Riche entretien entre l’exégèse biblique et la clinique psychanalytique. La convergence est presque trop belle entre les deux auteurs bien que le psychanalyste se retienne, au «commencement », de nommer Dieu. Tout se déploie à partir de la « perte » que doit toujours accepter l’homme, ou ce renoncement à être tout, ce refus de partager qui mène Caïn au fratricide. Bientôt sont soulignées la dualité des sexes, l’altérité, l’importance du féminin, la dépendance de plus loin ou plus haut encore, car homme et femme sont tributaires de quelque chose qui les dépasse tous deux. L’altérité est jusqu’en moi-même, tout homme doit « se » quitter aussi, arrive-t-on à dire dans les dernières étapes de l’entretien. Est aussi abordé le domaine politique, soulignant le danger d’exagérer la méfiance à l’égard du chargé de la loi… qui pourrait en abuser : on prétend alors à une « gouvernance », plus que « gouvernement », « organisée seulement autour de critères dits scientifiques, d’où toute marque de subjectivité aura pu être évacuée ». L’individu ne voulant rien céder sur son indépendance, l’action collective ne devrait plus résulter que d’initiatives dispersées, toutes par définition également légitimes. Illusion des modernes. En dépit de la profondeur des problématiques, l’ouvrage est abordable, sa lecture donne une vraie joie.
13 juin 2008