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Itinéraire : Jacques Dermagne


Incarnant une tradition sociale au sein du patronat, Jacques Dermagne s’est fixé comme objectif de redonner un poids nouveau au Conseil économique et social.

Incarnant une tradition sociale au sein du patronat, Jacques Dermagne s’est fixé comme objectif de redonner un poids nouveau au Conseil économique et social.

Projet - Avant d’exercer des responsabilités interprofessionnelles, et avant d’être Président du Conseil économique et social, vous avez été chef d’entreprise. Entreprendre, c’est une valeur tantôt à la mode, tantôt dépréciée... Mais comment accepte-t-on d’exercer cette responsabilité : par héritage, par choix?

Jacques Dermagne - Inutile de vous raconter ma vie, je voudrais simplement vous faire remarquer que les hommes passionnés par l’action collective et la compréhension des autres, et qui prennent des responsabilités, sont souvent les mêmes : ils ont appartenu à un mouvement de jeunes, aux scouts par exemple ; on les retrouve à la Joc ou au Cjd, dans un syndicat, une association... Il y a un itinéraire naturel : si l’on relevait dans la liste des membres du Conseil économique et social ceux qui se sont engagés dès l’adolescence, je suis sûr que le pourcentage en serait très majoritaire. Pour ma part, j’ai été fortement marqué, en effet, par cet engagement dans une démarche collective dès l’enfance. Marié très jeune, j’ai été obligé de subvenir à mes besoins. Il n’était pas question dans ma famille d’être à la fois marié et dépendant. Je suis donc entré dans la vie professionnelle cinq ans avant d’avoir achevé mes études de droit. Au retour du service militaire – j’ai touché mes barrettes le jour des accords d’Evian – j’avais déjà une bonne expérience professionnelle, si bien que je suis devenu directeur de l’entreprise familiale à 28 ans. Ma formation me poussait plutôt vers le journalisme et ma vocation vers la mise en scène ! Je suis devenu « patron » parce qu’il fallait bien gagner sa vie... et j’ai fait le nécessaire pour que le métier de chef d’entreprise soit pour moi le plus passionnant des métiers. J’ai donc été dirigeant d’une Pme de 28 à 60 ans, c’est-à-dire jusqu’à mon élection à la présidence du Conseil économique et social : en prenant ce poste, j’ai abandonné tous mes mandats patronaux et mes responsabilités dans le management d’entreprise. La société familiale regroupe plusieurs filiales, dont Tapis et Moquettes de France est la plus connue mais non la plus importante ; il y avait trois entreprises de finition du bâtiment et deux entreprises de décoration intérieure.

Militant, de la Pme...

Projet - Comment avez-vous vécu cette responsabilité, le développement d’une entreprise, les difficultés qu’elle a pu traverser?

Jacques Dermagne - J’ai vécu ma carrière de chef d’entreprise avec un réel bonheur : c’est sans doute la plus passionnante des fonctions que l’on puisse exercer, du moins dans une entreprise à taille humaine. Travailler, c’est une façon de vivre, et lorsqu’on a la chance de pouvoir faire travailler des hommes et des femmes et d’honorer le travail, c’est une véritable joie. Etre chef d’entreprise, c’est exercer un pouvoir sur un potentiel de progrès non seulement pour le capital investi, mais aussi pour les hommes et les femmes qui travaillent.

Je dois dire qu’avec l’âpreté des marchés, de plus en plus vive au fur et à mesure des trois décennies, la capacité de progrès social étant de plus en plus contrainte par la pression de la concurrence, l’obligation de garder les yeux fixés sur la dernière ligne du compte d’exploitation m’a coûté de plus en plus. La tâche est plus difficile quand les décisions à prendre ne correspondent plus à un idéal social. Cela a entraîné, pour le chef d’entreprise que j’étais, une pénibilité affective dans ma mission. J’ai eu à gérer des situations parfois dures et tendues. J’en ai tiré, personnellement, des enseignements qui laissent des traces.

En réalité, depuis une vingtaine d’années, le développement des très grandes entreprises, la course à l’effet de taille, a obligé les petites à minimiser la dimension sociale. Pour un responsable, c’est une vraie question.

Projet - Pendant dix-huit ans, vous avez milité dans l’interprofessionnel. Une structure qui regroupe des petits et des gros ! Comment peuvent-ils cohabiter et agir ensemble?

