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Une nouvelle Afrique du Sud ? Le passage ouvert, voici onze ans, vers une société multiraciale sera long tant le corps social et les modes de vie portent la marque des années d’apartheid. Le régime politique avait durablement façonné toutes les structures du pays, civiles, urbaines et foncières, économiques et politiques. La voie libérale des réformes suscite cependant des interrogations par-delà les progrès déjà soulignés. Tous bénéficieront-ils du développement économique ? Quels mécanismes de redistribution seront efficaces ? L’Afrique du Sud évitera-t-elle de se comporter comme une puissance coloniale vis-à-vis de ses voisins immédiats ? De nouveaux ghettos urbains ne sont-ils pas en train de se constituer comme des citadelles fermées ? La politique de santé publique parviendra-t-elle à endiguer l’inexorable montée du sida, en particulier au sein des couches les plus pauvres de la population ?
A ce jour, aucune question n’est véritablement résolue. Certes, l’attachement de la population à l’ANC, qui fut le parti de la résistance, offre un premier gage de stabilité. Mais le véritable atout de l’Afrique du Sud réside dans la mobilisation de la société. Elle contraint les politiques à affronter le fléau du sida qui menace son avenir. Elle affirme sa fierté et sa persévérance malgré les difficultés. Les leaders politiques sauront-ils la conforter dans sa volonté d’échapper au fatalisme et de faire face à la précarité dans laquelle beaucoup vivent toujours ? La réforme des structures et des normes juridiques du pays démontre qu’il est possible de conjuguer les apports des traditions africaines et internationales et de réinscrire pleinement le pays dans la communauté mondiale.