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Croyances religieuses, morales et éthiques dans le processus de construction européenne

Commissariat général du Plan La Documentation française, 2002, 168 p., 9 €

Cet ouvrage rassemble les travaux de l’un des six séminaires de réflexion mené par le Commissariat général du Plan, avec l’institut universitaire de Florence et la Chaire Jean Monnet d’études européennes sur l’émergence d’une « société européenne ». Dans le cadre de la construction européenne, quelles contributions les croyances religieuses, morales et éthiques peuvent-elles apporter à la constitution d’une telle « société » ? Assiste-t-on à l’émergence de communautés de croyances transfrontalières, capables de dynamiser l’intégration européenne ? La réunion, inévitablement disparate, des contributions de l’ouvrage ne prétend pas dessiner une réponse claire mais elle offre à la fois une synthèse utile de données déjà bien reçues de la sociologie religieuse actuelle et une ouverture sur quelques points plus originaux. Si la dérégulation institutionnelle du religieux en Europe ne signifie pas, loin s’en faut, la fin des croyances, il faut aussi souligner l’imprégnation culturelle persistante par les religions des institutions et des mentalités européennes dans leur diversité. Cependant, d’après Danièle Hervieu-Léger, nous assistons à un véritable renouvellement des structures du symbolique qui marquerait une mutation du socle culturel d’une ampleur analogue à celle du xviiie siècle : avènement d’une société rassasiée, extension d’une culture démocratique hors du politique, révolution du rapport à la nature. Ce risque d’évidement religieux de la culture doit cependant être nuancé par l’émergence de nouvelles formes de mobilisation religieuse. Plusieurs contributions (Régine Azria, Chantal Saint-Blancat) analysent ainsi le phénomène diasporique qui par son mode de construction identitaire composite pourrait se révéler prometteur pour la construction européenne. Dans le même sens, plusieurs contributions soulignent le renouvellement des expressions du croire dans une religiosité pèlerine en affinité avec l’expérience européenne (Fabien Gaulué sur Taizé), dans le regain du tissu paroissial catholique (Olivier Bobineau), ou dans les tentatives de construction d’un islam européen (Moussa Khedimellah et Nicola Tietze). Enfin, sous divers angles, plusieurs chapitres indiquent les enjeux européens des relations entre les acteurs religieux et les instances politiques. Les relations Eglise/Etat diverses selon les nations (Bérangère Massignon), la constitution d’une mémoire religieuse plurielle (Wojtek Kalinowki), l’intégration de l’orthodoxie dans la culture européenne forment autant de défis qui peuvent aussi réveiller de vives tensions identitaires. Comme le rappelle Jean-Paul Willaime, « en participant à l’Europe en train de se faire, les acteurs religieux peuvent contribuer, tout en favorisant la nécessaire interconnaissance des hommes, à entretenir cette inépuisable tension entre le religieux et le politique qui est consubstantielle à la démocratie ».

Alain Thomasset
4 juin 2012
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