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Dans d’autres pays d’Europe, les crises urbaines ont rarement pris la même ampleur que chez nous. En France, on a pourtant multiplié les projets et les plans. On a consenti des efforts considérables. Mais on n’a pas refait la ville dans son territoire. Et l’on a considéré les populations des quartiers comme des problèmes, plutôt que comme des acteurs qui fabriquaient le devenir de la cité. Dès lors, de programme en programme, on est toujours à la traîne.
Comment construire non pas seulement des pavillons, des immeubles, des grands ensembles…, mais des « habitations », qui soient à la fois protection, installation dans la vie, et possibilité d’avoir place dans un espace public ouvert. Construire des cités, mais aussi « construire » des habitants.
Les quartiers pauvres furent aussi des quartiers populaires, où une construction sociale et politique a été le support permettant de relier, en un sens, les lotissements à l’ensemble de la société et donnant son cadre à une culture. Aujourd’hui, les changements économiques, les bouleversements d’un univers individualiste et mobile, condamnent-ils les quartiers à l’isolement ?
La réponse ne sera pas celle des seuls urbanistes « L’urbanisme n’est pas la solution » (Th. Paquot). Il ne doit surtout pas apporter des remèdes standard, mais servir des humains dans leur quête à habiter. Dans les programmes de rénovation, la part consacrée au projet urbain prend souvent toute la place, et le projet social est réduit à la portion congrue. Mais si l’on ne se fonde pas sur les atouts sociaux, économiques, culturels de chaque cité dans son environnement, on assistera à un effondrement de l’urbanité.
Il ne suffit pas de déconstruire des ghettos pour mieux délimiter des territoires « résidentialisés » (des espaces clos mieux appropriés !). C’est un projet partagé de développement, et donc d’ouverture, qui est à construire.