L’édition 2022 du Forum international pour le bien-vivre l’aura rappelé : il n’y a pas d’avenir sur cette planète en surchauffe pour une humanité qui considère la vie comme un projet d’ascension personnelle ou identitaire fondé sur une croissance matérielle illimitée. Selon un récent rapport d’Oxfam International, le dixième le plus riche de la population mondiale épuise à toute vitesse le budget carbone que les humains devraient se répartir d’ici 2030.

Pour mieux partager le bien-vivre, il faut questionner le recours implicite à une échelle des revenus pouvant croître indéfiniment, et trouver à le remplacer. À quoi pourrait ressembler un nouvel imaginaire permettant une vie bonne, entre trop et trop peu ?

Il y a vingt ans, des organisations québécoises se sont attelées à cette question d’une société juste et soutenable : après cinq ans d’efforts, elles ont obtenu en 2002 que l’Assemblée nationale du Québec adopte une Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale.

L’amélioration des revenus et conditions de vie du cinquième le plus pauvre de la population passe avant l’amélioration de ceux du cinquième le plus riche.

Insuffisante, cette loi n’a pas intégré un principe pourtant incontournable mis en avant dans la proposition de loi citoyenne qui l’avait inspirée1 : que l’amélioration des revenus et des conditions de vie du cinquième le plus pauvre de la population passe avant l’amélioration des revenus et des conditions de vie du cinquième le plus riche.

Sans ce principe, les escalators du haut de la société continuent de monter vers le « beaucoup », le « trop » et le « beaucoup trop », tandis que les escalators du bas ont tendance à emmener leurs passagers « dans le trou » sous un plancher