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L’écologie profonde, une nouvelle spiritualité ?

Photo credit: cnadia on Visual Hunt / CC BY-NC-SA
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Parfois caricaturée, l’écologie profonde porte en elle une transformation du rapport de l’homme à la nature. Une démarche éthique, politique, mais aussi spirituelle : un décentrement. D’Arne Næss à Hans Jonas, en passant par John Baird Callicott et Aldo Leopold, le philosophe Éric Charmetant invite à se laisser interpeller par les pères des éthiques environnementales.

Apparue dans les années 1970, l’écologie profonde (deep ecology) vise à transformer le rapport de l’homme à la nature, à lui donner accès à une relation profonde avec elle, au-delà d’une simple réparation et de la limitation des dégâts écologiques. Elle cherche à dépasser les deux autres grands courants autour desquels s’est construite la conscience écologique contemporaine : la préservation d’espaces de « nature sauvage » (wilderness), avec la naissance des parcs nationaux, tant aux États-Unis à partir des années 1870 qu’en Europe à partir des années 1910, et la lutte contre les graves dommages écologiques provoqués par les produits chimiques à partir des années 1950-1970, notamment à la suite de la dénonciation des effets des pesticides par la biologiste américaine Rachel Carson.

Cette conscience écologique s’est incarnée dans des éthiques environnementales, avec la naissance de chaires universitaires et de revues spécialisées dans les années 1970, mais aussi dans des projets d’écologie politique comme le mouvement des verts allemands (Die Grünen). Mais, si les dimensions éthiques et politiques de l’écologie ont suscité bien des études, sa dimension spirituelle est soit laissée dans l’ombre, soit controversée. Dénonçant les dérives violentes d’activistes ou la misanthropie de mouvements comme « Earth First ! », certains en viennent à assimiler l’écologie profonde à une haine de l’homme. Pourtant, une spiritualité traverse ce courant, qui n’est pas assimilable à une haine de l’homme ou à une vision pessimiste de l’humanité.

L’émergence de l’écologie profonde marque la naissance d’une nouvelle spiritualité.

L’émergence de l’écologie profonde au sens générique marque, à mon avis, la naissance d’une nouvelle spiritualité, en relation, par l’histoire personnelle de ses fondateurs, avec la philosophie occidentale, le judaïsme, le christianisme et certaines pensées orientales. Cette spiritualité n’est pas attachée à une religion ou une foi particulière, mais elle n’en exclut ni la possibilité ni la pertinence face au défi de la crise écologique actuelle.

Attitude fondamentale

En 1965, le théologien suisse Hans Urs von Balthasar proposait de définir la spiritualité au sens large comme « l’attitude fondamentale, pratique ou existentielle d’un homme, qui est le corollaire et l’expression de sa conception religieuse de l’existence – ou plus généralement de sa conception éthique et engagée de l’existence ». En contexte chrétien, la spiritualité est une manière d’être en relation avec Dieu et de s’adresser à Lui dans la prière, mais aussi une manière de considérer, de regarder les autres, humains ou non. En ce sens, le christianisme brise les barrières et les hiérarchies de race, de genre et de statuts sociaux (Épître aux Galates 3, 28). La spiritualité inscrit l’homme dans une vision du monde, d’un sens de l’histoire et du salut. Dans un cadre plus large, on peut trouver, à l’exemple de Hans Urs von Balthasar, une spiritualité de l’éros conduisant à l’amour de la sagesse et à l’absolu chez Platon ou une spiritualité de l’action et de sa fin ultime chez Aristote, avec la place du bonheur et de l’amitié, ou encore une spiritualité du laisser-arriver, de l’accueil de ce qui survient dans le silence des passions chez les stoïciens, en même temps qu’une cosmogonie situant la place et le devenir de l’être humain dans un univers cyclique.

Cette attitude fondamentale renvoie à un grand récit sur la place et le devenir de l’homme dans la nature, qui ne peut se concevoir comme un simple récit personnel et solitaire. La spiritualité ouvre à l’altérité d’une vision du monde et de l’histoire portée par d’autres que soi, voire à l’altérité d’une relation avec Dieu ou le divin. Elle est le fruit d’une élaboration culturelle, dans laquelle un individu apporte ses propres variations et trouve des ressources pour donner du sens à son existence et orienter son action.