Jacques Dermagne - J’ai présidé ma profession à 29 ans. J’ai présidé le commerce à 41 ans et cela a duré vingt ans. Réunir, comme vous le dites, des petits et des gros, était passionnant. C’est un vrai défi de faire s’écouter et se respecter des hommes aussi différents que le président des marchands de chapeaux et celui des grands groupes de distribution. D’avoir ainsi évité la « guerre » entre les gros et les petits (sauf sur certains points comme l’urbanisme commercial) a été pour moi une aventure véritablement exaltante.

Quand je me suis retrouvé à la présidence du Conseil national du commerce, l’équivalent pour le commerce de l’Uimm pour la métallurgie, les grands magasins ne voulaient pas entendre parler des hypermarchés. Il a fallu là aussi faire cohabiter les anciennes formes et les nouvelles... Si j’avais continué à le présider, j’aurais veillé à ce que les assises de la distribution organisées voilà quelques mois se déroulent tout autrement et surtout qu’elles soient une initiative des parties prenantes elles-mêmes plutôt que du Gouvernement.

Projet - Comment jugez-vous les évolutions récentes : entre les producteurs, les consommateurs et le commerce?

Jacques Dermagne - Il s’agit bien sûr d’un rapport de forces, amplifié par un immense déficit de dialogue. Si vous mettez face à face le vendeur d’un groupe de production et l’acheteur d’un groupe de distribution, chacun a son idée en tête : vendre le plus cher possible, ou acheter le moins cher possible. C’est un rapport conflictuel dans sa structure même. Pour réguler de telles relations, pour éviter qu’il ne reste que des rapports de force secs, il faut savoir élaborer des chartes de déontologie et des codes de bonne conduite. On y est parvenu, ces dernières années, sous la menace de l’irruption d’entreprises étrangères. On a pu ainsi mettre en place un système de négociations collectives sur le plan économique comme il en existe dans le domaine social. Mais lorsque le cadre dans lequel doivent s’exercer ces affrontements perd sa charpente, la mise en œuvre d’une nouvelle déontologie est nécessaire.

Cette recherche d’un système de négociation devient plus complexe, car si la concurrence, avec ses affrontements très rudes, a permis de donner 20 % de pouvoir d’achat en plus aux consommateurs français, les entreprises en même temps sont obligées de se restructurer en permanence pour créer des marges nouvelles de productivité. Le progrès sacrifie enfin 10 à 20 % de Français qui se retrouvent exclus. Nous vivons à la fois une accélération et une amplification des affrontements et de la complexité.

... au Cnpf, pour le dialogue social

Projet - Vous êtes devenu, ensuite, vice-président du Cnpf...

Jacques Dermagne - Je présidais le commerce de la décoration ; à ce titre, j’ai été élu en 1980 à la présidence du Conseil national du commerce. Et les présidents des grandes branches de l’économie française sont automatiquement vice-présidents du Cnpf. Au départ de François Ceyrac – un homme de recherche et de haute qualité pour lequel j’ai une profonde admiration –, Yvon Gattaz m’a demandé d’être son Vice-Président-administrateur, ce que j’ai fait jusqu’en 1986. Après l’épisode de la lutte fratricide entre Yvon Gattaz et Yvon Chotard (dont je me considère un peu comme le fils spirituel), François Périgot a été élu à la tête du Cnpf. J’ai conservé ma fonction de vice-Président, mais sans rôle opérationnel. Enfin, quand Jean Gandois est arrivé à la tête de l’organisation patronale, il m’a proposé de prendre la responsabilité de la commission sociale. Si j’ai refusé, c’est d’abord parce que je m’inquiétais d’un glissement préoccupant dans le monde patronal, une sorte de grand écart entre l’hyper-libéralisme d’un côté et un certain poujadisme de l’autre, et je doutais des possibilités de mettre en œuvre une vraie politique sociale. La deuxième raison était que Jean Gandois avait repris au Cjd la notion « d’entreprise citoyenne » et je préférais m’investir sur ce thème. Il était d’ailleurs extraordinaire que Jean Gandois ait été élu sur ce slogan.

J’ai modifié la formule en « citoyenneté de l’entreprise », ce concept me paraissant plus concret et plus dynamique qu’un simple qualificatif.

Projet - Que mettez-vous derrière cette expression, qui reste très critiquée, pas seulement par les patrons?

