monétaires et des risques de défaut de règlement des échéances de la part de pays endettés et à nouveau des attaques sur les monnaies. D’où  une situation de déséquilibre et de fluctuation permanents.

Dans les vieux pays industriels, l’équation économique et sociale est devenue difficile. La croissance est faible et l’emploi insuffisant. Les comptes sociaux sont dans le rouge ainsi que les budgets des États. La dette publique s’accroît. Les marchés financiers hésitent à refinancer cette dette et spéculent contre les monnaies. L’ajustement des structures économiques apparaît inévitable en même temps qu’une relance est nécessaire. Cette situation pose un redoutable problème de choix intergénérationnel quant au prix à payer : les générations actuelles payeront-elles l’essentiel, ou bien cela sera-t-il laissé aux générations futures ? Et au sein de ces générations, comment se fera l’équilibre entre les différentes catégories de revenus ? Dans les pays émergents et intermédiaires, au contraire, la croissance va bon train, avec l’espoir de sortir une partie importante de la population de la pauvreté, dans une perspective de rattrapage rapide de l’Occident. Cette opportunité historique les rend exigeants, notamment lorsqu’il s’agit de savoir qui va payer les coûts de la réparation environnementale planétaire… Pour eux, ce sont les anciens pays industriels les principaux responsables, qui doivent donc faire le plus grand effort. Quant aux pays les plus pauvres, surtout en Afrique, ils connaissent une croissance faible mais notable depuis deux décennies, mais pourtant insuffisante pour faire face à l’ampleur des besoins et à la vague démographique. Dans ce contexte, la spéculation permise par les quantités de réserves de change et les liquidités sur les marchés internationaux contribue à déstabiliser l’économie mondiale. De même, l’économie mafieuse et l’existence des paradis fiscaux font que des sommes importantes échappent à toute imposition. L’épargne privée mise à l’ombre des paradis fiscaux atteint en effet des niveaux considérables et ne contribue pas à résoudre les problèmes.

Les pays industriels n’ont pas d’autre sortie possible que de retrouver la compétitivité nécessaire à leur réindustrialisation. Ils se lancent donc tous dans une course à l’innovation et à la productivité. Mais les pays émergents n’ont aucune intention de se laisser distancer à nouveau et, eux aussi, investissent dans la science et la technologie dans le but d’innover et d’accroître la productivité. Les gains de productivité s’effectuant désormais rapidement à l’échelle planétaire, il est légitime de s’interroger sur les conséquences globales en termes d’emploi. Jusqu’à ces dernières décennies, nous vivions avec un schéma de développement basé sur la « transition inter sectorielle » qui voulait qu’au cours de l’histoire, l’emploi agricole diminue au profit de l’emploi industriel, puis que ce dernier diminue au profit de l’emploi dans les services. Il est probable que la compétitivité dans l’industrie et les services réduise fortement l’emploi nécessaire dans ces domaines. Or, d’ici 2050, l’économie mondiale devra absorber 2,5 milliards de personnes. Le mouvement vers la compétitivité et celui vers l’accroissement démographique seront-ils compatibles en termes d’offres et de demandes d’emploi ? Il faudrait pour cela que soient inventés de nouveaux secteurs riches en main-d’œuvre, ce qui est peu probable. Ne vaudrait-il pas mieux s’interroger sur la régulation de cette course à la compétitivité dont on ne visualise pas l’issue ? Sinon qu’elle pourrait perpétuer un rattrapage qui laisserait, en échenillant la cohorte des pays, beaucoup de pauvreté et d’inégalités. Quels seront en effet les moyens d’existence en 2050 de ceux qui naissent aujourd’hui, sachant que, pour l’essentiel, ce seront des enfants des pauvres dont une partie importante sera née de parents agriculteurs ? Trouveront-ils les moyens d’existence nécessaires ? Bénéficieront-ils de terres pour s’alimenter ? Les villes pourront-elles créer les emplois urbano-industriels nécessaires pour les accueillir ?

Ces éléments de crise potentielle provoquent une autre interrogation : le rattrapage économique sans cesse renouvelé, la course de vitesse internationale pour l’accès aux matières premières, pour concentrer l’emploi et pour éviter tout retard dans la technologie, et l’atmosphère de vive compétition commerciale relayée par les médias ne risquent-ils pas d’aviver les ressentiments des peuples perdants ? Ceux d’entre eux qui se voient inéluctablement distancés alors qu’ils pouvaient prétendre à être des civilisations qui comptent sur la scène mondiale ne vont-ils pas s’insurger ? N’est-ce d’ailleurs pas déjà le cas ? Dans un tel terreau, l’opposition entre certains pays occidentaux et d’autres pays est à surveiller, d’autant plus que le conflit israélo palestinien peut apparaître, au Moyen-Orient, comme la matrice d’un conflit civilisationnel. La violence et les conflits ont certes toujours existé et ce n’est pas en quelques lignes que l’on peut en proposer une analyse pertinente. Mais les violences géopolitiques survivent à la guerre froide et semblent s’alimenter de nouveaux motifs.

