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Nous comprenons aisément que le salaire horaire ou mensuel est la rétribution d’un emploi. Mais les activités qui ne rapportent pas de dollars ont aussi un rendement. Accomplir un travail chez soi, sans salaire, c’est de la production. Le repas que l’on prépare, la déclaration d’impôts que l’on remplit, l’enfant dont on s’occupe, tout cela a une valeur économique. Les économistes ont même inventé une expression pour ces rendements de l’activité hors marché : ils parlent de « salaires fantômes », formule malheureuse, mais éloquente qui renforce l’invisibilité de ce travail.
Le raisonnement s’applique même à des activités qu’on n’assimile normalement pas à une production. Les rendements du temps de loisir comprennent le plaisir et l’acquisition de compétences : par exemple lorsqu’on pratique un sport ou un instrument de musique, ou que l’on se consacre à un hobby. Le bénévolat apporte des avantages à la communauté et inspire un sentiment de satisfaction à celui qui s’y consacre. Même passer du temps avec un ami – activité que l’on pourrait juger purement « non économique » – renforce des réseaux sociaux de soutien et de réciprocité qui donnent accès à des ressources. L’amitié aussi rapporte un rendement, du seul fait qu’elle est agréable.
Passer du temps avec un ami – activité que l’on pourrait juger « non économique » – renforce des réseaux sociaux de soutien et de réciprocité qui donnent accès à des ressources.
Je développe cette idée de façon assez détaillée parce que, depuis trois décennies, les Américains ont réorienté une part croissante de leur temps vers les activités de marché. Les ménages ont ainsi consacré plus d’heures au travail rémunéré, réduisant d’autant le temps qu’ils passaient à produire d’autres choses chez eux. Ils ont en partie compensé cette réduction en achetant davantage de biens et de services, et à des stades de traitement toujours plus avancé, à l’image des aliments préparés. À l’exception des seniors, les gens effectuent moins de travail associatif non rémunéré dans la communauté locale1. Les loisirs aussi sont plus marchandisés : davantage de dollars dépensés par heure de temps libre et moins des loisirs de participants que de spectateurs. On préfère ainsi des vacances coûteuses à Disneyland plutôt qu’au camping, où l’on dépense peu, mais où il faut faire beaucoup de choses soi-même.
Des millions d’Américains ont perdu le contrôle des rythmes de base de leur vie quotidienne. Ils travaillent trop, mangent trop vite, ont trop peu de relations sociales, passent trop d’heures à conduire et à rester assis dans la circulation, ne dorment pas assez, se sentent trop souvent harcelés. Les détails de ce manque de temps diffèrent selon les groupes socio-économiques, mais, en tant que culture, nous avons une expérience commune de temporalité appauvrie.
(…) Il y a cinquante ans, il était admis que la technologie allait nous libérer du dur travail, mais, quand le pays s’est enrichi financièrement et matériellement, c’est le contraire qui s’est produit. Nous avons vu arriver ce que j’ai appelé l’« Américain submergé ». (…) C’est un mode de vie qui mine les sources fondamentales de la richesse et du bien-être : des liens familiaux et communautaires forts, un sens profond de ce qui importe vraiment et la santé physique.
Il y a cinquante ans, il était admis que la technologie allait nous libérer du dur travail, mais c’est le contraire qui s’est produit.
Toutes les sources montrent que, du milieu des années 1970 à aujourd’hui, la durée du travail pour le marché a augmenté2. (…) Selon les chiffres des enquêtes de l’État, la personne active moyenne travaillait 180 heures de plus en 2006 qu’en 1979 (1 883 heures par an contre 1 703)3. Les tendances sont plus prononcées dans les statistiques des ménages : les couples de 25 à 54 ans mariés avec enfants travaillaient 413 heures de plus en 2006 qu’en 1979. Les hommes sont bien plus nombreux à travailler plus de 50 heures par semaine4 : c’est le cas de 30 % des diplômés d’université et de 20 % de l’ensemble des actifs à temps plein de sexe masculin.
