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Les places et les chances

François Dubet Seuil, 2010, 120 p., 11,50 €

Face à la nouvelle hégémonie d’un projet, celui de l’égalité des chances, François Dubet se propose d’évaluer les deux modèles de justice sociale : égalité des places (par la sécurité des places, la redistribution fiscale et la protection sociale) et égalité des chances (par le mérite et, au besoin, la discrimination positive). Au modèle des chances, porté traditionnellement par la droite, François Dubet adresse plusieurs critiques : partout où il s’est installé, les inégalités sociales ont augmenté et l’ascenseur social est en panne. En effet le « mérite » est un outil utilisé pour monter dans une hiérarchie sociale auquel on n’assigne aucun plafond. Et les perdants n’ont qu’à s’en prendre à eux-mêmes. En organisant la guerre de tous contre tous, ce modèle mine le lien social. Aussi François Dubet le rejette-t-il au nom de l’efficacité comme de la justice et de la morale. Mais le modèle des places, incarné par la gauche, n’est pas épargné : derrière une apparence d’égalitarisme, ce système est très profondément conservateur. Il assigne de fait les citoyens à résidence et développe le tribalisme social. Si Dubet choisit néanmoins ce modèle moins inégalitaire et moins violent, c’est à condition qu’il se réforme en tenant compte du positif et des aspirations du modèle des chances : abolition des « privilèges », valorisation du mérite, désir d’autonomie. On aurait aimé que l’auteur développe l’allusion faite à la sécurité des parcours – compromis heureux entre la statique des places et la dynamique des chances. Il n’empêche, le plaidoyer est fondé et convaincant. Reste néanmoins un manque dans cet essai : la mondialisation. Son poids dans l’actuelle promotion du modèle des chances n’est-il pas déterminant ?

Jean-Pierre Rosa
1er juillet 2010
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