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Se réconcilier avec l'histoire

©Ana Paula Hirama/Flickr/CC
©Ana Paula Hirama/Flickr/CC
Resumé Chen Yan est né en Chine où il a enseigné l’histoire à l’Université de Wuhan de 1977 à 1982 et en 1987-1988. Depuis 1990, il est journaliste bilingue à RFI et a enseigné l’histoire de la Chine à l’Université Paris VII et sa géographie à l’Université de Lyon 3. Il est directeur de collection chez Sanlian à Pékin et aux éditions de l’Aube.

Projet – Comment êtes-vous arrivé en France ?

Chen Yan – C’est en 1982 que je suis venu pour la première fois en France. Je faisais partie des premiers étudiants et professeurs envoyés à l’étranger après l’ouverture et les réformes lancées en 1978. J’étais déjà enseignant à l’université de Wuhan (chef lieu de la province de Hubei) et je venais pour un an seulement, sans autre objectif que de suivre des cours. En Chine, on ne savait pas très bien comment cela se passerait. Nous étions coupés du monde extérieur depuis trente ans. J’avais appris un petit peu d’anglais, dans le cadre de ma formation d’historien, mais je n’aurais pas demandé de moi-même à venir en France. A Wuhan, il avait été dit qu’au moins l’un d’entre nous devait participer au concours national pour être sélectionné. Mon professeur, qui avait rédigé le seul manuel d’histoire mondiale pour les étudiants de toute la Chine, a fait pression sur moi : « Si tu ne réussis pas au concours, tant pis, puisque que tu n’y es pas préparé. Si tu y arrives, ce sera à l’honneur de notre université. » Je me suis jeté à l’eau. Et j’ai finalement réussi à passer les concours mais j’ai attendu deux ans pour venir en France.

A la fin de ma première année, à Paris, j’ai dit à l’ambassade que ce séjour était trop court pour les littéraires. Les scientifiques, peut-être, n’avaient pas besoin d’une connaissance linguistique très approfondie. Mais, pour ma part, je commençais tout juste à être à l’aise pour suivre les cours. On a accepté de prolonger mon séjour. Durant la troisième et la quatrième année, j’ai bénéficié d’une bourse du gouvernement français. Finalement, j’ai commencé une thèse et je suis resté jusqu’en 1987. De retour en Chine, je ne pensais pas revenir en France. Mais, ayant fait la connaissance de mon épouse en France, j’y suis revenu au bout d’un an, sans imaginer cependant que ce serait définitif. Mais il y a eu les événements de 1989, et je suis toujours ici.

Projet – Avant de venir en France, que signifiait pour vous enseigner l’histoire de la Chine ?

Chen Yan – Au collège et au lycée, on enseigne l’histoire de la Chine et un peu d’histoire des autres pays. On retrouve ces deux matières à l’université. L’histoire mondiale est largement dominée par celle de l’Europe. La particularité de cet enseignement n’est pas géographique, mais idéologique.

Le schéma dominant est celui imposé par le marxisme-léninisme : celui de cinq étapes qui se succèdent et correspondent au développement de la société humaine. D’abord l’époque « primitive », celle de la Préhistoire, où la société n’est pas encore divisée en classes. Vient ensuite celle de l’esclavage, qui oppose les maîtres à ceux qui sont en servitude, et une première société de classes. Puis le féodalisme, puis le capitalisme, précédant l’avènement du socialisme. Le problème central de la féodalité n’est pas la vassalité, comme on l’étudie en Europe. On parle de féodalisme pour une époque qui oppose les paysans, pas nécessairement des serfs, et les propriétaires fonciers. Parmi les historiens, il y avait des débats sur la liberté des paysans. La question se posait aussi pour l’Europe de l’Est et la Russie.

Ce schéma était un « moule officiel », unanimement admis : une seule pensée, une seule idéologie. En revanche, il y avait des discussions à propos du modèle asiatique. Marx lui-même y voyait une situation tout à fait particulière qui ne ressemblait ni à celle de l’Europe de l’Est, ni à celle de l’Ouest. Mais, sous Mao, l’issue du débat était toujours prévisible : elle ne pouvait que renforcer l’analyse officielle. Sortir du moule aurait pu conduire à démontrer que ce schéma n’était pas valable pour la Chine. Vous imaginez les conséquences !