Le revers de la médaille est évident. Une étude de 2004 a constaté que 44 % des personnes interrogées étaient souvent dépassées par leur tâche ou incapables de prendre du recul pour traiter ce qui devait l’être5. Un tiers se déclarait en surtravail chronique. Ces salariés submergés avaient des niveaux de stress bien plus hauts, une santé physique plus dégradée, des taux de dépression plus élevés et une capacité de prendre soin d’eux-mêmes plus réduite que leurs collègues moins pressurés.
Quand les revenus et le temps de travail augmentent, c’est bien connu : l’allure générale de la vie tend aussi à s’accélérer. Cet effet qu’ont prédit il y a quarante ans des théoriciens de l’économie est pourtant rarement mesuré. Une étude internationale menée dans les années 1990 a utilisé le rythme de la marche à pied comme indicateur et parmi trente et une grandes villes du monde étudiées, New York arrivait en sixième position (la première étant Dublin). Après quinze années écoulées à mesurer l’allure des New-Yorkais, il s’est avéré qu’ils avaient pressé le pas6. (...)
Aller vite, travailler beaucoup et, pour certains, gagner gros : ce style de vie peut avoir un sens dans une période d’expansion de la rentabilité et de produits bon marché. Il était particulièrement attrayant pour les membres des professions techniques et libérales, dont les compétences leur octroyaient une plus forte capacité à amasser des gains. Ce type d’allocation du temps centrée sur le travail n’est pas nouveau. La révolution industrielle de la fin du XVIIIe et du XIXe siècle a aussi été une période où l’expansion des affaires a fait monter la durée du travail car les propriétaires des fabriques textiles, des chemins de fer ou des usines chimiques tentaient d’extraire de leurs coûteuses machines le plus de profit possible.
Dans les années qui viennent, pour beaucoup de gens, le processus va s’inverser. Le salaire et les autres retours à attendre d’une heure de travail dans l’économie business as usual vont diminuer. Au niveau individuel, travailler moins est une réaction raisonnable. D’un autre côté, si financièrement travailler moins n’est pas tenable, les gens peuvent choisir de travailler plus. L’économie de l’arbitrage, avec son esprit d’austérité, affirme que s’il y a une dégradation de l’économie et une raréfaction des ressources naturelles, il nous faudra vivre plus pauvres ou travailler plus longtemps.
Travailler moins sur le marché, mais utiliser les heures libérées pour investir dans de nouvelles compétences et de nouvelles activités.
[Je] suggère une troisième option : travailler moins sur le marché en déclin, mais utiliser les heures ainsi libérées de façon productive, pour investir dans de nouvelles compétences et de nouvelles activités. Ce temps sera redéployé de diverses façons : en partie pour remplacer les aliments, l’énergie et les biens de consommation devenus plus chers par des substituts produits chez soi, ou collectivement au niveau local ; en partie pour investir dans des relations sociales, autre forme de richesse ; et en partie dans des activités de loisir très enrichissantes qui exigent assez peu de moyens financiers. Tout cela remplace les produits coûteux, accessoires indispensables du style de vie rapide et à haut revenu.
La vision d’un monde où l’emploi occupe une part bien inférieure de notre temps peut paraître utopique, notamment aujourd’hui où une mentalité de pénurie domine le débat économique. Mais on voit déjà à certains signes qu’un tournant culturel vers une baisse du temps du travail et une vie à moindre impact a commencé7. En 1996, date de ma première enquête sur la question, 19 % des Américains adultes déclaraient avoir effectué au cours des cinq années précédentes un changement volontaire de style de vie qui entraînait une baisse de revenus. En 2004, ils étaient 48 %. (…)
En 1996, 19 % des Américains déclaraient avoir effectué au cours des cinq années précédentes un changement volontaire de style de vie qui entraînait une baisse de revenus. En 2004, ils étaient 48 %.
