Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
Les motivations pour emprunter l’un de ces itinéraires « agroécologiques » sont souvent les mêmes parmi les producteurs : le besoin d’effectuer un métier plus propre, de moins polluer et de moins s’intoxiquer, de mieux valoriser aussi les fruits de son travail et de réduire ses coûts. Le tempo de cette conversion apparaît, en revanche, très différent d’un exploitant à l’autre. Tous les cas de figure sont possibles.
Quelques-uns opèrent ce changement directement, presque sur un coup de tête, souvent dans un contexte de développement de l’agriculture biologique, comme au début des années 2000. D’autres effectuent une conversion préparée par une formation et des essais dans un coin de leur ferme, qu’ils effectuent un peu moins rapidement (entre trois et quatre ans), souvent après un événement déclencheur personnel lié à la maladie d’un proche, à une rencontre avec un collègue ou la crise de son secteur.
Certains, et c’est le cas du vigneron Rémi Bonnet-Huteau, s’engagent dans l’agriculture biologique d’une manière plus progressive, par étapes (en passant par l’agriculture raisonnée ou intégrée), sur une partie de leur exploitation ou de leurs productions. Car l’agriculture biologique demeure un art bien délicat en Muscadet. Et sur les 600 vignerons de l’appellation, seuls une douzaine se sont convertis ou sont en cours de conversion en 2010. « Ce que j’ai compris des agriculteurs bio, c’est qu’il fallait réapprendre la physiologie de la vigne et son écologie, et que l’on ne réussirait pas notre conversion si l’on cherchait seulement à remplacer un produit chimique par une substance naturelle – ce que trop de techniciens des coopératives et chambres d’agriculture nous disent de faire. »
Stimulé par ses pairs et ses premières expériences, Rémi vient d’opter pour la biodynamie1. Quel parcours pour quelqu’un qui baignait dans les pesticides il y a six ans à peine ! Un pari risqué ? Techniquement, sans doute. Commercialement, peut-être pas. Car l’avenir du Muscadet étant aujourd’hui menacé par la surproduction, un label de qualité pourrait faire la différence. Et il devrait sauver son domaine, tout en faisant « enfin le métier dont [il est] fier ». Il peut l’être, car la dégustation de son Muscadet bio est un grand moment de bonheur : c’est le fruit de la transformation écologique de son vignoble, assure-t-il, et la préservation jalouse du « véritable trésor de la vigne : ses levures d’origine, qui se développent sur les grappes, permettent de transformer les sucres en alcool et sont la clé des arômes. »
Cet itinéraire n’est pas une exception. Près de 10 % des vins français sont à présent bio et les surfaces viticoles en agriculture biologique ont augmenté de 50 % en seulement deux ans ! Au-delà, de plus en plus de producteurs, quelles que soient leurs cultures, adoptent des itinéraires techniques plus sobres en intrants (pesticides et engrais). Si l’on regarde les courbes des quantités de pesticides répandues dans le monde, toutes catégories confondues, on peut d’ailleurs commencer à espérer : en tonnage, les baisses sont continues ou presque au cours des dernières décennies – surtout pour les insecticides.
On avait atteint des sommets vertigineux, il est vrai, dans les années 1960 à 1980 ! L’UIPP [Union des industries de la protection des plantes, NDLR]2 certifie qu’entre 1950 et 2000, les doses moyennes de pesticides utilisées à l’hectare ont été divisées par plus de 8, passant de 1,3 kg à moins de 150 g... Deux raisons principales expliquent cette tendance : la crise agricole pousse à devenir plus économe, et des molécules plus toxiques à faibles doses ont été commercialisées – plus « efficaces », corrige l’UIPP, qui affirme que leurs substances sont devenues aussi moins dangereuses pour les utilisateurs. L’usage le dira.