L’écologie profonde de Næss

C’est au philosophe norvégien Arne Næss (1912-2009) que l’on doit l’invention du terme « écologie profonde » (lors d’une conférence à Bucarest en 1972). Marqué par la philosophie de Spinoza et par celle de l’action non-violente de Gandhi, ses travaux se sont centrés sur la philosophie du langage et de la logique, jusqu’à la perception de l’urgence écologique. Il arrête sa carrière académique à l’université d’Oslo pour se consacrer à la philosophie de l’écologie et à la formulation d’une « écosophie ». L’écologie superficielle (shallow ecology) lutte contre la pollution et l’épuisement des ressources, sans remettre en cause les modes de vie actuels. L’écologie profonde, tout en ne méprisant pas ces moyens concrets, conteste l’idéologie de la croissance illimitée et de l’utopie baconienne. Elle réintègre l’homme dans la nature, l’invitant à prendre conscience de l’interdépendance de sa vie avec le reste de la biosphère. « Une écosophie est une vision philosophique du monde ou un système inspiré par les conditions de vie dans l’écosphère. »

L’écologie profonde conteste l’idéologie de la croissance illimitée.

La philosophie de la vie, l’attitude existentielle fondamentale de Næss, est son « écosophie T ». Le « T » étant l’initiale de Tvergastein, la cabane-refuge qu’il a fait construire en Norvège et dans laquelle il passé environ dix années, souvent en alternance avec ses cours à l’université. La spiritualité de Næss, marquée par sa pratique de la montagne, est celle d’un Soi (avec un « s » majuscule) se réalisant : un processus d’ouverture jamais achevé du moi à l’ensemble de l’écosphère. Ce mouvement d’ouverture passe par l’apprentissage de la vie sociale, de la mise en relation de ses désirs avec ceux d’autrui, par le développement de la capacité à comprendre autrui jusqu’à se comprendre soi-même comme faisant partie de l’aventure de la vie, de la biosphère, de l’écosphère. Næss convoque Spinoza et son « perseverare in suo esse » (persévérer dans son être), Bergson et sa vision de la vie dans L’évolution créatrice (1907), et enfin Gandhi dans son rapport à la « Bhagavad-Gita » (chant du bienheureux) insistant sur l’unité des êtres et la non-violence qui en découle. La démarche de Næss est ouverte à toutes les traditions qui permettent un rapport à la nature fait de relation, d’accueil et de respect et qui ne cherchent pas à la dominer au seul profit de l’être humain. Næss évoque d’ailleurs la Bible comme une source possible pour ce processus de transformation de la conscience de soi dans l’univers, avec l’insistance biblique sur la bonté des créatures.

Il a explicité la réalisation de Soi – compris comme un processus et non un résultat – sous la forme de deux normes fondamentales (N) et de trois hypothèses (H) qui sont le substrat de sa spiritualité :

« N1 Réalisation de Soi !

H1 Plus on atteint une haute réalisation de Soi, plus l’identification avec les autres est grande et profonde.

H2 Plus on atteint un haut niveau de la réalisation de Soi, plus la possibilité d’atteindre un niveau encore supérieur dépend de la réalisation de Soi des autres.

H3 La complète réalisation de Soi d’un individu quelconque dépend de celle des autres.

N2 Réalisation de Soi pour tous les êtres vivants ! »

Næss souligne que l’accroissement de la biodiversité rend possible une plus haute réalisation de Soi, grâce à l’extension des relations avec d’autres formes de vie. Cet accroissement de la biodiversité ouvre des questionnements sur les formes d’organisation sociétale les plus adaptées à la réalisation de Soi pour soi et pour tous les êtres vivants, en mettant en exergue la décentralisation des décisions et le respect de l’autonomie des communautés locales.