Leur motivation la plus fréquente était de réduire le stress : elle était invoquée par 47 % des sondés. Environ un tiers ont répondu qu’ils souhaitaient avoir une vie équilibrée, ou davantage de temps, et 30 % ont expliqué leur décision par le désir d’avoir un travail plus riche de sens ou plus satisfaisant. 27 % ont dit vouloir s’occuper de leurs enfants.
Une caractéristique de ces réductions volontaires du temps de travail est claire et nette : ceux qui effectuent ces changements se disent très satisfaits8. Dans l’enquête de 2004, 23 % affirment non seulement qu’ils sont plus heureux mais que l’argent ne leur manque pas. 60 % se déclarent plus heureux mais disent que l’argent leur manque à divers degrés. Seuls 10 % regrettent d’avoir changé de vie.
La crise en cours, si pénible soit-elle, offre une belle occasion d’étendre la possibilité du travail à temps partiel. Dans la première année de récession, beaucoup d’entreprises ont évité les licenciements en réduisant le temps de travail par divers moyens : congés sans solde temporaires, vacances non rémunérées, réduction de la semaine de travail à quatre jours et flexibilité. La Grande Dépression avait eu des effets comparables sur la durée du travail. (…) L’expérience passée suggère que beaucoup de gens vont aimer le temps libre ainsi gagné, notamment ceux qui obtiennent toute une journée hors travail. Certains essaieront de garder leur horaire réduit même quand leur employeur pourra leur redonner davantage de travail. Dans mes recherches, j’ai trouvé des adeptes de la baisse du temps de travail qui avaient à l’origine subi une perte d’emploi ou une réduction involontaire de salaire ou d’horaire, mais qui ont ensuite préféré rester riches en temps.
Il n’existe pas de méthode unique, applicable à tous, pour accroître sa richesse en temps. Ceux qui ont la chance d’avoir un horaire de travail flexible dans leur emploi actuel y parviendront plus facilement. D’autres devront quitter leur emploi, ou ajuster le temps de travail au niveau de leur ménage. Certains jeunes entament leur vie professionnelle en suivant ce modèle : ils évitent ainsi les coûts élevés qui accompagnent le style de vie à gros volume d’heures de travail. Certes, pour beaucoup, gagner moins est tout simplement impossible, parce que leurs salaires sont trop bas. Enfin beaucoup de ceux qui, dans la récession en cours, ont été frappés par le chômage vont peut-être choisir de revenir à des postes moins exténuants que leurs emplois précédents. (…)
Le rééquilibrage entre marché et activité hors marché n’est pas seulement une stratégie d’amélioration du bien-être individuel, c’est aussi une pierre angulaire de la durabilité écologique. À travers la triade des réductions – celles du travail salarié, du revenu et de la consommation marchande –, il s’agit de gagner moins, dépenser moins, émettre et dégrader moins. (…)
Les pays où la durée annuelle du travail est plus longue ont des empreintes écologiques plus lourdes. Une étude du Center for Economic and Policy Research9 a conclu que, si les États-Unis adoptaient en la matière les habitudes des pays d’Europe occidentale, leur consommation d’énergie baisserait d’environ 20 %. Pourquoi une durée du travail plus courte réduit-elle l’usage des ressources ? Le lien le plus évident est un effet d’échelle10. Travailler pour le marché apporte un revenu qui sert à acheter des aliments, des produits, de l’énergie et de la mobilité. Ces achats diminuent quand la baisse de la durée du travail s’accompagne d’une baisse du revenu, phénomène analogue à la réduction des dépenses pendant une récession. Mais il y a deux autres canaux, qui sont l’un et l’autre « compositionnels », car ils modifient le « panier » de produits achetés.
