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Pourquoi la pensée humaine est inégalable

Markus Gabriel Éditions Jean-Claude Lattès, 2019, 350 p., 21,5 €

Après Pourquoi le monde n’existe pas et Pourquoi je ne suis pas mon cerveau (parus en français en 2014 et 2016 chez le même éditeur), le philosophe allemand Markus Gabriel clôt sa trilogie avec Pourquoi la pensée humaine est inégalable. Il y expose une théorie de la pensée humaine et donc de l’être humain. Le titre original, plus sobre – Der Sinn des Denkens (Le sens de la pensée) –, traduit les deux thèses principales du livre : la première, la pensée est un sens, de même que notre ouïe ou notre sens de l’équilibre, non un mécanisme de traitement de l’information ; le deuxième, notre pensée a un sens. Elle n’est pas « une activité de calcul effectuée sous notre boîte crânienne par un cerveau-ordinateur ». Ainsi, nous sommes doués de conscience, nous rêvons, nous avons un inconscient et des problèmes moraux, politiques, etc. L’auteur développe et étoffe ces deux thèses avec son style si singulier, alliant clarté dans l’exposition et touffeur conceptuelle, profonde connaissance philosophique (de Platon à Gottlob Frege, de Kant à Giulio Tononi). Ses combats affichés sont portés dans l’arène philosophique (il est l’un des thuriféraires du « Nouveau réalisme ») ou politique (il défend un humanisme éclairé, en particulier contre les adeptes du post et du transhumanisme). Sa théorie de la pensée repose l’ensemble des bases philosophiques nécessaires, comme ce qu’est un concept, ce qu’est une catégorie, ou l’explication que la pensée procède à une réduction de la complexité sans fin de la réalité… Cette théorie contemporaine permet de se libérer des fantasmes en cours autour de l’intelligence artificielle (IA), ou plutôt de « l’intelligence artificielle artificielle » (thèse de l’IAA). Car Markus Gabriel explique bien que notre propre intelligence est aussi une IA, « alors que les systèmes que l’on appelle ainsi sont des artefacts qui représentent uniquement des modèles de notre propre intelligence ». De fait, « ce ne sont pas les artefacts qui nous attaquent, nous nous attaquons nous-mêmes » et notamment « en nous faisant une image fausse de ces artefacts ». Sans doute de quoi retrouver le sens des réalités !

Émilie Reclus
27 août 2019
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