-Des changements nécessaires et inévitables

Ce tableau est certes assez sombre. Mais en les analysant, on constate inévitablement que les crises sont nombreuses et surtout qu’elles sont liées. En résumant, on peut dire que la démographie exerce une pression sur les écosystèmes inédite dans l’histoire. Les techniques utilisées peuvent entraîner des conséquences dangereuses comme l’effet de serre. La combinaison des effets environnementaux crée une crise écosystémique. De leur côté, les sociétés ont leurs propres crises. Les fluctuations des marchés dans un capitalisme mondialisé sont difficiles à maîtriser. Les crises, imbriquées les unes dans les autres, sont alimentées par une course au rattrapage engendrée par des inégalités sans cesse renouvelées. Le sens de cette évolution ne semble pas prendre en compte les limites physiques de la planète.

Mais ce tableau est en réalité un scénario tendanciel. Il a de quoi inquiéter car nous n’avons que deux générations pour trouver des réponses à toutes les questions posées, et il n’existe pas de gouvernement unifié mondial pour mettre en œuvre les solutions contre-tendancielles indispensables de manière coordonnée. Ce scénario tendanciel réveille chez certains des sentiments malthusiens et pousse au pessimisme. A l’inverse, d’autres considèrent que la science et la technologie apporteront les réponses, comme cela a toujours été le cas, notamment par la révolution industrielle du XIXe siècle et par les grandes vagues de progrès techniques du xxe siècle. Pourquoi les succès du passé ne se répéteraient-ils pas dans l’avenir ? Cette position se heurte cependant à quelques solides incertitudes. Tout d’abord, la période de l’histoire que nous abordons est singulière du point de vue de l’empreinte que les sociétés provoquent sur la biosphère : le coût cumulé de l’atténuation et de l’adaptation au changement climatique, de la restauration des paysages écologiques et de l’aménagement durable des villes – coût non calculé – ne sera pas facile à couvrir par de l’épargne puis de l’investissement. Ensuite, les sociétés ne consacrent que peu de moyens à la mesure essentielle pour résoudre tous ces problèmes : l’éducation. Seule en effet l’éducation est capable de persuader les sociétés de modifier les comportements pour aller vers un monde plus durable. Enfin, la nécessité d’une coordination efficace des politiques publiques, aussi bien dans le domaine environnemental que celui de l’économie n’apparaît pas clairement à une grande partie des gouvernements du monde. Aussi, le scénario principal est sans doute celui d’une résolution chaotique et pas assez rapide des grands problèmes de la planète, se traduisant par un traitement inéquitable d’une partie importante de la population : réfugiés climatiques, migrants des régions aux écosystèmes dégradés, sous alimentés des villes, agriculteurs en état de grande pauvreté dans les campagnes, emprise des maladies, chômage important…

Pourtant, il n’y a pas d’autre choix que d’affronter les crises et de les résoudre. Ce qui apparaît d’abord comme une succession de crises dans des domaines variés et de natures différentes nous apparaît peu à peu comme un « nexus », un ensemble « systémique » complexe auquel il faut apporter des réponses cohérentes. Elles n’existent pas toutes encore. Entre pessimisme foncier et optimisme technologique, un scénario différent reste à imaginer. Il repose sur la capacité à agir sur des leviers importants des comportements futurs : la science, la politique, l’information et l’éducation. Il revient à la science d’avancer rapidement dans le sens de la résolution des grandes questions relatives à la nature et aux sociétés dans un esprit d’intérêt général. Il revient aussi aux organisations de la société civile les plus conscientes de pousser les gouvernements à la coordination des politiques, de pousser les médias à une éthique fondée sur la résolution des problèmes plutôt qu’à leur exacerbation et de pousser les systèmes éducatifs à induire les nouveaux comportements nécessaires à la définition d’un monde écologiquement, économiquement et socialement viable. La recherche de la viabilité devient une obligation pour toutes les sociétés, aussi bien au sens où il faut définir un monde libéré des menaces environnementales, économiques et sociales, qu’au sens où il faut viabiliser un chemin pour y arriver. Pour cette raison, on peut parler d’homo viabilis1, un genre humain succédant à un homo economicus lequel est défini comme obéissant à une rationalité où il ne suit que son propre intérêt alors que rien n’est possible sans altruisme2. L’homo viabilis est celui qui trace un nouveau chemin. Entre menace climatique, menace sur les écosystèmes, menace alimentaire, menaces de crises économiques, menace de persistance de la pauvreté… ce ne peut être qu’un chemin étroit, solidaire et parfaitement raisonné, de manière à donner une figure à l’espérance.



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1 / Ce terme a été réfléchi avec Jean-Yves Calvez pour donner un titre à un livre (en deux tomes) finalement intitulé L’Hommeviable, Michel et Florent Griffon, éd. Odile Jacob, 2010.

2 / . En reprenant la réflexion de Philippe Kourilsky, Le Monde, 24 avril 2010.


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