Un autre débat portait sur la naissance du capitalisme. Pourquoi celui-ci n’est-il pas né en Chine ? Étrangement, la Chine semblait avoir sauté l’étape capitaliste. Si elle était trop particulière, le marxisme s’y appliquait-il ? A la fin des années 50 et au début des années 60, ce débat était vif entre historiens. Finalement, la question était : y a-t-il eu des germes du capitalisme en Chine ? Certes, la Chine n’a vraiment connu le capitalisme qu’avec sa rencontre avec l’Occident, en 1840. Mais, entre le XIVe et le XVIIe siècles (période de naissance du capitalisme en Occident), y avait-il des signes précurseurs du capitalisme comme les accélérations d’échanges régionaux de marchandises, le ressort du commerce en villes, des produits destinés non pas à la propre consommation des foyers mais au marché, la spécialisation de productions régionales, etc. ? Certains chercheurs en relèvent des traces à l’époque des Ming, d’autres à celle des Song, au XIe siècle. Ainsi, au début des années 60, un petit espace se fait jour. Mais après la révolution culturelle, le moindre dérapage par rapport à l’idéologie devient critiquable.

Projet – Quelles furent vos premières impressions en France ? Où se porte alors votre curiosité ?

Chen Yan – D’abord, sur l’histoire occidentale. J’étais en Chine un spécialiste de la période du XIVe au XVIe siècle. La question des germes du capitalisme était tout à fait dans mon champ d’étude, et je prétendais connaître un peu l’Europe.

Mais, ma première impression, ce fut le nombre des voitures. Il semblait y avoir autant de voitures à Paris qu’il y avait de personnes à Pékin. Il m’a fallu du temps pour découvrir qu’il y avait aussi des gens. Pendant les premiers temps, nous logions dans des locaux de l’ambassade, en banlieue, et nous n’en sortions guère. Un jour je me suis risqué et j’ai pris le bus : une aventure ! Je suis venu au centre de Paris. Mais pour rentrer, le bus ne passait pas par le même chemin. J’ai dû descendre à un endroit que je ne connaissais pas. J’ai demandé mon chemin et un couple de Français, très gentiment, m’a ramené en voiture à l’ambassade. Peu de temps après, à des amis en Chine, j’ai écrit qu’il n’y avait pas que des voitures à Paris, mais aussi des gens très gentils. Ce ne sont pas des capitalistes qui nous écrasent. Dans notre éducation, tous les Occidentaux étaient censés appartenir à la classe bourgeoise.

Projet - En histoire, vos intérêts se sont-ils déplacés?

Chen Yan - Au début, je poursuivais mes travaux commencés en Chine, sur les germes du capitalisme. Mais, rapidement, je découvris des interprétations différentes sur un fait historique. En Occident, on parlait d’une crise agricole vers le XVe siècle. Dans cette crise, les historiens marxistes voyaient les premiers signes avant-coureurs de l’avènement du capitalisme, avec les premières spécialisations de l’agriculture selon les régions, tandis que d’autres mettaient l’accent sur le climat et la peste noire pour expliquer la crise. Aussi, dans ma thèse, je me suis attaché beaucoup plus aux interprétations des faits historiques. C’était pour moi une ouverture de l’esprit.

Projet – Vous choisissez alors entre ces différentes interprétations ?

Chen Yan – Je restais focalisé sur les similitudes entre l’Europe et la Chine. Pourtant, j’arrivais à la conclusion que ce n’était pas du tout la même chose. En Chine, à la fin de chaque dynastie, on assiste à une vaste concentration des terres : il y a une accumulation dans la main d’une petite classe de propriétaires fonciers. Les paysans, auparavant dépendants de l’Etat, tombent sous la coupe de ce petit groupe et deviennent de simples journaliers. En effet, ils ont confié leur terre à des propriétaires pour échapper aux impôts trop lourds de l’Etat. Ce dernier est ainsi affaibli et les propriétaires deviennent des puissants. Cette situation entraîne des révoltes de paysans qui renversent la dynastie avant d’en fonder une autre. Le commerce est systématiquement réprimé par l’Etat. Pendant 2000 ans, celui-ci n’est jamais parvenu à organiser le commerce. Des mandarins ont essayé plusieurs systèmes de taxation, qui ont tous échoué. Les échanges étaient pour l’Etat confucéen une réalité insaisissable, mal quantifiée. Ainsi le commerce était-il vu comme l’origine de tous les maux de la société. Les Chinois considéraient que la seule ressource nationale, c’était la terre : le commerce, ça ne pousse pas… Les échanges ne créent pas de richesse. On aboutit ainsi à cette vision qu’en Chine, à chaque changement de dynastie, a correspondu une destruction des richesses. Chaque nouvelle dynastie annonce une diminution des taxes. La vie s’améliorant, les paysans commencent à produire. Mais le cycle recommence. Les propriétaires les plus puissants sont souvent des mandarins, des parents de l’empereur.

