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Conditions d'un islam de France

©loic80I/ Flickr/CC
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D’autres élections auront eu lieu, le 26 mai 1 : celles de délégués qui désigneront, dans un deuxième temps, les membres du Conseil français du Culte musulman. Elles sont l’aboutissement d’un processus mis en route en janvier 2000 par Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Intérieur. Une large « Consultation » a été conduite par un groupe composé de délégués des grandes mosquées « indépendantes » à rayonnement régional, de représentants des grandes fédérations ou associations nationales musulmanes et de personnalités « qualifiées » 2, sous l’égide d’Alain Billon, conseiller des ministres de l’Intérieur successifs.

Les raisons d’un silence

La publicité relative des débats, au travers du bulletin al Istichara (consultation), n’a pas empêché la démarche de se maintenir dans une certaine discrétion, troublée, il est vrai, par quelques éclats de voix aussi tonitruants que sporadiques. Cette relative atonie s’explique par la détermination louable des acteurs politiques, des intellectuels ou des dignitaires religieux, de dépassionner le processus, mais aussi par le sérieux de la méthode et la transparence affichée par les autorités en charge de ce dossier. Le souci était d’autant plus méritoire que l’on avait à vaincre les désillusions nées de tentatives avortées pour susciter une représentation musulmane unifiée (ainsi, les dissensions provoquées par la mise en place en 1990 du Corif, conseil de réflexion sur l’islam de France). L’enjeu était aussi d’avancer dans un contexte international qui, du conflit proche oriental aux événements du 11 septembre dernier, pouvait nourrir les fantasmes du heurt inéluctable des civilisations.

Mais la faiblesse des réactions ressort aussi de deux types de motifs. D’une part, l’assurance raisonnable de la compatibilité de l’islam avec la République et la satisfaction de voir, enfin, la « deuxième religion du pays » accéder à une reconnaissance symbolique masquent aussi des embarras et une diversité de motivations. Embarras d’autant plus pesants qu’ils ne sont pas formulés, motivations d’autant moins avouables qu’elles rompent avec l’unanimisme du processus. Celui-ci voulait figurer l’unité d’une représentation légitime de l’islam : l’unanimité se devait d’être la règle de la consultation avant que les élections ne tranchent. Mais sur quelles bases trancheront-elles, sinon sur la capacité de mobilisation des réseaux respectifs ? La discrétion était aussi le fruit du désir des « bonnes consciences » de faire taire les voix discordantes ou d’ignorer tous les motifs qui viendraient perturber l’auto-célébration officielle de la tolérance républicaine. Contempteurs fanatiques comme défenseurs naïfs de l’islam partagent souvent la même indignation vertueuse et la même ignorance. Ils sont les seuls à prétendre expliquer ce qu’est réellement l’islam et à rendre compte de manière certaine de ses évolutions futures. La discrétion, enfin, était un choix justifié par des enjeux de pouvoir entre les différents représentants musulmans qui « jouaient » là représentativité et légitimité, ou par les calculs électoralistes des partis politiques.

Pourtant, le silence dominant demeure le signe d’une perplexité, qui se mue, chez certains, en une véritable peur. Car l’incertitude prévaut en ce qui concerne l’issue du scrutin. On ignore le poids respectif des différentes tendances qui structurent l’islam en France. On s’interroge, par exemple, sur l’audience acquise par Tariq Ramadan, petit-fils du fondateur des Frères musulmans et héraut d’un néo-fondamentalisme subtil qui remplit les salles de banlieue et trouve des supporters jusque dans les rangs des chrétiens de gauche ou dans les colonnes du Monde diplomatique. Mais qu’en est-il vraiment de l’influence de ses thèses parmi les plus de 4 millions de musulmans vivant en France ? On souligne l’enracinement d’un islam maghrébin pieux et populaire, qui répugne à toute forme d’extrémisme, mais qu’en sera-t-il de sa mobilisation pour un scrutin qui symbolise, justement, un autre rapport à la modernité et à l’Etat ? L’incertitude concerne non seulement la réalité du rapport de forces actuel au sein de la communauté musulmane, mais surtout les évolutions futures, qui suivront cette consultation et les élections à venir. Quelles sont les structurations politiques et les sensibilités religieuses les plus aptes à profiter d’un tel processus ?