Il n’empêche, on continue à dépenser des sommes folles au niveau mondial pour les pesticides : l’équivalent de 28 milliards d’euros pour la seule année 2010, alors que les pertes dues à l’ensemble des bioagresseurs (maladies, insectes, « mauvaises herbes », mollusques, rongeurs...), elles, n’ont jamais baissé. On estime en effet que ceux-ci grèvent toujours 30 à 40 % des cultures sur terre, soit autant qu’il y a cinquante ans. Cherchez l’erreur ! La planète agricole reste en réalité prisonnière d’un engrenage absurde où les semences sélectionnées et la fertilisation excessive ont affaibli les cultures. Ce qui amène certains à augmenter le nombre de traitements ou leurs dosages, provoquant ainsi une multiplication des cas de résistances des bioagresseurs, des intoxications des agriculteurs, des pollutions diverses et des destructions d’insectes auxiliaires (qui aident l’agriculteur) et de la biodiversité rurale en général. De quoi modérer notre optimisme ! Surtout que, depuis 2006, les épandages de pesticides sont repartis à la hausse en France, avec + 10 % en deux ans. La raison ? Les surfaces semées en céréales ont augmenté, suite à l’abandon des obligations de jachères et à l’envolée des prix des céréales en 2007 et début 2008.
On continue à dépenser des sommes folles pour les pesticides, alors que les pertes dues à l’ensemble des bioagresseurs (maladies, insectes, « mauvaises herbes »...) n’ont jamais baissé.
Les herbicides représentent près de la moitié des ventes de pesticides dans le monde (en chiffre d’affaires). Mais, en tonnage, ce sont plutôt les fongicides qui arrivent en tête. Ils ont même progressé au cours des dix dernières années (notamment le soufre), alors que la part des insecticides, elle, a diminué. C’est surtout la viticulture et l’arboriculture fruitière qui font la part belle aux fongicides, ainsi que certaines grandes cultures (blé et pomme de terre), par ailleurs premières consommatrices de désherbants.
Le ver est (parfois) dans le fruit, mais au moins il est sain ! En France, les herbicides arrivent en tête, représentant, en 2009, 45 % des 65 millions de doses répandues en zone agricole ; puis les fongicides (y compris les bactéricides) : 39 % ; les insecticides : 11 % ; et les autres substances (régulateurs de croissance, éclaircisseurs chimiques...) : autour de 7 %. Notre pays a le bonnet d’âne des utilisateurs de pesticides en Europe avec 77 000 tonnes de matières actives vendues chaque année et 2,3 milliards d’euros de ventes en 2009 (dont 68 % aux céréaliers), contre moins de 1,4 milliard d’euros pour notre principal concurrent agricole, l’Allemagne. Au plan mondial, la France se situe juste derrière les États-Unis, le Brésil et le Japon, mais dans la moyenne européenne quant à la consommation par hectare.
Nicolas et Anne-Catherine Petit, eux, ont profondément transformé la ferme gasconne qu’ils ont achetée, en novembre 2001 : « À l’origine, il n’y avait pas un arbre ou presque ici, trois bâtiments industriels en béton pour une production de poulets en batterie et des coulées de boue qui entraient jusque dans les cuisines d’un manoir bien mal en point… » Dans sa première vie, Anne-Catherine était institutrice ; lui était responsable commercial au Printemps. Après avoir suivi une formation en élevage de moutons durant neuf mois puis fait leurs classes pendant deux ans chez un éleveur de bovins biologique en Haute-Vienne, ces néo-ruraux venus du Nord avec leurs trois enfants sont devenus éleveurs et poly-cultivateurs bio dans cette ferme-manoir.
Nous étions « en quête de sens pour notre vie », insiste Nicolas, 42 ans aujourd’hui. Du sens qui passe impérativement pour eux par la présence de l’arbre, fidèle compagnon des hommes. Protecteur contre le vent, l’érosion et les morsures du soleil, hôte de centaines d’organismes, capteur de l’humidité enfouie dans les sols, initiateur de rêves lorsque la brise fait onduler sa frondaison ou sa silhouette sur la ligne de crête, l’arbre offre en plus aux hommes, grâce à son bois, un capital sur patte inespéré pour leurs vieux jours ou pour faire face aux coups du sort. Aussi, chaque année depuis 2002, les Petit ont planté toutes sortes de ligneux3 avec leurs collaborateurs et l’association locale Arbre & Paysage 32, dont Nicolas est devenu le président [de 2006 à 2012]. Pas moins de 6 000 arbres au total sur leurs 40 hectares ! De quoi redessiner entièrement les parcelles de leur ferme avec des arbres taillés en têtard (notamment frênes, peupliers noirs et saules marsault), des fruitiers (cognassiers, néfliers, noisetiers, noyers, poiriers, figuiers, pommiers, cerisiers…) et des essences de bois d’œuvre (châtaigniers, merisiers, alisiers, cormiers, chênes verts…).