Les normes de Næss sont à comprendre, à mon sens, comme les valeurs ultimes de sa « conception éthique et engagée de l’existence » et de sa spiritualité, au sens de la définition donnée plus haut. Ses hypothèses sont des balises, des règles de discernement pour évaluer si on est bien engagé dans ce processus conduisant à la réalisation de Soi pour soi et pour tous les êtres vivants.

Si ces normes de réalisation de Soi s’appliquent à tous les êtres vivants et qu’une égalité entre tous est affirmée, leur mise en œuvre demande niveau de réflexivité qui n’est accessible qu’à l’être humain. Lui seul est capable de s’identifier par l’imagination à l’animal et d’accéder à la réalisation de Soi de l’animal, avec toutes les limites dues aux différences de sensorialité. Le mouvement inverse, de l’animal à l’homme ou à un autre animal, est beaucoup plus limité. Cette asymétrie fondamentale entre l’homme et l’animal, à la fois sur le plan cognitif et éthique, souligne l’impasse de la classification des éthiques environnementales en anthropocentrisme (primat de l’homme), biocentrisme (primat de la vie) et écocentrisme (primat de l’écosystème). Catherine Larrère propose d’ailleurs dans Les philosophies de l’environnement (Puf, 1997) d’être attentif plutôt au primat mis sur l’un des trois pôles toujours présents dans les philosophies de l’écologie : « transformation de soi » (A. Næss), « environnement » (A. Leopold) et « technique » ou « technoscience » (H. Jonas).

L’éthique de la terre de Leopold

Aldo Leopold (1887-1948), ornithologue, chasseur, employé de l’office des forêts aux États-Unis et enseignant la gestion du gibier à l’université du Wisconsin, est la grande figure de l’écologie américaine. Il fait de l’attention à la nature sauvage le chemin d’une véritable transformation intérieure. Dans Almanach d’un comté des sables (1948), il évoque l’attention aux variations de l’écosystème suivant les saisons, le retour de migration des oies sauvages ou les danses des bécasses. Leopold s’inscrit dans la lignée de l’écrivain, naturaliste et philosophe Henry David Thoreau (1817-1862). Pour ce dernier, qui a passé deux ans au bord de l’étang de Walden, dans les forêts du Massachusetts, la nature est la plus grande ressource de l’humanité ; elle est à préserver pour que l’homme puisse s’épanouir. L’homme est invité à prendre conscience des équilibres complexes des écosystèmes et de l’interdépendance du vivant, à changer son regard sur ce qui l’entoure, à modifier sa relation à l’écosphère dans laquelle il vit. Rouvrant ainsi son réseau de relations, il peut entrer dans une attitude de respect et de préservation dynamique de la nature, en la protégeant des dégâts d’une expansion sans limite des villes et d’un tourisme de masse transportant avec lui ses comportements urbains.

« Toutes les éthiques élaborées jusqu’ici reposent sur un seul présupposé : que l’individu est membre d’une communauté de parties interdépendantes. Son instinct le pousse à concourir pour prendre sa place dans cette communauté, mais son éthique le pousse aussi à coopérer (peut-être afin qu’il y ait une place en vue de laquelle concourir). L’éthique de la terre (land ethics) élargit simplement les frontières de la communauté de manière à y inclure le sol, l’eau, les plantes et les animaux ou, collectivement, la terre. »

Cette éthique est une éthique du bon usage de la nature à l’échelle locale. Le seul principe général est celui du respect de la communauté biotique, même si elle n’a aucune valeur d’utilité pour l’être humain : « L’une des faiblesses essentielles d’un système de protection de la nature basé entièrement sur la motivation économique, c’est que la plupart des membres de la communauté-terre n’ont pas de valeur économique. Les fleurs sauvages et les oiseaux chanteurs, par exemple. Sur les vingt-deux mille plantes et animaux supérieurs originaires du Wisconsin, il y en a peut-être cinq pour cent, à tout prendre, qui sont susceptibles d’être vendus, élevés, mangés ou utilisés de quelque manière que ce soit à des fins économiques. Pourtant, ces créatures sont des membres de la communauté biotique et si (comme je le crois) la stabilité de celle-ci dépend de son intégrité, elles devraient avoir le droit de continuer d’exister. »

