La France invisible, ce sont les personnes mal ou pas du tout appréhendées par les médias, les statistiques et les discours politiques, ceux dont on ne parle pas, et qui souvent n’ont pas droit à la parole – du moins le croient-ils : ils ne demandent pas les prestations sociales ; ils vivent sur le souvenir d’une administration qui, naguère, les a rabroués ; ils ont du travail mais qui ne réussit pas à les faire vivre, une adresse alors qu’ils sont regardés comme sans domicile fixe ; ce sont aussi ces « mères au foyer » qui parfois sont simplement des chômeuses sans espoir. La rationalité administrative, sur laquelle comptait le solidarisme d’un autre siècle, n’en finit pas d’engendrer quelques incohérences désastreuses. Ainsi les chômeurs licenciés qui retrouvent un emploi « connaissent presque systématiquement une perte de revenu » (l’effet de seuil a encore frappé ! au grand dam des promoteurs de l’impôt négatif). Cet ouvrage décline par ordre alphabétique une longue litanie de ces groupes zombies : depuis les accidentés du travail jusqu’aux vieux pauvres en passant par les précaires du public – plus nombreux que ceux du privé – les surendettés, les stagiaires, les travailleurs de l’ombre, les drogués, … ad nauseum. Entrecroisant témoignages et analyses, cet ouvrage est à la fois une mine de renseignements et une sorte de kaléidoscope de populations d’autant plus « ignorées » qu’elles sont dépourvues de liens sociaux.