Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
Comme les glaciers régressent insensiblement sous l’effet de transformations du climat, les journaux d’information générale et politique (payants) seraient en voie de disparition. Le lectorat de quotidiens-dinosaures souffre d’une lente érosion. Devenu consommateur de « news », le lecteur – surtout jeune – n’est plus prêt à payer. Mieux : souvent, il évite, contourne le professionnel de l’information. Les gratuits grimpent ; les blogs explosent ; la distraction envahit le champ médiatique, y compris celui de l’information. Inquiétude. La pub déserte les journaux traditionnels. L’argent manque. Le quadrillage des conglomérats industriels se resserre. Les « familles » renforcent leur présence. Malaise. Alors : faut-il reprendre ces alarmes inutiles entendues lorsqu’une espèce a déjà disparu ? Soulager sa conscience en criant haro sur les concentrations ? Le ralliement sera prompt, mais sans efficacité sur notre capacité à affronter l’avenir, pour soutenir la réinvention démocratique au sein même des nouveaux modèles économiques et culturels qui émergent dans les médias. Commençons par restituer la réalité du paysage, moins apocalyptique qu’il n’y paraît. Commençons par identifier quelles pressions sont en œuvre et pourquoi. Pour ensuite interroger les responsabilités là où elles doivent s’exercer à de nouveaux frais : celles des entreprises de médias et des groupes qui les portent, celles des journalistes – en particulier comme collectif professionnel, celles des pouvoirs publics. Avec une urgence : ne pas laisser la complexité des enjeux, et parfois leur technicité, détacher la question de l’avenir de la presse d’information des débats proprement politiques. Et avec un défi : réinventer les médiations écrites, dans lesquelles les démocraties trouvent le lieu premier de leur expression.