On peut reconnaître ces incertitudes – mais le risque n’est-il pas inhérent à toute décision politique audacieuse, n’est-il pas nécessaire pour sortir des atermoiements précédents ? – et refuser de se livrer à des pronostics hasardeux (catastrophisme ou pétitions de principes), sans pour autant se dérober à la recherche des enjeux d’un tel processus et au jugement nécessaire.

Les inconnues d’un islam de France

L’intention des pouvoirs publics était double. Il s’agissait, d’une part, de permettre à l’islam de rejoindre les autres confessions à « la table de la République 3 ». Pour ce faire, il lui fallait s’insérer « dans le cadre juridique de la loi de 1905 qui fonde la laïcité républicaine », alors que les associations musulmanes étaient principalement régies par la loi de 1901, signe d’une émergence discrète et anonyme 4. Mais cette intégration à la laïcité républicaine se devait aussi de promouvoir l’émergence d’une organisation centralisée et représentative de la population musulmane en France, qui puisse être l’interlocuteur identifié des pouvoirs publics.

L’autre but, plus ou moins déclaré, était de favoriser l’affirmation d’un islam français soustrait aux mainmises étrangères supposées, celles des bailleurs de fonds du Golfe ou celles des pays d’origine sur diverses associations ou fédérations musulmanes. Après s’en être longtemps remis à la Grande Mosquée de Paris pour l’« encadrement » et la représentation des musulmans de France, on considérait que les liens de ses dirigeants avec le pouvoir algérien entamaient par trop sa crédibilité comme interlocuteur de référence. Le point le plus sensible, non résolu à ce jour, était, comme le déclarait Pierre Joxe lors de la définition des fonctions du Corif en janvier 1990, « la contradiction fondamentale qui caractérise l’islam en France : la majorité des pratiquants est de nationalité française alors que la quasi-totalité des imams est de nationalité étrangère ».

Cette transformation de l’islam en France en un islam de France était l’objectif énoncé par de nombreux musulmans, mais aussi recherché par les pouvoirs publics. Une bonne idée, assurément. Mais peut-être, pour ces derniers, cette équation trop réductrice rattache, de manière mécanique, à la constitution d’un islam de France l’identité républicaine et une sensibilité libérale ! L’évidence mérite au moins d’être interrogée : le développement d’un islam de France, dont les responsables auraient fait le choix du cadre républicain – et leur bonne foi ne saurait être suspectée – signifie-t-il nécessairement son option pour une vision libérale et moderne de l’islam ?

On peut critiquer le recours à de telles expressions et les jugements de valeur qu’elles véhiculent. On ne peut cependant trop les relativiser en n’y voyant qu’un européocentrisme étroit, sauf à ignorer les débats qui traversent aujourd’hui l’islam, les options prises par certains pays arabes, et surtout l’engagement courageux de musulmans, parfois au péril de leur vie, pour la défense de ces orientations. La question n’est peut-être pas toujours bien posée, elle ne saurait être évitée. Elle est redoublée par les déclarations vigoureuses que nous avons mentionnées, et qui proviennent du sein même de la Consultation.

Ainsi, dans un entretien avec Daniel Licht (Libération, 29 octobre 2001), Dalil Boubakeur, le recteur de la Mosquée de Paris, avouait-il sa déception, voire son inquiétude. Il dénonçait la complaisance coupable des pouvoirs publics, une « sorte de laxisme qui risque de livrer l’islam de France à une école radicale, celle du fondamentalisme wahhabite qui n’a rien à voir avec l’islam d’Afrique du Nord, sunnite et de rite malékite, majoritaire en France ». Soheib Bencheikh, grand mufti de Marseille et porte-parole de la Fédération des musulmans du sud de la France, membre, comme Dalil Boubakeur, de la Consultation, se montrait encore plus virulent (Libération, 22 octobre). Il qualifiait l’attitude du ministère d’irresponsable et de dangereuse, offrant, selon lui, une légitimité aux associations fondamentalistes. Cette démarche conduisait à « donner un statut à une idéologie comptable des malheurs de tous les musulmans du monde ».

