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Film - Tunisie : la tentation du Jihad

Nicolas Baudry d’Asson, Gwenlaouen Le Gouil, David Thomson et Hamdi Tlili France, 2013, 33 min

Les drapeaux noirs des djihadistes salafistes semblent se multiplier dans les rues de Tunis ; l’un d’eux fût même hissé au sommet du mât de l’ambassade des États-Unis en septembre dernier. Ils flotteraient sur les minarets de 500 des 5000 mosquées du pays. Pendant plusieurs mois, des reporters ont suivi la principale organisation, Ansar Al-Charia, fondée trois mois après la révolution de janvier 2011. Ils en dressent un portait relativement complet, s’attachant notamment à la figure de l’un de ses leaders. On peut regretter cependant qu’à aucun moment ne soit mentionnée la distinction entre « grand djihad », combat contre soi-même et ses passions, et « petit djihad », la guerre sainte.

La rupture consommée entre le gouvernement Ennahda et les djihadistes salafistes pourrait-elle conduire ces derniers à déclarer la Tunisie « terre de djihad » ? Les salafistes se veulent « neutres » politiquement, appelant simplement à « suivre Dieu ». Mais à leurs yeux, le gouvernement a trahi l’islam en n’inscrivant pas la charia dans la constitution. Ils le jugent surtout responsable de la mort de douze de leurs frères lors d’affrontements violents avec la police et l’armée (sous Ben Ali, aucun n’avait été tué), ainsi que de deux décès à la suite d’une grève de la faim en prison. Les tensions sont de plus en plus vives. En octobre 2012, à Douar Hicher, banlieue populaire de Tunis, des altercations entre salafistes et vendeurs d’alcool dégénèrent. Quand la police intervient, les salafistes se retranchent dans la mosquée du quartier. Après deux jours de combat, l’imam (25 ans) et le muezzin sont tués. Le soir même, dans l’émission la plus regardée du pays, le nouvel imam de Douar Hicher interpelle le chef du gouvernement, le traitant de mécréant et brandissant un drap blanc, il s’exclame : « Aujourd’hui, j’ai préparé mon linceul. »

Pour autant, l’action des salafistes se veut pacifique en Tunisie. La caméra suit ainsi l’organisation par l’État d’un convoi humanitaire dans des villages du nord-ouest du pays : une dizaine de véhicules apportent de la nourriture, des livres de prières et des vêtements. La caméra entre aussi dans une mosquée, où les prêches des imams salafistes sont très suivis ; ces derniers sont d’ailleurs consultés sur toutes sortes de questions personnelles. L’internationalisme accru des mouvements fondamentalistes musulmans est souligné. Le reportage s’ouvre sur une manifestation d’une cinquantaine de personnes devant l’ambassade française en janvier 2013, brûlant un drapeau tricolore pour protester contre l’intervention au Mali (pour Aqmi les membres d’Ansar Al-Charia sont des « frères »). Est retracé l’engagement de nombreux Tunisiens (2000 selon les estimations) en Syrie aux côtés du front Al-Nosra, après leur passage par des camps d’entraînement. Mourir dans ce contexte donne accès au rang de martyr.

Si le format du film ne permet pas de longs développements, il eût été appréciable d’insister sur la différence entre les groupes salafistes minoritaires, qui se livrent à un activisme armé, et le salafisme commun, « qui concerne la sphère privée, individuelle, avec une vision personnelle, non prosélyte de la religion ».

Pour voir le film

Samedi 11 mai 2013 à 18h35 sur Arte

Lundi 13 mai à 10h45 sur Arte

Et sur www.arte.tv/reportage

Jean Vettraino
2 mai 2013
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