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En dépit des apparences, déclarait un dirigeant socialiste, le dernier congrès du PS à Dijon fut historique : il a substitué à la volonté d’une rupture une détermination pour la réforme. Le « réformisme de gauche » mettait fin, selon cette interprétation majoritaire dans le PS, aux atermoiements idéologiques, aux fidélités embarrassées et aux tergiversations face aux rigidités de la société française. La gauche socialiste assumait enfin ce qu’elle était, le disait, et semblait même s’en réjouir. Cette décision a été préparée, puis relayée par un débat théorique, passé assez largement inaperçu, mais sur lequel il convient de revenir : celui suscité par la réhabilitation ou la promotion du socialisme libéral.
Certains auteurs, parmi lesquels en particulier Monique Canto-Sperber, ont voulu rappeler cette tradition du socialisme européen pour mieux légitimer leur démarche. « Les idées libérales sont l’avenir du socialisme ». Encore faut-il s’attacher à démontrer leur compatibilité et même, comme le fait Cécile Renouard, comment « les idées sociales sont l’avenir du libéralisme ». Mais d’autres, nous rappelle Pierre-André Imbert, ont souligné le risque d’une posture qui, ignorant volontairement les apports du marxisme, « hypertrophie la culture gestionnaire et glisse insensiblement de la régulation du système à la régulation dans le système ». L’absence de volonté de rupture aboutirait à une « naturalisation du monde tel qu’il est » et à rendre impossible toute critique sociale.