Jacques Dermagne - En effet, il n’était guère à la mode de revendiquer une telle formule, contestée aussi bien par des « réalistes » de droite que par les intellectuels de gauche... Elle était perçue comme une utopie, au moment même où l’âpreté de l’environnement économique pouvait nous interdire de nous y référer. L’enjeu pourtant, pour celui qui veut vraiment défendre l’économie marchande, est de réveiller les hommes et de devenir militant de la création d’activité. Il ne sert à rien de ne surveiller que la dernière ligne de son compte d’exploitation si l’on ignore les difficultés des autres qui sont autour. Il faut apporter à la cité ce qu’on peut quand la réussite est là. « Si vous vous mobilisez pour la cité, en développant l’activité, vous équilibrerez le droit que vous vous reconnaissez de mettre les effectifs en harmonie avec la production. Si l’on veut pérenniser l’existence d’une économie de liberté, vous ne pouvez plus négliger cet aspect de votre activité, sauf à condamner vous-mêmes l’économie marchande ! » Dans les nombreuses réunions que j’ai tenues, j’ai rencontré un réel écho. Même aujourd’hui, où ce raisonnement n’est plus à la mode, la dimension citoyenne demeure présente, même dans les discours du Président du Medef... Le sillon de la citoyenneté de l’entreprise est creusé profondément depuis la « nouvelle société » de Jacques Chaban-Delmas.

Certes, la crise d’octobre 97 a entraîné une rupture entre le Medef et le Gouvernement, elle a réveillé des méfiances, entraînant de la part de certains patrons et de certains idéologues des postures de dénonciation. Pourtant, les entreprises n’ignorent pas le social : des initiatives comme la « Fondation de la 2e chance » et d’autres mouvements d’engagement sociétal d’entreprises se multiplient. On a toujours tort d’avoir raison trop tôt, mais il y a bien une dynamique qui a été engagée. Et les chefs d’entreprise n’ont pas le droit de se dire incompris s’ils ne vont pas à la rencontre des autres acteurs de la vie de la Cité, les élus, les enseignants, les magistrats, etc. Contrairement aux apparences et aux effets de mode, la citoyenneté de l’entreprise est quelque chose d’ancré. Et ne me dites pas que ce n’est qu’une question d’image, une façade pour quelques grandes entreprises : j’accepte les effets de façade et d’images dès lors que cela correspond à une réalité effective, montre la voie à d’autres et peut ainsi être bénéfique à la cité.

Projet - Au-delà des images, une autre forme de responsabilité et de partenariat se traduit par une implication dans le développement local...

Jacques Dermagne - Je suis bien d’accord, mais c’est comme un escalier, cela se monte marche par marche. Quand je vois plusieurs fondations de la 2e chance se mobiliser autour d’une entreprise pour aider des jeunes qui n’ont pas fait d’études, cela me rassure. Une dynamique qui implique les salariés sur un tel objectif structure et conforte l’esprit d’entreprise !

Projet - L’expérience que vous avez menée avec François Ceyrac et Yvon Chotard, fondée sur le dialogue social et sur le paritarisme, n’est-elle pas remise en cause aujourd’hui?

Jacques Dermagne - Oui, et sans doute, là encore, je ne suis pas tout à fait à la mode. Pourtant, n’est-il pas important de négocier par branches, voire à l’échelon interprofessionnel, et pas seulement à celui de l’entreprise ? Comment faire pour que ne soient pas exclus des bénéfices de la négociation collective les salariés des très petites entreprises ? Il est des domaines pour lesquels il n’est pas question de négocier au niveau de l’entreprise, par exemple l’Unedic ou les retraites. En revanche, l’application des 35 heures est un problème qui demande d’être modulé en fonction de l’entreprise concernée, à condition d’avoir des structures syndicales capables de raisonner en face du patronat. Mais il faut favoriser le plus possible la négociation collective, qui éloigne le danger de l’égoïsme et demeure un facteur de progrès social. Quand les gens sont mécontents et que n’existe aucune structure collective intermédiaire, le risque est de laisser le champ libre à toutes les récupérations irresponsables, toutes les démagogies... et toutes les aventures.

Projet - Pensez-vous que le paritarisme va retrouver les beaux jours qu’il a connus du temps où la commission sociale du Cnpf jouait un rôle important?

