Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
La France avance tête baissée vers une forme d’anorexie budgétaire présentée comme inéluctable par les présidentiables. L’État renonce à servir d’amortisseur en période de crise. Aux tensions sociales s’ajouteront privatisations et coupes sombres dans la dépense publique. Désillusionnés, 55 % des Français ne croient pas que l’action politique ait une prise réelle sur le chômage (sondage CSA, 9-10 janvier 2012). La période qui s’ouvre requiert des responsables politiques déterminés, capables de faire plier les lobbies et les corporatismes devant l’intérêt général, de faire évoluer les traités européens au besoin. Des personnalités irréprochables, aussi. Or le soupçon pèse sur plusieurs candidats.
Dominique de Villepin est mis en cause dans l’affaire Relais et châteaux (surfacturations). Il n’a finalement pas attaqué en diffamation Robert Bourgi, qui l’avait accusé d’être un récepteur de mallettes africaines pour Jacques Chirac.
Soupçonné dans l’affaire Karachi et dans l’affaire Bettencourt, Nicolas Sarkozy aurait aussi bénéficié, en 2007, des largesses d’Omar Bongo, à en croire son ancien directeur de cabinet, Mike Jocktane. Le grief est lourd quand on sait qu’il a effacé – contre l’avis de Bercy – 20 % de la dette de Libreville, avant d’évincer un ministre, Jean-Marie Bockel, à la demande de son ami gabonais.
La justice doit faire son travail. Mais cette accumulation d’accusations porte un coup à la crédibilité de l’action politique. Si quelques magistrats valeureux continuent de se penser en contre-pouvoir, le silence entourant certaines de ces révélations demeure assourdissant. L’intégrité du personnel politique ne semble pas devoir s’imposer comme un thème de campagne. L’évacuer, c’est pourtant faire le lit des populismes. Le parti socialiste est-il à ce point enlisé dans ses affaires internes, dans les Bouches-du-Rhône et le Pas-de-Calais? Les électeurs sont-ils à ce point résignés qu’ils n’en fassent pas un critère pour leurs choix? À défaut d’être omnipotent, puisse l’État être juste.
Ce qui lui reste d’autorité en dépend.