Des hommes politiques, Alain Madelin par exemple, se sont saisis de ces critiques pour appeler à « stopper la machine infernale de cette pseudo-consultation ». Mais d’autres commentateurs, aussi avisés qu’engagés eux-mêmes, n’ont pas manqué de relier ces protestations, surtout celle de Bencheikh, avec « les bénéfices escomptés par certaines puissances régionales maghrébines et notamment en l’espèce, l’Algérie 5 ». Le silence, au moins dans les médias, a vite recouvert ces prises de position. Il ne doit pas occulter la réalité d’une audience renforcée dont ont bénéficié des associations néo-fondamentalistes. L’Uoif (inspirée par l’idéologie des Frères musulmans) ou le Tabligh (mouvement piétiste d’origine pakistanaise) ont, en effet, profité de la tribune qui leur était offerte et sont apparus, par leur pertinence politique et leur capacité de mobilisation, comme les éléments les plus dynamiques parmi les partenaires de la Consultation. Aussi s’éclairent les craintes exprimées : ceux dont l’engagement a été déterminant dans le processus ne seront-ils pas les mieux placés pour en recueillir les fruits ?

Une fausse bonne idée ?

L’étonnement demeure cependant. S’il est aisé de dépasser la fausse évidence d’un islam de France nécessairement libéral, on peine à comprendre pourquoi les associations néo-fondamentalistes ont été les moins réticentes au processus de la Consultation, les plus à l’aise dans le dialogue et la confrontation avec les pouvoirs publics. L’islam le plus compatible avec la République, et même le seul compatible, n’est-il pas l’islam libéral ?

Les réflexions d’Olivier Roy permettent d’esquisser une réponse, montrant comment le néo-fondamentalisme se nourrit de la crise identitaire des immigrés musulmans. Le néo-fondamentalisme accompagne un mouvement caractérisé par « (la) délégitimation et (le) refus des communautés musulmanes existantes (les cultures concrètes, mais aussi les écoles, les confréries et les « sectes »), (l’) instauration de l’individu comme vecteur principal du retour à l’islam, (la) définition d’une oummah abstraite comme la collection des individus pratiquant ainsi l’islam, lequel est défini comme code de comportement (rite et éthique) et non comme culture 6 ». Illustrant cette thèse, un exemple significatif nous est fourni par les rapports des différentes médiatrices, nommées par le ministère de l’Education nationale, pour faciliter la résolution des conflits autour du port du voile à l’école. Intervenant dans différents établissements scolaires, elles notaient que les jeunes filles, le plus souvent, jugeaient assez sévèrement l’islam pratiqué par leurs parents ; et que ces derniers, plutôt dépassés, choisissaient de soutenir leur démarche, sans en avoir été les initiateurs. Les jeunes filles se déclaraient « ni maghrébines, ni françaises mais musulmanes 7 ».

L’apparentement de ces attitudes à une démarche néo-fondamentaliste n’est pas le point final du débat autour du voile, mais il éclaire l’influence de ce mouvement, non seulement à travers les pratiques et conceptions d’associations musulmanes, mais plus largement dans des mentalités et des comportements détachés d’un ancrage militant. « Le néo-fondamentalisme ne provient pas de la translation d’une société traditionnelle dans le monde occidental, c’est un produit et un facteur de la dé-culturation, mais aussi une conséquence d’une intégration en crise. » L’identité « musulmane » se cristallise alors autour d’un code, vide de contenu culturel réel, et le rapport à l’Etat vise une « communautarisation négociée ».