L’éthique communautariste de Callicott

Les valeurs d’intégrité, de stabilité, de beauté sont centrales dans l’éthique de la terre de Leopold. Interprète de cet héritage, le philosophe américain John Baird Callicott en a déployé les soubassements métaphysiques et éthiques : la vision écologique et évolutionniste nécessite un rejet d’une vision mécanique du monde, au profit d’une vision organiciste et holiste. Cette conviction le conduit à développer une éthique communautariste à niveaux multiples, où l’appartenance à chaque communauté entraîne un ensemble de devoirs pour protéger les intérêts de celle-ci. Ainsi l’être humain doit-il veiller à préserver les intérêts de la communauté humaine, mais en tant que membre d’une communauté biotique globale, il doit veiller à en préserver l’intégrité, la stabilité et la beauté. L’éthique de la terre de Leopold est le code moral d’un des niveaux de l’éthique communautariste de Callicott. Pour arbitrer les conflits possibles entre les niveaux et les appartenances communautaires, Callicott défend une priorité des devoirs issus des communautés les plus proches.

Cette spiritualité de l’attention à la nature sauvage s’est enracinée chez Leopold dans l’expérience à partir du jour où, avec d’autres chasseurs, il a tué, sans la moindre hésitation, une louve et ses louveteaux. Le regard de la louve mourante lui a fait prendre conscience que la montagne ne portait pas le même regard que lui sur cette mort. La destruction des loups conduisait aussi au pullulement des cerfs et à une détérioration plus rapide des sols. L’attitude de Leopold s’enracine dans un décentrement, une capacité à penser du point de vue de l’animal, du sol ou, plus largement, de la terre. Ce chemin de transformation passe par le regard, l’attention et une manière de vivre dans la nature sauvage qui n’est pas cannibalisée par la technique et les rythmes urbains.

Jonas et la liberté au cœur du vivant

Le philosophe allemand Hans Jonas (1903-1993) est, parmi les penseurs de l’écologie, celui qui a le plus analysé le changement apporté par la technique moderne dans la portée spatiale et temporelle de l’agir humain. Face au développement du pouvoir technique et aux limites des philosophies morales à prendre en compte le futur lointain dans les jugements moraux, Jonas propose une révision de la philosophie kantienne pour y inclure le maintien des conditions de possibilité de l’épanouissement d’une vie humaine : « Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre », ou : » Ne compromets pas les conditions pour la survie indéfinie de l’humanité sur terre. »

Le pouvoir technique de l’être humain le met face à la double menace d’un anéantissement physique et d’un dépérissement existentiel. Mais la philosophie de Hans Jonas développe aussi une métaphysique de la vie dans laquelle la liberté joue un rôle central. La liberté paraît à un niveau élémentaire dans le métabolisme des organismes les plus simples. Elle s’étoffe chez les animaux capables de percevoir, de sentir et de se mouvoir et prend sa pleine ampleur chez l’être humain. Or le pouvoir technique pourrait réintroduire plus d’asservissement dans la vie humaine en voulant « améliorer » son fonctionnement.

La liberté prend sa pleine ampleur chez l’être humain. Or le pouvoir technique pourrait réintroduire plus d’asservissement dans la vie humaine en voulant « améliorer » son fonctionnement.