Entre ces arbres et leurs 5 200 mètres linéaires de haies et de bandes enherbées, ils cultivent des céréales et un potager, montent des enclos temporaires pour des porcs, des moutons, un âne et des chèvres, et un clapier pour quelques lapins. Et surtout ils déplacent neuf cabanes en bois pour abriter leurs volailles, au fil des saisons. « J’ai construit ces cabanes avec des roues afin de pouvoir les transporter et limiter les problèmes parasitaires de mes volailles, explique Nicolas Petit. Car, étant en bio, je ne traite pas avec des produits vétérinaires chimiques. Or, en changeant de place tous les cinq à huit mois, les larves de parasites n’ont guère le temps d’achever leur cycle, ce qui limite leurs populations. » Contraignant mais imparable, le coup de la caravane à poulets ! « Depuis neuf ans que j’élève ainsi mes volailles, je n’ai jamais eu de problèmes de parasites dans leur foie, leur gésier ou leurs intestins. »
Nicolas s’enorgueillit de fabriquer lui-même leurs aliments et d’abattre ses poulets au bout de quatorze à seize semaines (contre onze semaines et demi pour les poulets Label Rouge ou agriculture biologique). La vente de 160 volailles bio chaque semaine, à la ferme et sur un marché aux portes de Toulouse (à 7,75 € le kilo), représente environ 60 % de leurs revenus. Le reste provient des cultures, de la vente de quelques cochons et de l’accueil de scolaires et d’handicapés mentaux pour des initiations à l’environnement rural, ainsi que de la location de gîtes ruraux aménagés sur leur propriété. « Avec tout cela, nous nous en sortons très correctement – le revenu moyen par personne est compris entre 1 500 et 2 000 € par mois – et nous aurons remboursé d’ici à cinq ans tous nos investissements en terre et en travaux, d’environ 1 million d’euros. » Leur réussite est d’autant plus remarquable qu’ils prennent quatre semaines de vacances par an.
Qu’en disent leurs voisins ? « Qu’est-ce que vous croyez ? Un gars qui n’est pas d’origine paysanne ni du coin, il ne sera pas accueilli à bras ouverts, sourit Nicolas Petit. Et d’autant moins s’il est en agriculture biologique. Ils sont tout de même venus voir, surtout intrigués par le nombre d’arbres que nous plantons, et ils m’achètent régulièrement des poulets et des pintades. J’ai alors le sentiment qu’ils reconnaissent mon travail et la qualité de mes produits. De là à ce qu’ils bougent… Je n’en ai pas vu un seul se convertir à l’agriculture biologique. Et pourtant ce sont des jeunes ! »
Avec la mécanisation, on a considéré les arbres comme des obstacles dans les champs, et ils ont disparu rapidement.
Le projet contraste avec l’appauvrissement ligneux dans les champs tout au long de la route qui me ramène chez moi, en Languedoc. Pourquoi les arbres sont-ils si rares au sein des parcelles cultivées ? En a-t-il toujours été ainsi ? Comment se fait-il que l’on ne sache pas ou plus conjuguer sylviculture et agriculture, alors que d’autres peuples en zones tropicales l’accomplissent avec talent – en témoignent les superbes jardins-forêts cultivés par des paysans à Sumatra, en Indonésie ? Dans nos pays tempérés, l’aventure agroforestière serait-elle sans avenir ? Et entre ces deux types de productions, faut-il toujours choisir, partitionner l’espace par crainte que l’une ne vampirise les ressources nécessaires au développement de l’autre ? Agronome et forestier détaché à l’Inra [Institut national de la recherche agronomique, NDLR] de Montpellier, Christian Dupraz explique qu’il y a toujours eu, en France, des arbres dans les parcelles cultivées jusqu’au début du XXe siècle. Toutes les parcelles agricoles ont été obtenues par déboisement au Moyen-Âge, mais le défrichement n’était pas intégral et l’on cultivait au milieu des arbres. Ce n’est qu’avec la mécanisation que l’on a considéré les arbres comme des obstacles dans les champs, d’où ils ont disparu rapidement. On estime qu’il y avait 600 millions d’arbres isolés dans les parcelles agricoles il y a soixante ans ; il n’en reste aujourd’hui qu’un peu moins de 200 millions.
