Une revue bimestrielle, exigeante et accessible, au croisement entre le monde de la recherche et les associations de terrain.
L'an dernier à la même date, Projet publiait un dossier sur la possibilité pour la société française de se réformer : la volonté politique, les blocages, les orientations à suivre. Un an plus tard, la volonté de réformer est bien là ! Mais la présidentialisation affichée de toutes les actions entreprises est-elle la meilleure voie pour y parvenir ?
Pour l’université, la réforme a été votée dès juillet, ouvrant la voie d'une autonomie avec laquelle les établissements vont devoir se débrouiller. La question en débat de ce numéro revient sur ses enjeux. N'insistons pas à propos de la nouvelle loi sur l’immigration, lestée de l’amendement Mariani sur la possibilité de procéder à des tests Adn malgré l’opposition de tous ceux qui ont tenté de faire entendre les arguments de l'éthique ou de la simple raison… Pour actualiser la carte judiciaire, la garde des Sceaux est en train de tenter d’imposer partout en France des fermetures de tribunaux, quand il faudrait favoriser la justice de proximité.
Plus bruyante sinon plus problématique, la réforme des régimes spéciaux de retraite s'est partagée le devant de la scène avec une actualité moins politique. Réforme annoncée depuis des années pour contribuer à assurer l’avenir de tous, réforme équitable dans l’opinion des salariés « ordinaires », elle se heurte encore à l’absence de dialogue social véritable : prendre le temps de parler pour négocier, avec des syndicats considérés vraiment comme des interlocuteurs responsables, et sans charger les agendas de manière telle que leur mission soit impossible à remplir. Aujourd’hui encore, le risque existe d’un blocage dangereux.
Devant cette situation, on a parfois envie de dire que la mise en scène spectaculaire prend le pas sur le contenu. L’effet d’annonce, sinon de « tape-à-l’œil », va-t-il atteindre un domaine où l’action politique paraissait jusqu’ici moins bruyante, celui de la lutte contre la pauvreté ? Le 17 octobre, 20e journée mondiale du refus de la misère, le Président de la République a annoncé devant le Conseil économique et social la tenue d’un « Grenelle de l’insertion » ! Pourtant, Martin Hirsch, le Haut-commissaire aux solidarités actives, se donne, lui, des objectifs : le temps de réflexion durera jusqu’au printemps. Les mesures déjà proposées, comme le revenu de solidarité active, sont expérimentées sur des terrains limités. La lutte contre la pauvreté n’est plus dictée par l’urgence mais par la volonté. Sera-t-elle pour autant efficace ?
22 octobre 2007