Les ménages plus riches en temps peuvent étendre leurs vêtements au lieu d’utiliser un sèche-linge électrique, passer à des modes de transport moins intensifs en énergie…
Le premier canal, ce sont les changements qu’induit la baisse de revenu dans le mix des biens et services : les ménages réduisent davantage leurs dépenses sur des postes lourds en ressources comme les voyages d’agrément et la rénovation des maisons, ou ils achètent moins d’appareils électroniques de consommation et autres articles relevant de la dépense discrétionnaire. Le second canal, ce sont les changements qu’induit le gain de temps dans le mix des produits et activités. Les ménages plus riches en temps peuvent se livrer à des activités plus lentes et moins intensives en ressources. Ils peuvent étendre leurs vêtements sur une corde à linge au lieu d’utiliser un sèche-linge électrique, ou passer à des modes de transport moins intensifs en énergie, mais plus gourmands en temps (les transports publics au lieu du véhicule privé, l’autobus ou le train plutôt que l’avion). Ils peuvent jardiner et cuisiner chez eux. Une étude finlandaise sur l’intensité du temps en matériaux11 a révélé qu’une heure de repas au restaurant utilise 11 kWh d’énergie, tandis qu’une heure de repas à la maison (en comprenant tous les trajets pour acheter les aliments, le gaz pour faire la cuisine, etc.) n’en consomme que 7,4. Une étude française a constaté, après contrôle de la variable revenu, que les ménages à durée de travail plus longue12 dépensaient davantage pour le logement (ils achetaient des maisons plus grandes avec davantage d’appareils), pour le transport (quand on travaille beaucoup, on utilise moins les transports publics), en frais d’hôtel et de restaurant. Or ces trois catégories de dépenses sont classées parmi les plus préjudiciables à l’environnement par plusieurs mesures, telles les émissions de carbone et l’empreinte écologique.
La plénitude nécessite de substituer à certains usages du temps d’autres usages très bénéfiques, dans l’idéal ceux qui peuvent avoir une double ou même une triple finalité : produire pour soi, fabriquer des articles que l’on pourra vendre ou échanger contre d’autres, s’engager dans des activités riches de sens, qualifiantes et améliorant son niveau de vie…
La tendance à l’auto-approvisionnement s’est déjà solidement ancrée chez les petits entrepreneurs, les adeptes de la simplicité volontaire et un groupe de « bionniers », pionniers du biologique et inventeurs écologiques qui mènent un style de vie à faible impact avec des technologies durables. Certes, l’auto-approvisionnement a aussi une histoire moins marginale. Certaines des activités qu’il recouvre, comme le bricolage et le tricot, ont toujours eu leurs enthousiastes. Dans d’autres cas, les gens reviennent à des arts pratiqués par les générations précédentes, mais qui s’étaient perdus, comme le travail du bois, le patchwork, le brassage de la bière, les conserves et confitures. Le jardinage, la chasse et la pêche sont d’autres exemples, de même que la couture, l’entretien et la rénovation des maisons ou la construction d’un ordinateur à partir de ses composants en pièces détachées.
Les gens se livrent à ces activités parce qu’ils y prennent plaisir, parce qu’elles leur procurent des produits de meilleure qualité, ou qui ne sont pas faciles à trouver, et parce qu’elles peuvent être un moyen moins onéreux d’accéder à des biens qui leur font envie. Produire artisanalement des confitures, des sauces, des viandes fumées ou des pulls, couettes et vêtements faits main rend abordables ces articles coûteux. Les attitudes sociales envers ces pratiques ont changé aussi, si bien que ces choix deviennent plus courants : ils n’apparaissent plus comme des styles de vie inférieurs imposés par une triste situation. (…)
L’intérêt économique à long terme de l’auto-approvisionnement est d’élargir l’éventail d’options d’un ménage sur ses décisions en matière d’emploi, sur l’usage de son temps et sa consommation. Plus on peut s’auto-approvisionner, moins on a besoin de faire rentrer de l’argent pour maintenir son niveau de vie. Ces dernières années, la faisabilité technique d’une production « à la maison » pour satisfaire des besoins fondamentaux comme l’alimentation, l’énergie, l’habillement et l’habitat s’est accrue. L’auto-approvisionnement est devenu l’un des points d’appui de la vie intelligente et durable.
