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Le clivage, discutable, entre urbain et rural doit beaucoup à la reconfiguration de territoires autrefois industrialisés. C’est dans ces campagnes en déclin que se manifeste un besoin d’appartenance, souvent tourné contre l’extérieur.
Quelle pertinence accordez-vous au clivage entre urbanité et ruralité, brandi par une partie de la classe politique ?
Benoît Coquard – J’ai beaucoup remis en question, dans mes travaux, cette séparation binaire entre urbain et rural. Le prisme du tout territorial est un écran de fumée des inégalités qui coexistent parfois dans un même espace social. Nombreux sont celles et ceux qui sont « périphériques » au sein de leur propre canton en termes d’accès à certaines ressources. Le prisme territorial passe trop souvent sous silence les véritables rapports sociaux.
La ruralité est loin de représenter une entité homogène, à l’image de la ville. Il y a un véritable effet de lieu dans le fait de grandir quelque part, d’être entouré de certains groupes sociaux, ainsi de produire des visions du monde. Ici, on valorise les études supérieures, tandis que là, on privilégie plutôt l’entrée précoce dans le travail manuel et l’acquisition rapide d’une propriété.
Quartiers populaires et campagnes populaires ont en commun d’être à l’origine liés à l’industrialisation et présentent aujourd’hui une relative homogénéité sociale, puisque les autres classes sociales n’y habitent plus. Dans les deux cas, il y a beaucoup d’interconnaissance et d’enjeux de réputation.
Quelles caractéristiques majeures permettent d’identifier les différents types de ruralité ?
Je distinguerais, a minima, les campagnes en déclin des campagnes attractives. Les premières sont empreintes d’une forte nostalgie et d’une absence de perspectives. Le « c’était mieux avant » y domine. Ces campagnes désindustrialisées ont perdu des emplois depuis 2008, en raison des délocalisations et de la dernière grande crise financière.
« Si certaines campagnes n’ont pas connu de crise de l’industrie, elles conti
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