On comprend mieux la capacité de ces associations d’inspiration néo-fondamentaliste à se saisir du processus de la consultation. La laïcité peut être le paravent juridique d’une « communautarisation négociée », rendue possible par le renoncement, sinon le rejet, à des identités culturelles et nationales d’origine. De plus, le néo-fondamentalisme, par son rattachement à une oummah imaginaire, manifeste une indifférence à l’égard de l’Etat : un mouvement comme le Tabligh se désintéresse même de la politique et sa présence, dans la consultation, ne débouchera pas nécessairement sur une participation aux scrutins. Enfin, le mécanisme choisi, avec des élections, correspond mieux à l’individualisation du rapport à l’islam sur lequel repose le néo-fondamentalisme qu’au système d’allégeances et d’autorités des organisations plus traditionnelles.

Le processus qui aboutit aux élections du 26 mai pourrait donc se révéler, en partie, une « fausse bonne idée ». Il était pourtant nécessaire ! Plus encore, il oblige à un double pari : il repose sur une confiance renouvelée, qui n’est plus naïve parce qu’elle est choisie, en l’islam et en la République. Mais cette confiance invite aussi à rechercher les conditions pour que les promesses de la consultation se réalisent. Il importe d’ouvrir le débat et de refuser le caractère de fausses évidences des processus à l’œuvre comme des critiques immédiates.

Ouvrir le débat

La confiance dans l’islam repose d’abord sur ce qui résiste le plus à l’inéluctable des caractérisations, à savoir le fait religieux. Cette dimension est trop ignorée, ou du moins minorée, dans les analyses des politologues qui s’intéressent à l’islam. La prise en compte de l’expérience spirituelle, comme fondement de l’islam, est l’un des nombreux mérites des interventions d’Abdelwahab Meddeb et explique en partie la liberté de son propos. Au risque de verser dans l’anachronisme ou dans un comparatisme impertinent, il peut être éclairant de rappeler la proximité première, dans les années 1920-1930, d’un Maritain ou même d’un Mounier aux thèses de Maurras. Si « la primauté du spirituel » a, par la suite, contesté et, pour finir, détrôné le « politique d’abord » maurrassien, l’expérience religieuse qui animait l’engagement des deux premiers a certainement été déterminante. Aussi, en ce qui concerne le regard porté par les Européens sur l’islam, si une certaine forme d’orientalisme est morte, comme se plaisent à le souligner ses critiques, sa visée et sa capacité à relier différentes disciplines demeurent nécessaires.

Il faut, ensuite, souligner que la communauté musulmane subit, comme toutes les communautés, une sécularisation qui se traduit par des comportements individualistes et consuméristes qui brouillent les frontières entre les différentes tendances à l’œuvre dans le champ religieux. On peut, sans doute, repérer des militants néo-fondamentalistes « purs », mais une telle identification est problématique pour un fidèle de base dont les orientations résultent plutôt d’un jeu d’influences croisées entre les traditions familiales, les prédicateurs rencontrés... et son itinéraire propre au sein de la société française.

Il serait nécessaire, enfin, pour nourrir cette confiance dans l’islam, de retrouver, comme nous y invite Habib Moussalli, une profondeur historique, de reprendre la longue relation de l’islam et de la modernité. Interroger les ressources du langage et de l’histoire pour définir leur rapport sous une autre forme que celle d’une simple extériorité. Que connaissons-nous des travaux de chercheurs arabes qui œuvrent dans cette direction mais pâtissent, en Europe, d’une audience médiatique et d’un intérêt académique moindres ?

La confiance (et le rappel des conditions qu’elle suppose) doit aussi s’exercer envers la République. Elle implique de démasquer la fiction d’une intégration de l’islam à la laïcité, perçue comme un système stable et homogène. La confiance vise la souplesse et la capacité d’invention de la République qui, pour être vivante, se doit d’être un horizon au moins autant qu’un ensemble de valeurs et de régulations 8.

