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Bien qu’il n’ait pas encore été statué sur sa culpabilité, un individu peut être incarcéré pour une durée plus ou moins longue. Une telle mise en détention est contraire à la présomption d’innocence. Elle est justifiée par la crainte que le « suspect », laissé en liberté, ne commette d’autres infractions, ne fasse disparaître des preuves, se soustraie à la justice.
Mais surtout, il demeure considéré comme un « prévenu », même si, depuis 1970, le mot de préventive a été remplacé par celui de provisoire, pour rappeler que la liberté doit être la règle !
Or c’est bien une exigence de prévention qui monte dans tous les secteurs de la société. Et celle-ci a la double connotation de danger possible et de suspicion : un mélange de crainte et de condescendance. Une exigence qui impose de lutter comme d’un cas général face à telle ou telle menace : pédophilie, trafics, corruptions, violence des jeunes… (la loi de 2002 a rendu possible la détention provisoire des mineurs de 13 à 16 ans !).
Dès lors, la détention provisoire, de plus en plus banalisée, est un déni de la présomption d’innocence. Elle est devenue un moyen de pression pour obtenir des aveux.
La France a été condamnée 45 fois par la Cour européenne des droits de l’homme en raison de l’abus, de la longueur de ces détentions provisoires. Le respect de la présomption d’innocence est une garantie pour la justice elle-même.
Bertrand Cassaigne