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La crise du logement en France résulte aussi d’une concentration de la propriété et d’un recul des politiques publiques. Face à la spéculation, des modèles alternatifs émergent en Europe.
Le phénomène de la spéculation immobilière est-il consubstantiel à l’existence de l’habitat et du logement ? Comment s’est-il développé ?
Isabelle Rey-Lefebvre – La spéculation immobilière est liée à la propriété même de l’habitat. En France, un vrai décrochage des prix immobiliers, surtout à l’achat, par rapport aux revenus des classes moyennes et des plus modestes, s’est produit depuis les années 2000. La crise du logement est celle de l’accessibilité financière.
Plusieurs indices le montrent, comme le nombre de résidences secondaires, qui croît aujourd’hui plus vite que le nombre de résidences principales. On voit se dessiner une concentration de la propriété qui n’existait pas jusque dans les années 1990. Auparavant, l’accession à la propriété se développait.
L’Insee a publié, au début de la décennie, un chiffre sur les multi-propriétaires qui m’a stupéfiée : un million de ménages, soit 3,5 % des foyers français, détiennent plus de cinq logements. Ils exercent une emprise sur le cœur des villes et sur le parc locatif privé, dont ils détiennent plus de la moitié dans de grandes villes comme Paris, Lyon, Marseille ou Bordeaux.
« Aujourd’hui, en France, les 10 % les plus modestes n’ont toujours pas retrouvé leur niveau de vie d’avant la crise financière de 2008. »
Cette concentration est une nouveauté en France, où il n’y a pas eu d’achat de milliers de logements par des fonds d’investissement comme aux États-Unis. Elle s’explique par l’écart entre les revenus moyens-modestes et les très hauts revenus. Aujourd’hui, les 10 % les plus modestes n’ont toujours pas retrouvé leur niveau de vie d’avant la crise financière de 2008.
Quel contexte a rendu possible cette concentration immobilière ?
Une raison fondamentale, flagrante, à la crise du
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