Une référence incontournable de l’agroécologie française se situe à quelques dizaines de kilomètres de l’océan céréalier des Deux-Sèvres. C’est dans les bocages verdoyants de la Vendée que Jacques et Pierrette Morineau ont développé leur exploitation, le Gaec [Groupement agricole d’exploitation en commun] Ursule. Installé en 1983 sur cette propriété héritée en partie des parents de sa femme, Jacques se lance d’abord dans un système chimique intensif. « Or, en 1988, nous avons réalisé que plus on mettait d’intrants sur nos céréales, et notamment des fongicides, plus nos revenus fondaient… L’année d’après, on a même failli mettre la clé sous la porte ! Donc il a fallu arrêter tout ça et repenser l’ensemble de notre système. » Avec une dizaine d’agriculteurs, il forme un groupement d’échange et de réflexion, qui rejoint le Réseau agriculture durable (Rad) en polyculture-élevage, dont il deviendra président.
« On a désintensifié, sans passer à l’extensif pour autant. » Qu’est-ce à dire ? Le succès de leur ferme tient en cinq formules :
1. Optimiser la complémentarité entre l’élevage et les cultures, pour devenir autonome en matière d’alimentation des bovins.
2. Bien maîtriser la culture des prairies (ici, près de 130 hectares), le cœur de l’exploitation.
3. Augmenter le nombre de cultures en rotation, de printemps et d’hiver, notamment avec des légumineuses, et effectuer beaucoup d’associations de différentes espèces et de variétés diverses (ils passent de 7 à 29 espèces).
4. Subdiviser leurs 260 hectares en parcelles d’une surface maximum de 8 hectares, pour contrôler au mieux les bioagresseurs, insectes comme plantes adventices [indésirables].
5. Enfin, enrichir les parcelles de haies et de bandes enherbées (près d’une quarantaine de kilomètres ont déjà été plantés, en introduisant aussi des arbres dans ses champs). « Ces habitats naturels n’ont que des avantages : ils favorisent l’installation des insectes auxiliaires, nous approvisionnent en bois de feux, protègent nos cultures du vent et offrent de l’ombre à notre troupeau, ce qui est meilleur pour le confort des vaches, leur consommation et donc leur production de lait. »
Seul échec que confesse Jacques : la présence de limaces sur ses colzas. « Si j’utilise un anti-limace, je flingue aussi les carabes [des insectes] qui les boulottent… Alors, je résiste, en espérant que mes pertes seront provisoires et que les auxiliaires finiront par m’aider à rétablir la situation. » Pour les autres ravageurs, son système d’associations et de rotations très sophistiqué lui a permis de se débarrasser de la mosaïque du blé, des pucerons, du piétin-échaudage et de l’oïdium, ainsi que de la plupart des herbes indésirables. Sa ferme étant convertie en bio depuis quatorze ans, il n’a droit qu’à des biopesticides. Multiplier les légumineuses, la luzerne en particulier, dans ses rotations, lui a offert « une année sans chardon ni rumex ! ». Et le travail par binage et herse étrille, jusqu’à 12 cm de profondeur, devrait l’aider à contenir le vulpin [une graminée envahissante]. Enfin, pour éviter de compacter ses sols, lui et ses associés prennent certaines précautions comme d’équiper leurs engins de quatre roues de 70 cm de large au lieu des 40 à 50 cm habituels : « Cela ramène la pression au centimètre carré à 600 g au lieu de 1,5 kg. C’est comme passer en raquette au lieu de talons aiguilles ! » Et la luzerne et la féverole participent à ce décompactage.
