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Vé-lobbying Contre-pouvoirs

Considérés comme des gestes barrières à part entière, les trajets à vélo se multiplient depuis la fin du premier confinement. Occasion de redoubler d’efforts pour favoriser cette dynamique, sous-tendue par le travail de fond d’associations militantes depuis plusieurs années. À bicyclette !


« On peut avoir cent cinquante ans et répondre à des besoins […] très puissants, très actuels, aussi bien sur le plan individuel que collectif. » Le 14 septembre 2018, Édouard Philippe révélait les grandes lignes du « plan vélo » du gouvernement, à Angers. De quoi régaler les cyclistes du quotidien qui militent pour que le vélo devienne une solution de mobilité privilégiée, dans une société phagocytée par l’automobile. Quarante ans de mobilisation qui semblent enfin payer : les trois dernières années ont vu des avancées considérables au niveau national. Détachant le vélo de son image soit sportive, soit hippie, tout un travail souterrain a fait évoluer les mentalités.

Fin 2016, la Fédération des usagers de la bicyclette (Fub) et les 300 associations membres préparent les élections présidentielles et législatives : qui, parmi les présidentiables, s’engagerait pour le vélo ? Soutenu par ses partenaires, des ateliers participatifs, des collectivités, des organisations professionnelles, la Fub propose dix mesures à l’État : financement, apprentissage de la mobilité à vélo, lutte contre le vol, fiscalité, tourisme… Une équipe resserrée mais très impliquée démarche les candidats à la présidence. Et le résultat est là : l’immense majorité d’entre eux, dont Emmanuel Macron, s’engage sur ces dix mesures. Grâce aux associations membres de la Fub, réparties sur tout le territoire, l’opération est aussi une réussite pour les législatives : près de 500 candidats de tous bords s’expriment sur le vélo. Du jamais vu pour un tel sujet.

Dans la foulée de l’élection sont lancées les Assises de la mobilité. Le président Macron promet alors une loi sur les transports. Forte de son expérience, la Fub est représentée dans différents groupes de travail par son président, Olivier Schneider. Le vélo est enfin pris avec sérieux, à côté des « poids lourds » du secteur. L’enquête lancée en 2017 par la Fub, le « baromètre des villes cyclables », récolte 110 000 réponses pour sa première édition, au moins deux fois plus que pronostiqué. Ainsi que le reconnaît Élisabeth Borne, à l’époque secrétaire d’État, lors de la clôture des Assises : « Il y a une aspiration de nos concitoyens à un changement culturel sur ce sujet. […] C’est un des sujets qui a été le plus abordé dans les réunions publiques. »

Étions-nous conscients que c’était le début d’un marathon ? Le gouvernement annonçait une loi pour mars 2018. Dans cette optique, la Fub a multiplié les rendez-vous avec les parlementaires, en circonscription ou à Paris, et avec les cabinets ministériels. Mesurant bien le risque que les engagements ne soient pas tenus pour des raisons budgétaires, la Fub a fait imprimer des milliers de cartes postales que les militants locaux ont massivement envoyées aux parlementaires, aux ministres, au Président. Mais, de nouvelles priorités en scandales politiques, la loi d’orientation des mobilités (Lom) a été repoussée mois après mois, jusqu’en mars 2019.

La Fub a engagé un travail de lobbying : analyse du projet de texte, rédaction de propositions d’amendements, alerte des parlementaires, propositions de solutions.

Pour autant, le terrain bien labouré des ministères et du Parlement donnait déjà son fruit : dès septembre 2018, le Premier ministre annonçait un « plan vélo » national, s’engageant à mettre en œuvre de nombreuses mesures demandées par la Fub. Pour que le projet de loi concrétise ces annonces, la Fub a engagé un travail de lobbying : analyse du projet de texte, rédaction de propositions d’amendements, alerte des parlementaires, propositions de solutions. Pour ce volet technique, l’aide d’une avocate spécialisée s’est avérée fort utile. Mais ce sont à nouveau certains appuis locaux qui ont facilité l’intervention des parlementaires en faveur des mesures défendues. Il est difficile de mesurer exactement l’impact de la mobilisation citoyenne sur le résultat globalement positif de la Lom, mais on ne peut que constater que le vélo a fait l’objet de beaucoup d’attention dans un texte bien plus large.

Une fois la loi promulguée, en décembre, la Fub pensait pouvoir souffler et se concentrer sur la publication des décrets d’applications. Mais c’était sans compter la pandémie de la Covid-19. D’un côté, la communication ambiguë du gouvernement à propos de l’usage du vélo en période de confinement conduisait la Fub à montrer les dents : le dépôt d’un référé-liberté en Conseil d’État exigeant l’autorisation de « l’utilisation du vélo pour tous les motifs de déplacement » sera finalement une victoire pour la Fub. En parallèle, forte des bonnes relations tissées avec la désormais ministre Élisabeth Borne, la fédération est parvenue à se positionner comme partenaire du gouvernement. Grâce à un programme engagé depuis plusieurs années par l’association, la ministre a pu annoncer, le jour même de l’ordonnance du Conseil d’État, la mise en place d’un « coup de pouce vélo », avec notamment le financement pour les particuliers d’opérations de réparation de leur vélo à hauteur de 50 €. Localement, les associations ont également obtenu des aménagements cyclables transitoires, surnommés « coronapistes », dans des délais records. Grâce à leur expertise citoyenne et leur plaidoyer exigeant, la transition cyclable à fait un bond immense : plus de 450 kilomètres d’aménagement ! Comme quoi, il est possible de tenir les deux bouts d’un plaidoyer efficace : dénoncer et accompagner.

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