C’est dans cette métaphysique de la liberté se déployant au cœur du vivant que s’enracine la spiritualité écologique de Jonas. Malheureusement, elle peut être éclipsée par une peur angoissante et paralysante face à l’urgence des défis écologiques et face à sa propre impuissance. « La menace de la catastrophe contenue dans l’idéal baconien de la domination sur la nature par la technique scientifique tient donc à la taille de son succès. Celui-ci est principalement de double type, économique et biologique : leur relation mutuelle qui conduit nécessairement à la crise est aujourd’hui patente. » Jonas prévoyait que l’explosion démographique associée à la recherche d’un niveau de vie plus élevé conduirait à une exploitation toujours plus destructrice des ressources de la planète, jusqu’au jour où elle se déroberait elle-même à la surexploitation. Ce serait alors la voie ouverte à des morts et à des génocides dans un « sauve-qui-peut général ». Jonas, qui avait vécu les drames de la barbarie nazie, voyait dans cette surexploitation des ressources de la planète et ses conséquences pour les peuples et les personnes plus pauvres le chemin vers une nouvelle barbarie. Pourtant, pour lui, l’aiguillon de la peur doit être un moteur de l’action et non le terreau d’une paralysie dans le désespoir. On peut craindre toutefois qu’à trop regarder la face obscure de l’humanité, on ne soit écrasé et l’on n’oublie ce grand mouvement de la vie vers davantage de liberté, si important dans l’ensemble de son œuvre.

Un décentrement de soi

L’écologie profonde au sens générique est porteuse, chez Næss, Leopold, Callicott et Jonas, d’une attitude fondamentale existentielle : celle d’un décentrement de soi, d’une prise de conscience de sa place dans la nature et d’une éthique pour la terre et les générations futures. Cette spiritualité est une invitation pour la théologie chrétienne de la création : une invitation à un décentrement de la seule relation de l’être humain avec Dieu et les autres hommes, une invitation à déployer une théologie de l’écosphère. Le théologien brésilien Leonardo Boff, dans La terre en devenir. Une nouvelle théologie de la libération, appelait de ses vœux une redécouverte et un approfondissement de la spiritualité chrétienne de l’intégration et de la communion avec la nature, bien présente chez François d’Assise ou Teilhard de Chardin, mais aussi dans les grandes traditions augustinienne, bonaventurienne et pascalienne. « L’écologie, plus que toute autre science, nous place face à la nature en tant qu’entité organique, différenciée et unique. Elle nous aide à comprendre le concept théologique de création, par lequel Dieu et l’univers se différencient et en même temps s’unissent. » Boff invite à développer un « panenthéisme » chrétien, selon lequel Dieu est présent en tout et tout est présent en Dieu, à bien distinguer du panthéisme dans lequel tout est Dieu.

Certains jugeront que je n’ai pas fait place à d’autres voix, plus misanthropes et pessimistes sur l’homme lui-même, des courants de l’écologie profonde. C’est qu’elles sont très minoritaires et peu représentatives, et qu’on les retrouve dans certaines anthropologies théologiques de la misère de l’homme, enfermé dans le péché, la prédestination, voire la damnation. Ni les unes ni les autres ne serviront de fondement pour une spiritualité viable et bénéfique pour l’être humain et toute l’écosphère.

 


Printemps silencieux, Wildproject, 2009 [1962, trad. de l’anglais par Jean-François Gravand (Plon, 1963) révisée par Baptiste Lanaspeze].

On trouve par exemple un rapprochement caricatural de l’écologie profonde avec l’antihumanisme dans Luc Ferry, Le nouvel ordre écologique. L’arbre, l’animal et l’homme, Grasset, 1992.

L’écologie profonde désigne au sens restreint la philosophie écologique spécifique d’Arne Naess, à savoir l’écosophie T (cf. infra), au sens historique « le mouvement de l’écologie profonde » issu de l’influence d’Arne Naess et, au sens générique, toutes les philosophies de l’écologie qui répondent à la définition originelle de l’écologie profonde de Naess en 1972, qu’elles soient antérieures ou postérieures à cette date. Ce dernier sens correspond bien à l’approche pluraliste de l’écosophie par Naess (cf. infra).

Hans Urs von Balthasar, « L’Évangile comme norme et critique de toute spiritualité dans l’Église », Concilium, vol. n° 9, nov. 1965, p. 11 [trad. française revue à partir du texte original allemand].

En référence à La nouvelle Atlantide de Francis Bacon (1627), autrement dit, à une société qui éliminerait tous les maux grâce au développement des sciences et de la technologie [NDLR].