(…) Il est vrai que le principe de diversification est caractéristique d’une ère antérieure, préindustrielle. (…) Sur les cinq continents, les ménages d’agriculteurs produisaient des aliments à consommer et d’autres à vendre. Ils élevaient des animaux et fabriquaient bon nombre des articles qu’ils utilisaient dans leur vie quotidienne. Les femmes d’une maisonnée étaient souvent fileuses et vendaient leur fil à des marchands. Des membres du ménage tissaient du drap, ou participaient aux systèmes de sous-traitance des manufactures où les marchands avançaient les matériaux puis achetaient les produits finis ou assemblés. Les ménages urbains agissaient dans le même esprit : ils utilisaient tous les atouts productifs qu’ils pouvaient avoir pour se créer de multiples sources de revenus. Les femmes prenaient des pensionnaires, faisaient office de banquiers dans des systèmes monétaires informels, vendaient des produits alimentaires hors du foyer, etc. Et beaucoup de ces pratiques sont encore courantes aujourd’hui.
Il est judicieux de diversifier ses revenus quand le marché du travail connaît des hauts et des bas ou s’oriente durablement à la baisse.
Si ces dispositifs peuvent sembler désespérément prémodernes, ils reflétaient dans leurs environnements un calcul économique raffiné. Les conditions climatiques étaient incertaines, les marchés instables et la sécurité collective incomplète. Or ce sont justement les caractéristiques qu’il faut s’attendre à voir s’accentuer dans les années qui viennent, et pas par accident. Il est judicieux de diversifier ses revenus quand le marché du travail connaît des hauts et des bas ou s’oriente durablement à la baisse. (…)
Fabriquer des chaussures, des vêtements ou même des grille-pain dans des usines centralisées n’est plus nécessaire, et pourrait même cesser d’être financièrement avantageux, notamment après intégration des coûts environnementaux. La production à petite échelle, dans les ménages ou dans les localités, évite les coûts de transport, qui vont augmenter. C’est une méthode qui produit à la demande, donc qui réduit le gaspillage au minimum en évitant la surproduction (problème chronique de la production en série). Elle intègre des caractéristiques souhaitables pour le consommateur, comme la possibilité de personnaliser. La production à petite échelle et autonome correspond aussi aux compétences émergentes de la population. Dans l’ancien système de la production en série, les connaissances et l’expertise numérique avancées étaient concentrées chez les cadres et les concepteurs, et le travail en col bleu et col rose était déqualifié. En revanche, une économie technologiquement avancée a besoin d’une diffusion plus large des connaissances et de l’expertise numérique, et il en va de même pour les systèmes d’agriculture et de fabrication à haute productivité et faible impact. Lorsque ces compétences se répandent dans toute la population, l’échelle efficace de la production se réduit. (…)
L’auto-approvisionnement est aussi un stimulant de la création d’entreprise. La plupart de ceux qui le pratiquent n’autoproduisent pas tout. Ils trouvent certaines activités productrices qu’ils préfèrent, pour lesquelles ils sont plus compétents ou qu’ils peuvent accomplir plus facilement. Ils échangent ou vendent ce qu’ils produisent le mieux. C’est déjà ce qui se passe dans certains domaines à la pointe du mouvement, comme la construction de maisons et la permaculture. Avec cette spécialisation, l’auto-approvisionnement devient une voie d’incubation pour une série de petites entreprises qui s’épanouiront quand l’économie durable décollera.
(…) Ce système sera-t-il agréable ? Il y a des problèmes, bien sûr, mais passer de la paperasse au jardinage a plu à beaucoup de gens. Les adeptes de l’auto-approvisionnement valorisent les compétences qu’ils acquièrent et apprécient cette possibilité d’être créatifs : la construction d’un style de vie où il faut compter sur ses propres forces les satisfait et les sécurise. Ils sont nourris par leur lien avec la terre et, le plus important peut-être, leur récompense est la possibilité de vivre sans mettre en danger les autres et la planète.
