Église et économie. Voix orthodoxes russes. Voix catholiques romaines
Jean-Yves Calvez et Andrei Zoubov Cerf, 2006, 198 p. 22 €L’Église, qu’elle soit russe orthodoxe ou catholique romaine, reconnaît n’avoir aucune compétence spécifique en matière économique. Cependant les situations inhumaines l’interpellent également de part et d’autre de la frontière qui sépare ces deux religions. Les conditions institutionnelles et politiques de ces situations également. D’où une « doctrine sociale de l’Église catholique romaine » inaugurée par la lettre encyclique Rerum Novarum du pape Léon XIII, à laquelle font écho des textes, plus récents, issus du patriarcat orthodoxe de Moscou, notamment le grand document de l’an 2000 connu sous le nom de Osnovy sotsialnoj kontseptsii (les fondements de la vision sociale). Les chapitres, rédigés alternativement par un orthodoxe et un catholique, abordent successivement les fondements de la parole d’Église (Écriture et morale universelle), quelques grands problèmes transversaux (entreprise, propriété du capital, libéralisme) et enfin une synthèse visant les institutions justes. De par l’histoire contemporaine des sociétés où baignent ces Églises et de par leurs traditions spirituelles spécifiques, les accents divergent notablement : l’Église catholique insistant davantage que l’orthodoxe sur les institutions et moins sur la responsabilité des personnes. Cet échange n’en est manifestement qu’à ses débuts ; le défi le plus immédiat posé à ce dialogue interreligieux est, non pas d’abord d’aborder les problèmes plus essentiels (financiarisation, mondialisation, régulation internationale), mais bien de traduire dans leurs langages religieux respectifs les relations épistémologiquement délicates entre d’une part le monde économique qui n’est qu’une abstraction, et d’autre part le monde social où se mêlent le culturel, le politique et le sociologique.
6 juin 2012