Arne Næss, Écologie, communauté et style de vie, Éditions Dehors, 2013 [nouvelle trad., 1974 pour le texte original], p. 75. L’écosphère est « le système où se déploient les phénomènes biologiques, système composé de la terre (lithosphère, hydrosphère, atmosphère), des organismes vivants (biosphère stricto sensu) et du soleil, source d’énergie nécessaire à la vie (photosphère) ». Cf. Roger Barbault, Écologie générale. Structure et fonctionnement de la biosphère, Dunod, 2008 [6e éd.], p. 21.

Pour approfondir la vie et la spiritualité de Næss, voir le beau livre d’interview par David Rothenberg : Arne Næss, Vers l’écologie profonde, Wildproject, 2009.

A. Næss, Écologie, communauté et style de vie, op. cit., pp. 311-312.

Henry David Thoreau, Walden ou La vie dans les bois, Gallimard, 1990 [1854].

Aldo Leopold, Almanach d’un comté des sables, Flammarion, 2000 [1949], p. 258.

Cf. Catherine et Raphaël Larrère, Du bon usage de la nature – Pour une philosophie de l’environnement, Seuil, « Champs essais », 2009.

Il s’agit de l’ensemble des espèces vivantes dans un habitat, un endroit donné.

A. Leopold, op. cit., p. 266.

A. Leopold, « Penser comme une montagne » in Almanach d’un comté des sables, op. cit., pp. 168-173.

Hans Jonas, Le principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique, Cerf, 2008 [1979], pp. 30-31.

H. Jonas, Le principe responsabilité, op. cit., p. 268.

Albin Michel, 1994 [1993, trad. du portugais par Alexandra Delfolly]. La traduction française (tout comme la traduction anglaise du livre) évacue curieusement le mot de « spiritualité » du titre original brésilien (littéralement : « Écologie, mondialisation et spiritualité. L’émergence d’un nouveau paradigme »), alors que c’est un aspect central de l’ouvrage !

Ibid., p. 74.

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1 réactions pour « L’écologie profonde, une nouvelle spiritualité ? »

Michel Maruca
06 August 2015

Callicott (a) fait énormément pour l’éthique environnementale mais si peu (si mal) pour l’écologie profonde. De même pour Aldo Leopold, le père intellectuel que Callicott s'est lui-même choisi, qui a fait beaucoup pour la science des interactions entre êtres vivants et si peu (ou si mal) pour la montagne.

Arne Naess vivait dans une cabane (bien plus rudimentaire que la maison de Leopold dans le county) a flanc de falaise. Il aimait Gandhi, qui en fait lui aimait Thoreau (le véritable chantre de la désobéissance civile et du pacifisme). Thoreau a aussi vécu dans une cabane mais lui aussi, bien au chaud dans les bois. Il y a une chose ainsi qui ni Thoreau, ni Leopold, et encore moins Callicot n'aient explore et que Naess, lui, a bien vu, c'est la nature ou la biodiversite est mis en difficultes par la création d'avant le vivant, bien au dessus des forets, dans la montagne, la ou meme les loups ne s'aventurent pas et que Leopold ainsi n'y aurait jamais pu abattre...

Naess était un montagnard, un alpiniste très aguerri. Il sortait du giron cosy de la foret et du milieu couvert pour des fois aller affronter les éléments extrême a mains nues. Naess en savait intrinsèquement bien plus que Leopold a travers ses lectures. Il connaissait la nature du vivant et celle, différente, du non-vivant. Il savait comment ces deux natures se comportaient l'une envers l'autre.

Comment Leopold voudrait-il construire une éthique de la terre (arable) sans sortir de cette terre, sans en comprendre le pourquoi des frontieres? Son éthique ne pourra être qu'a jamais reductrice? De même pour Callicott qui ne voit pas les veritables enjeux naturels de la communauté vivante et qui reste enferme dans un entre-soi tellement flagrant.

Ainsi, plutot que Leopold, pour evoquer une anteriorite de l'ecologie profonde de Naess, on peut prendre Muir, surtout quand celui-ci se tente a grimper les falaises ou surmonter les glaciers. Voila des philosophes de la nature complets, qui en connaissent les grands piliers, et pas seulement, le pré carre du vivant.

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