« En année normale, notre moyenne de rendements sur dix ans est d’environ 80 % de ceux de nos voisins pour les céréales et les protéagineux, davantage encore pour la prairie. Et avec la sécheresse de ce printemps, nous nous en tirerons bien mieux qu’eux cette année pour l’ensemble des cultures ! Quant à nos 100 à 110 vaches laitières, nous faisons environ 6 500 litres par vache et par an, même si notre quota nous permet de produire davantage. On va même passer à 80 vaches car, grâce à notre système, on pourra dégager la même marge brute tout en réduisant un peu notre temps de travail. On a réduit de 70 % nos apports d’engrais depuis 1990 et supprimé tous nos pesticides deux ans plus tôt. Aujourd’hui, nos frais s’élèvent à 180 à 200 €/ha (semences et main-d’œuvre comprises). Notre objectif est clair : l’autonomie maximale, y compris au niveau de la construction des bâtiments et de nos consommations énergétiques. Entre le solaire, le petit éolien et le bois de chauffe, nous pourrions demain nous en sortir au plan énergétique. On fait un peu de vente directe à la ferme avec nos volailles, mais surtout à courte distance à une laiterie locale, à un meunier pour les farines et à des magasins spécialisés et des grandes surfaces pour les huiles. Sans compter que l’on fait 30 000 € d’économies par an en produisant nos propres semences ou en les échangeant avec des voisins. »
« On fait 30 000 € d’économies par an en produisant nos propres semences ou en les échangeant avec des voisins. »
Ce système très « intégré » aux processus naturels peut s’apparenter au mouvement de la permaculture, qui vise l’autonomie des fermes et s’inscrit dans une philosophie d’aménagement du territoire en cohésion avec tous ceux qui l’habitent – animaux compris.
Une vérification en plein champ s’impose. Et nous découvrons sur le terrain non seulement un parcellaire très diversifié, avec beaucoup de haies composées d’érables, de noisetiers, de pruniers sauvages, de frênes, etc., mais aussi un damier hallucinant de bandes cultivées étroites et longues : ici, Jacques Morineau nous montre une prairie composée d’un mélange de trèfle blanc, de luzerne, de ray grass hybride et d’avoine, prolongée par une bande de maïs semence, avec plusieurs espaces enherbés, à laquelle succède une autre parcelle étroite de protéagineux, complétée d’une ligne de blé d’hiver semée en novembre et par de la luzerne semée en février. L’agroéconomiste Michel Griffon est ébloui : « Son système est d’une très grande élégance et intelligence. Entre la variation de ses successions de cultures, d’assolement et de taille des parcelles, on a l’impression qu’il a un logiciel dans la tête pour piloter d’une façon très réactive ses différents champs en fonction des aléas météo, des attaques des bioagresseurs et des envies de chaque associé. »
Même virtuosité, quelques mètres plus loin, dans deux champs d’orge d’automne et de pois féverole, qui nous arrivent à la taille. Semés avec deux densités différentes, le résultat est à l’avenant : dans l’un, l’orge menace d’étouffer la féverole tandis que, dans l’autre, les deux cultures semblent mieux équilibrées et les rendements plus prometteurs. « Dans ce dernier champ, on n’a pas planté du 50-50 entre les deux espèces, mais en fait 100 % de protéagineux et seulement un peu de céréales. Et voilà ce que ça donne à l’arrivée ! Mais pour parvenir à cet équilibre à maturité, il a fallu tâtonner, se planter comme dans le premier champ… De toutes façons, un truc qui ne marche pas, il faut le refaire l’année d’après pour en comprendre les raisons, savoir si c’est un effet météorologique, de date de semis à revoir ou une attaque soudaine. Il y a tellement de raisons possibles ! Il ne faut jamais rester sur un échec sans en avoir compris la cause », conclut Jacques à la fin de cette tournée champêtre.
Cet article reprend de larges extraits du livre « Vive l’agro-révolution française » (Belin, 2012). Nous remercions l’auteur et l’éditeur de nous avoir autorisés à les reproduire.
1 La biodynamie est un système de production agricole, développé et expérimenté par les agriculteurs, qui part de l’idée que tout domaine agricole est un organisme vivant, le plus diversifié et le plus autonome possible, avec le moins d’intrants possibles y compris biologiques. Seuls des extraits végétaux (préparats), des composts, ainsi que de la bouse de vache enterrée, sont utilisés.
2 Syndicat professionnel des industriels de la protection des cultures [NDLR].
3 Plante dont la tige contient de la lignine, ce qui lui confère la résistance du bois [NDLR].