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Technocritiques. Du refus des machines à la contestation des technosciences

François Jarrige La Découverte, 2016 [2014], 440 p., 13,50 €

Aller au-delà de l’histoire officielle, celle construite patiemment par les historiens de bonne volonté qui vous précèdent, est assurément une tâche difficile et risquée. Dans un monde 3.0 gouverné à coup de « Big Data » et d’internet des objets, faire l’histoire des hommes et des femmes qui ont participé à la critique des machines et des techniques peut paraître hasardeux, sinon dangereux. Et pourtant, c’est à cette tâche que François Jarrige, professeur d’histoire à l’Université de Bourgogne, se consacre dans Technocritiques. La publication en poche de l’ouvrage est l’occasion de le (re)découvrir. F. Jarrige y retrace les luttes menées depuis le début de l’ère industrielle jusqu’à nos jours contre ce que nous appelons désormais la technique. Il s’attache, en particulier, à montrer la variété des situations historiques depuis deux siècles : certaines faisant une large place aux critiques, d’autres les passant sous silence. Il met ainsi en valeur les grands moments de la contestation : luddites et autres briseurs de machines du XIXe siècle, penseurs critiques et écologistes du XXe siècle et décroissants du XXIe siècle. Il insiste sur la persistance de ces interrogations et contestations pendant les phases d’expansion : milieu du XIXe siècle, Belle Époque et Trente Glorieuses... Certaines pensées et actions les plus critiques sont nées en plein milieu de ces époques : John Ruskin écrivit Unto this last dans l’Angleterre victorienne de 1862, Günther Anders L’obsolescence de l’homme en 1956 dans l’Europe des Trente Glorieuses… De façon générale, Technocritiques est un livre très bien construit et documenté. Si l’engagement de F. Jarrige tout au long de son ouvrage est évident, il est largement assumé, par exemple dans les derniers chapitres qui touchent à notre société numérique. L’auteur y ouvre aussi des perspectives pour l’avenir, dépassant ainsi le champ de l’histoire pour rejoindre celui, tout aussi fondamental, de la politique.

Matthieu Cassou-Mounat
29 avril 2016
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