Jacques Dermagne - Pour s’accorder une chance de le retrouver et éviter des fractures stériles et dramatiques pour la société, il est temps de donner du corps, du sens, de la crédibilité et aussi de la notoriété à tout ce qui rassemble et représente la société civile, en particulier à des organismes comme le Conseil économique et social à l’échelon national et les conseils économiques et sociaux des régions.

Projet - Quel jugement portez-vous sur la « refondation » de la négociation sociale que le Président du Medef veut mettre en route?

Jacques Dermagne - Ici, nous voulons être la maison du dialogue social ! Et c’est ici qu’a eu lieu début février le premier sommet des partenaires sociaux. C’est vrai que les affrontements actuels sont très sérieux. Sur le principe lui-même, je juge favorablement cette refondation : elle laisse supposer qu’on est prêt pour un dialogue où sont remis à plat tous les dysfonctionnements. La façon de faire est essentielle : on ne réussira que si l’on sait mettre du respect mutuel dans les formes.

Projet - N’est-ce pas une procédure qui vise à mettre de côté le troisième partenaire, les pouvoirs publics?

Jacques Dermagne - Je ne le crois pas, si je me réfère à mon expérience de vingt ans de présidence du Conseil national du commerce. Je n’ai jamais vu un ministre – quelle que soit sa tendance – récuser un projet sur lequel les partenaires sociaux se sont mis d’accord. En matière de refondation sociale, le « troisième partenaire » ne vient qu’après : il s’agit sans doute de redéfinir ou de repositionner le rôle de l’Etat. Mais c’est d’abord aux partenaires sociaux de s’entendre entre eux. Le moment venu, l’Etat sera le garant.

Projet - Les relations entre partenaires sociaux ne sont-elles pas plus difficiles en France que dans d’autres pays, comme l’Allemagne, par exemple?

Jacques Dermagne - Je l’ai longtemps pensé, mais je ne suis pas sûr que cette idée corresponde à la réalité. En France, nous nous flagellons souvent en public. Mais, sur le fond, les conflits sont de même nature qu’en Allemagne et dans les pays d’Europe du Nord, même si la forme est différente. Les défis de la globalisation sont les mêmes pour tous.

... puis au Conseil économique et social

Projet - Venons-en au Conseil économique et social : il élabore des rapports, il émet des avis. Mais quelle est son importance réelle ? Comment peut-il peser sur les politiques sociales et sur l’évolution de la société civile?

Jacques Dermagne - Avant de répondre précisément à la question, je voudrais rappeler quelques préalables. Quand on parle des rapports du Ces, il faut bien voir que cela n’a rien à voir avec le texte demandé à une personnalité, fût-elle lauréat d’un prix Nobel ou autre... Les rapports du Ces sont le fruit d’un travail d’équipe poursuivi pendant plusieurs mois, ils sont une œuvre collective issue d’un débat entre les partenaires. Le texte final est soumis au vote de ceux qui y ont travaillé, avant d’être l’objet d’un scrutin en séance plénière. Les rapports ne sont jamais contestés quant à leur qualité : les universitaires comme les hauts fonctionnaires, les chefs d’entreprise et les élus en reconnaissent la valeur. Pourquoi ne servent-ils pas davantage ? Sans doute, parce que cette maison a mis un certain temps à prendre conscience – jusqu’à ces derniers mois – qu’il ne servait à rien de rédiger les meilleurs rapports si on néglige de les faire passer dans l’opinion publique. Cela suppose un énorme effort de communication et de diffusion. Pour le Conseil, se moderniser, cela signifie aussi se médiatiser. Si l’on veut que la décision démocratique soit prise en connaissance de cause, les rapports du Ces peuvent être d’une très grande utilité pour le Gouvernement et pour les assemblées. Ils leur permettent de sortir du carcan d’une approche étroitement politique, électorale. Ils sont le témoignage de la société civile, la contribution des « experts de la quotidienneté ». Mais il faut, pour cela, que le Conseil n’hésite pas à intervenir sur des sujets plus « chauds », pour que ses avis soient plus immédiatement exploitables par le gouvernement ou les parlementaires. Le Gouvernement n’a l’obligation de nous consulter que sur le Plan et sur les lois de programmation. Mais nous devons nous auto-saisir avec plus d’audace ! Alors, le Gouvernement, s’il veut garder la maîtrise du questionnement, prendra-t-il l’habitude de nous en saisir à l’avance ? Jusqu’ici, l’auto-sélection des sujets a prévalu, mais la tendance était peut-être d’éviter ceux qui fâchent. Le Conseil a cultivé la consensualité jusqu’à risquer d’en mourir ! J’espère que ce temps est révolu : l’expérience du rapport Teulade sur les retraites vous le prouve, nous pouvons contribuer activement au débat public à condition que nos avis soient l’expression, au sein du Conseil, d’une majorité productive plutôt que d’un consensus « mou ».