Projet – Pendant votre absence, la Chine s’était-elle transformée ?

Chen Yan – À mon retour, la Chine avait beaucoup changé. Le débat y est très animé ; les mentalités bougent ; des auteurs comme Sartre, Heidegger ou Foucault deviennent populaires parmi les intellectuels et les étudiants. Beaucoup de marchandises sont disponibles. La plupart des Chinois sont optimistes sur l’avenir du pays qui commence à sortir de l’enfermement idéologique et à reprendre confiance. Le parti semble démontrer sa capacité de mener une réforme à bien, remettant même en question les schémas marxistes. Mais, en même temps, durant cette période, deux campagnes idéologiques sont lancées successivement. D’abord, celle contre la « pollution spirituelle » ( fan jishen wuran) en 1983 : contre les vêtements qui viennent de l’étranger, les cheveux trop longs, les pantalons bouffants ; ensuite, celle en 1987 contre le « laxisme capitaliste » ( fan ziyouhua). On y mettait en cause l’ouverture vers l’Occident dans le domaine des idées et dans l’aspiration aux libertés de pensée et d’expression suscitées par cette ouverture. L’ouverture marque une pause, avant de reprendre avec plus de force. Des conflits opposent les conservateurs, les réformateurs et les intellectuels. Pourtant, les gens continuent d’avoir confiance dans le parti.

Projet – Cette atmosphère vous donne-t-elle envie de rester ?

Chen Yan – Je ne souhaitais pas trop rester à Wuhan. J’aurais préféré pouvoir aller à Pékin ou à Shanghai : deux villes au cœur des débats intellectuels et culturels. Mais mon professeur ne souhaitait pas que je parte. Il ne m’a jamais donné le feu vert, et ceux qui m’invitaient n’ont pas osé l’affronter. A Wuhan, on manquait de livres, de contacts avec l’extérieur. L’ouverture du pays ne s’y faisait guère sentir. Par ailleurs, les premiers étudiants de retour d’un séjour à l’étranger étaient distingués des autres. Ils pouvaient bénéficier d’un appartement au lieu de vivre en dortoir. Cette rupture de l’égalitarisme officiel me mettait mal à l’aise. J’avais déjà eu la chance d’être envoyé à l’étranger, et l’on me proposait d’en tirer d’autres avantages.

Projet – Quand avez-vous commencé à travailler non plus sur l’Europe, mais sur la Chine ?

Chen Yan – Après avoir soutenu ma thèse en 1986, j’avais pu rester un an encore en France. J’ai beaucoup travaillé sur la nouvelle histoire (l’Ecole des Annales) en étudiant Georges Duby, Fernand Braudel, Jacques Le Goff, entre autres, et sur l’interprétation de l’histoire et du récit (Paul  Ricoeur, par exemple). De retour en Chine, j’ai participé au débat pour introduire de nouvelles théories historiques et de nouvelles méthodes de recherche en histoire. Tout le monde avait soif de ce nouvel éclairage.

J’y ai contribué à travers des articles publiés dans Lire ( dushu), revue très influente. Ce qui m’a amené à rencontrer de nombreux intellectuels. Dans la fièvre culturelle des années 80, tout le monde est intéressé par l’histoire de l’Occident contemporain. Jusqu’en 1949, celui-ci avait été bien introduit en Chine, mais depuis, plus rien. Après 1957, après une période de relative détente intellectuelle, la répression avait commencé. Ceux qui avaient une certaine connaissance de l’Occident puisqu’ils avaient reçu une éducation supérieure avant la fondation de la République populaire, étaient suspects pour avoir la capacité intellectuelle de mener une réflexion indépendante. Ils ont donc été réprimés au cours de la campagne anti-droitiers. Quand commence la révolution culturelle, il n’y a pratiquement plus d’esprit indépendant à l’intérieur du Parti.

