Ce livre, récemment traduit, déroute peut-être le lecteur français peu familier de l’activisme féministe et des débats anglo-saxons autour de la moralité et des droits des femmes. À ce titre déjà, l’étude réalisée par Joan Tronto est instructive : un parcours historique sur l’attachement des Lumières écossaises aux sentiments moraux, en contrepoint à l’universalisme kantien, l’amène à montrer comment le déclin de l’idée de vertu civique a cantonné la vertu à la sphère privée – la famille – et en a fait l’apanage des femmes. Faut-il alors défendre l’idée que la morale a un genre ? La théorie cognitive du développement moral de Kohlberg pas plus que sa critique par Gilligan, qui défend la voix morale particulière des femmes, ne satisfont Joan Tronto. Elle plaide pour le développement Tronto. dans l’espace Elle plaide public pour de l’éthique le développement du care, de la dans sollicitude l’espace public pour autrui. de l’éthique Le ^care du a, quatre de aspects – se soucier de, prendre en charge, prendre soin et recevoir le soin – et chacun appelle une dimension éthique : l’attention, la responsabilité, la compétence et la capacité de réponse. L’enjeu politique, pour l’auteur, est de s’opposer à la traditionnelle dévalorisation du care, maintenu dans la sphère privée, travail accompli par les esclaves, les domestiques ou les femmes.Le care doit faire l’objet d’une reconnaissance publique et exprimer le pouvoir des faibles, signe d’une condition humaine commune marquée à la fois par l’autonomie et l’interdépendance. Les derniers chapitres sont particulièrement suggestifs : J. Tronto, consciente des dangers du repli intimiste, se prononce pour l’articulation de la sollicitude et de la justice dans les relations privées comme dans les institutions publiques.