Il fut un temps où la République était vécue comme nécessairement « sociale » pour être fidèle à elle-même. Le néo-fondamentalisme se nourrit des échecs de l’intégration. Celle-ci ne se cantonne pas à une reconnaissance symbolique : elle se réalise tout autant à travers la lutte contre le chômage dans les banlieues françaises et contre l’inégalité des chances à l’école. Par ailleurs, il n’est pas anodin que le processus pour faire asseoir l’islam « à la table de la République » ait voisiné un moment dans les médias avec les débats sur l’usage de la torture pendant la guerre d’Algérie. Par-delà ce moment, seul un travail de vérité historique permettra aux jeunes issus de l’immigration d’accéder à une identité réconciliée. De même, à titre d’exemple, pourrait-on reprendre les débats autour de l’enseignement de l’arabe à l’école française : elle privilégie aujourd’hui de manière sans doute dommageable l’arabe littéraire sur l’arabe « dialectal », la langue des parents, qui est de nouveau marginalisée.

Espérons, enfin, que la France sortira d’une vision obsidionale de l’Europe, pour retrouver sa dimension méditerranéenne : elle pourrait lutter avec les autres riverains pour une plus grande justice entre nations, et renouer avec une altérité qui lui est aussi intérieure.



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1 / Ndlr (15 mai) – Depuis la rédaction de cet article, les élections ont été reportées au 23 juin. Cette nouvelle échéance est déjà contestée, notamment par la Mosquée de Paris. Par ailleurs, les résultats du premier tour de l’élection présidentielle soulignent à la fois la précarité et la nécessité du processus.

2 / Parmi les mosquées figuraient celles d’Evry, de Mantes-la-Jolie, de Lyon, de Marseille et de Saint-Denis de la Réunion. La Grande Mosquée de Paris était classée parmi les fédérations, de même que l’Uoif (Union des organisations islamiques de France), la FNMF (Fédération nationale des musulmans de France) et le mouvement Foi et Pratique (Tabligh). La Ffaiaca (Fédération française des associations islamiques d’Afrique, des Comores et des Antilles) a rejoint la consultation en mai 2000 et la Ditib (islam turc) a fait connaître publiquement son soutien en juin 2001. Six personnalités qualifiées devaient symboliser les écoles de pensée ou de recherche absentes des autres instances. Pour plus de précision sur ces différents acteurs, voir Alain Boyer, L’islam en France, Puf, 1998.

3 / Allocution de Jean-Pierre Chevènement, le 28 janvier 2000, lors de l’installation de la Consultation, publiée dans al-Istichara, journal de la consultation des musulmans de France, n° 1, mars 2000, p. 5.

4 / Alain Boyer signale, dans L’islam en France, qu’il existe plus d’un millier d’associations musulmanes déclarées selon la loi de 1901 et seulement quelques dizaines d’associations cultuelles islamiques établies selon la loi de 1905. Jocelyne Cesari qui relève cette distorsion (Etre musulman en France, Karthala et Iremam, Paris-Aix, 1994, p. 151) note que « la majorité des lieux de culte existants aujourd’hui (à l’exception de la Mosquée de Paris) [est] constituée sous le régime de la loi de 1901 ». Elle ajoute que « c’est d’ailleurs en partie pour faire émerger de cette situation d’illégalité des activités islamiques que [Pierre Joxe], ministre de l’Intérieur, s’est engagé dans la création d’un Conseil de réflexion sur l’islam ».

5 / Franck Fregosi, chercheur au Cnrs, dans Libération, le 31 octobre 2001.

6 / Olivier Roy, « Le néo-fondamentalisme islamique ou l’imaginaire de l’oummah », Esprit, avril 1996, pp. 80-107.

7 / Cf. Hanifa Cherifi, « Jeunes filles voilées. Des médiatrices au service de l’intégration », Se comprendre, février 2000.

8 / C’est à cet exercice que s’était essayé Projet dans son dossier sur « les religions dans la cité » (n° 267, automne 2001).


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