Cet article a été réalisé à partir d’extraits de Juliet B. Schor, La véritable richesse. Une économie du temps retrouvé, Éditions Charles Léopold Mayer, 2013 [2010, traduit de l’américain par Françoise et Paul Chemla]. Nous remercions chaleureusement les éditions Charles Léopold Mayer de nous avoir permis de reproduire des passages de cet ouvrage.
1 Voir, par exemple, Robert Putnam, Bowling Alone : The Collapse and Revival of American Community, Simon and Schuster, 2000. Sur l’exception des seniors, voir Kristin A. Goss, « Volunteering and the Long Civic Generation », Nonprofit and Voluntary Sector Quarterly, vol. 28, 1999, pp. 378-415.
2 De 1975 à 2003, le travail principal pour le marché (travail rémunéré) a augmenté de 2,5 heures par semaine tandis que le travail ménager non rémunéré a baissé de 2 heures par semaine. Ces statistiques sous-estiment la hausse parce que le nombre de semaines travaillées par an a augmenté. La durée du travail des femmes a beaucoup plus augmenté que celle des hommes (cf. Mark Aguiar et Erik Hurst, « Measuring Trends in Leisure : The Allocation of Time over Five Decades », The Quarterly Journal of Economics, vol. 122, n°3, 2007, pp. 969-1006).
3 Ce chiffre vient de Lawrence Mishel, Jared Bernstein et Heidi Shierholz, The State of Working America 2008/2009, An Economic Policy Institute book, Cornell University Press, 2009, p. 128.
4 Peter Kuhn et Fernando Lozano, « The Expanding Workweek ? Understanding Trends in Long Work Hours Among US Men, 1979-2006 », Journal of Labor Economics, vol. 26, n°2, 2008, pp. 311-343.
5 Ces conclusions et celles qui suivent viennent de Ellen Galinsky, James T. Bond, Stacy S. Kim, Lois Backon, Erin Brownfield et Kelly Sakai, Overwork in America : When the Way We Work Becomes Too Much, Families and Work Institute, 2004.
6 Robert Levine, A Geography of Time : The Temporal Misadventures of a Social Psychologist, or How Every Culture Keeps Time Just a Little Bit Differently, Basic Books, 1997.
7 Pour l’enquête de 1996 sur ceux qui réduisent leur temps de travail, voir J. Schor, The Overspent American : Upscaling, Downshifting and the New Consumer, Basic Books, 1998, chap. 5 et J. Schor, « Voluntary Downshifting in the 1990s », in James Stanford (dir.), Power, Employment and Accumulation : Social Structures in Economic Theory and Practice, M. E. Sharpe, 2000. Les chiffres de 2004 viennent de Widmeyer Research and Polling, New American Dream : A Public Opinion Poll, Center for a New Amercian Dream, 2004.
8 Sur les attitudes envers la baisse volontaire du temps de travail, les sources sont J. Schor, 1998 et 2000, op. cit. et Widmeyer Research and Polling, op. cit.
9 David Rosnick et Mark Weisbrot, Are Shorter Work Hours Good for the Environment ? A Comparison of US and European Energy Consumption, Center for Economic and Policy Research, 2006.
10 La relation entre empreinte écologique et dépenses de consommation est analysée dans Manfred Lenzen et Shauna A. Murray, « A Modified Ecological Footprint Method and its Application to Australia », Ecological Economics, vol. 31, 2001, pp. 227-255 et Thomas Wiedmann, Jan Minx, John Barrett et Mathis Wackernagel, « Allocating Ecological Footprints to Final Consumption Categories with Input-Output Analysis », Ecological Economics, vol. 56, 2006, pp. 28-48.
11 Mikko Jalas, « A Time Use Perspective on the Materials Intensity of Consumption », Ecological Economics, vol. 41, 2002, tableau 1, pp. 115-116.
12 François-Xavier Devetter et Sandrine Rousseau, « Working Hours and Sustainable Development », Review of Social Economy, n° 69, 2011, pp. 333-355 (document communiqué à titre privé à l’auteure avant sa publication).