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Constatant que notre mode de relations tend à se réduire aux relations économiques, vous jugez urgent de retrouver le temps que nous avons perdu. Quels liens faites-vous entre notre système économique et la question du temps ?
Juliet Schor - Nous aurons toujours des relations économiques les uns avec les autres, mais nous avons besoin aussi de davantage d’égalité et de relations de dépendance et d’interdépendance, de personne à personne, une nouvelle économie de réciprocités. La quantité de temps consacrée à l’activité économique ou à la reproduction d’un niveau de vie varie selon le type d’économie. Les économies capitalistes se caractérisent par la croissance de la productivité, pour produire davantage avec la même somme de travail. Mais utilise-t-on cette croissance pour donner davantage de temps aux gens ou pour produire davantage en intensifiant le travail, en augmentant les heures travaillées ? Dans des périodes d’excédents de main-d’œuvre (de chômage élevé), les employeurs intensifient le travail et accroissent les heures travaillées ! Les personnes hautement qualifiées constatent, elles aussi, une accélération de leur travail et de leur vie quotidienne. Les heures de travail débordent désormais sur le domaine de la vie personnelle. Les facilités technologiques permettent d’amener du travail chez soi ou n’importe où. Et dans la situation actuelle, qui se sent en capacité de refuser cette expansion ? Les postes d’encadrement aussi sont devenus plus concurrentiels : autrefois, aux États-Unis, ils étaient réservés à une population masculine blanche, mais désormais les femmes, les gens de couleur et les étrangers peuvent aussi y prétendre.
Nous n’avons, semble-t-il, jamais eu autant de temps libre et pourtant, nous nous sentons « surbookés »…
Juliet Schor -Les cad
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