Projet - Pouvez-vous nous rappeler des exemples où, depuis dix ans, le Conseil économique et social a pu influer dans la préparation d’une loi ou d’une décision?

Jacques Dermagne- Les exemples sont multiples... Sur les biotechnologies, sur la décision de fermer ou non le surrégénérateur de Creys-Malville... A propos de la loi sur l’exclusion, l’ampleur et la qualité des débats du Conseil ont été particulièrement importants, depuis le rapport du Père Wrésinski. De nombreux travaux sont en cours actuellement, car le Gouvernement mesure de plus en plus combien notre réflexion peut l’aider dans la négociation de certains dossiers. La décentralisation, l’environnement, la politique de l’eau, le harcèlement moral au travail... voilà quelques exemples. Sans abandonner notre état d’esprit solidaire et notre faculté d’écoute, il est important que nous parvenions à nous ouvrir davantage vers l’extérieur et sur l’actualité, à être plus réactif : j’ai grande confiance car c’est bien le sens de la réforme en cours de nos procédures internes.

Projet - Vous évoquez les Conseils économiques et sociaux des régions. Ont-ils un rôle différent du Conseil national?

Jacques Dermagne - La collaboration des Ces régionaux se fait plus directement avec les instances politiques locales et régionales, sur des problèmes souvent plus ponctuels. Les fonctions de ceux qui y sont élus sont donc un peu différentes des nôtres. Mais ces hommes et ces femmes sont les mêmes représentants de la société civile que les membres du Ces de la République et leur démarche est de même nature et de même importance.

Ainsi, le 29 mars dernier le Ces a-t-il décidé d’adjoindre à son avis sur les causes et conséquences du naufrage du pétrolier Erika, la déclaration sur le même sujet des cinq Conseils économiques et sociaux de la côte atlantique. Pour donner toute sa place à l’expression de la société civile organisée, nous devons dynamiser un partenariat avec les Conseils économiques et sociaux régionaux et bien entendu, avec l’association des Conseils économiques et sociaux régionaux de France. Lorsque l’expression de la société civile organisée passera non seulement par les 231 conseillers économiques et sociaux de la République, mais aussi par les 1 860 conseillers de toutes les régions, et que chacun acceptera de se faire l’écho des préoccupations des autres, sans interférer sur les rôles respectifs, on obtiendra un effet amplificateur formidable de prise de parole des forces vives de la Nation. Car ce qui s’écrit dans La Voix du Nord ou dans Le Midi libre est pour la population tout aussi important que ce qui se dit dans Le Monde, le Figaro ou Libération. La volonté de coopération existe, il restait à créer un climat ; de part et d’autre, nous y travaillons avec ardeur. Je vous rappelle aussi qu’il existe des Conseils économiques et sociaux dans d’autres pays. Gabriel Ventejol avait posé les premières pierres et Jean Matteoli a su développer les coopérations. En 1989, on comptait dans le monde dix Conseils économiques et sociaux. Ils sont aujourd’hui 50, qui se sont regroupés en association, et il s’en crée un nouveau par trimestre. Le secrétariat exécutif de l’association est assuré ici, par le conseiller diplomatique du Président du Conseil économique et social. Une des premières démarches d’un pays qui accède à la démocratie est de créer un Conseil économique et social. Notre rôle est essentiel car ils attendent un accompagnement actif pour acquérir le savoir-faire nécessaire. Par ce réseau, nous contribuons au progrès social et à la cohérence économique dans cinquante pays. Les Conseils économiques et sociaux de l’Union européenne ont créé leur propre association, et le Comité économique et social européen est naturellement pour nous un partenaire quotidien. Tout ce monde va se retrouver d’ici peu en réseau intranet... Le rôle de pivot que nous assumons pour un enrichissement mutuel, est captivant. L’avenir appartient aux Conseils économiques et sociaux tout simplement parce qu’ils contribuent à la qualité de la décision publique et par conséquent à la vigueur de la démocratie.

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