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Jean-Pierre Orfeuil, urbaniste, Bénédicte Tilloy, directrice générale de SNCF-Transilien, Sandrine De-Boras, représentante de Transdev, et Audrey Berry, doctorante au Cired, ont débattu des enjeux sociaux liés à la mobilité à l’occasion du colloque « Quelle justice sociale à l’heure de la transition énergétique ? » (organisé par le Ceras et la Revue Projet du 10 au 12 septembre 2014, à Paris). Un débat autour d’Emmanuelle Réju, journaliste à La Croix.
La forte croissance de la mobilité motorisée des hommes et des biens a fait des transports l’un des grands secteurs émetteurs de gaz à effet de serre, émissions qu’il s’agit aujourd’hui de réduire. En même temps, la mobilité est désormais une condition de l’intégration sociale, et une large part de la population vit déjà des difficultés de déplacement. Peut-on alors concevoir une transition énergétique dans les transports qui n’aggraverait pas la situation de ces personnes ? Telle est la question à laquelle Jean-Pierre Orfeuil propose ici une réponse.
La « précarité énergétique » appliquée aux transports est aujourd’hui mesurée par le taux d’effort énergétique : une mise en rapport des dépenses en carburants des ménages et de leurs revenus. Audrey Berry nous propose un indicateur plus composite, prenant en compte les ressources financières et les conditions de mobilité des ménages (véhicule peu efficace, alternatives disponibles selon leur lieu d’habitation…). Il permettrait de mieux cibler les aides et les politiques nécessaires, mais aussi les ménages « vulnérables », susceptibles de se retrouver en situation de précarité sous l’effet d’une hausse des prix de l’énergie.
Comment éviter la course vers toujours plus de mobilité ? Telle est la question que se pose Bénédicte Tilloy, directrice générale de SNCF-Transilien, lorsqu’il s’agit de garantir la mobilité de tous. Elle dévoile dans cette vidéo le phénomène de saturation des transports en Île-de-France, une problématique pour les ménages périurbains, une question difficile à résoudre. Les modifications d’infrastructures sont longues, lourdes, et incertaines dans un contexte de restrictions budgétaires et de hausse des prix du foncier. De nouvelles perspectives sont cependant explorées : modulation des horaires de travail, télétravail, covoiturage sur les déplacements quotidiens etc.
Un problème de mobilité peut aboutir à une situation d’exclusion sociale, Jean-Pierre Orfeuil le rappelait au début de cette table-ronde. Partageant ce constat, Sandrine De-Boras, responsable innovation de Transdev, revient ici sur une démarche de prospective menée avec les divers acteurs du territoire bourguignon en 2013. Les résultats révèlent que l’aide à la mobilité ne peut se résumer à la question du transport et témoignent des évolutions de la représentation de la mobilité dans le corps social et au sein de l’action publique territoriale. Elle n’est plus perçue comme attelée à la seule injonction au déplacement d’une personne mais elle est pensée comme un moyen d’accès à des ressources et des fonctions portées par les territoires.
Texte : Marie Drique (Ceras/Revue Projet)
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