De cette époque, la redécouverte de l’Occident constituait une sorte de miroir pour les intellectuels chinois. Tout ceux qui s’intéressaient à l’Occident s’intéressaient tout autant à la Chine et son avenir puisque l’Occident était devenu la seule référence d’avenir. Je me suis mis très vite, comme tant d’autres, à écrire des articles sur la Chine aussi.

Projet – Finalement, vous choisissez de retourner en France.

Chen Yan – Au-delà des faits historiques, je m’intéressais surtout au débat d’idées. C’est en partie pour cela que j’ai préféré repartir. En France, j’ai enseigné à l’université du Havre, à Lyon, à Paris-VII, sur la civilisation chinoise, l’histoire ancienne, moderne et contemporaine de la Chine. Les recherches et échanges que j’avais menés en Chine nourrissaient cet enseignement.

Projet – Votre livre L’éveil de la Chine est le fruit de ce travail, avec ces deux parties : un panorama de la Chine jusqu’en 1989, puis une histoire intellectuelle et politique jusqu’aujourd’hui.

Chen Yan – J’ai intitulé la première partie, la déconstruction de l’idéologie. Elle est centrée sur la question de la sortie du carcan marxiste. Il a fallu trouver des justifications pour réformer, de nouvelles idées… Le premier moment fut celui de l’émancipation de la pensée. Je considère le processus de la déconstruction comme un mouvement des Lumières : on échappe au diktat politique, et on prend racine dans l’esprit humain qui cherche à conquérir sa liberté. S’appuyant sur un consensus qui est la réforme, tout le monde, et les intellectuels et les politiques, poursuit le même chemin avant de se séparer dans les années 1990. Les intellectuels acquièrent toujours plus de liberté en bénéficiant d’une irrigation aux sources qui viennent de l’extérieur et qui les réconcilient avec leur propre histoire. Cette recherche va bien au-delà de la simple justification politique de la réforme. Mais, au début, on n’était pas très conscient du chemin que l’on prenait.

Projet – La deuxième partie de votre livre s’intitule « la Chine sans l’idéologie ». Où se situe la rupture ?

Chen Yan – L’année décisive est 1989. Les étudiants manifestaient pour accélérer la réforme. Mais le parti ne l’a pas compris comme cela. Le mouvement dépassait son contrôle et commençait à lui échapper. La répression n’avait qu’un seul but : restaurer le contrôle par le pouvoir. Les étudiants avaient bien conscience de ce mouvement et de sa force mais trop confiance dans le Parti. La répression, finalement, a achevé la déconstruction. Sa violence a accentué la disqualification du pouvoir. Dans les périodes précédentes, chaque répression était suivie d’une campagne pour légitimer l’action violente. Mais, après 1989, on ne cherchait même plus à justifier cette répression.

Projet – Ne lisez-vous pas cette période avec les catégories de la culture occidentale ?

Chen Yan – Sécularisation, nationalisme et identité, néo-conservateurs, ordre et liberté, libéralisme…, toutes ces notions qui ont des résonances dans l’histoire de la Chine appartiennent à la culture occidentale. Mais chacune renvoie à des enjeux fondamentaux. Les humains se ressemblent, et il n’est pas surprenant d’utiliser ces catégories pour parler de la politique en Chine. Les catégories d’analyse et concepts philosophiques de l’Occident ont été introduits en Chine depuis le XIXe siècle au point qu’aujourd’hui ils font partie intégrante de la tradition intellectuelle chinoise moderne. Le communisme n’a pas été inventé en Chine non plus. Quand on sort du carcan idéologique, les problèmes refont surface, à l’Est comme à l’Ouest. Je ne pense pas qu’il y ait d’alternative à ces grandes catégories.

Prenez, par exemple, le libéralisme. Il représente en Chine, aujourd’hui, une question cruciale, même si la censure interdit de la poser clairement. Le libéralisme, ce n’est pas d’abord un cadre économique. La Chine a besoin d’un cadre politique démocratique. Avec la mondialisation, elle se trouve confrontée à une situation inédite. Pour la nouvelle gauche, la question n’est pas de démocratiser la société chinoise mais de faire face à la mondialisation. Pour les libéraux, en revanche, la Chine a deux pieds, l’un dans la mondialisation et l’autre dans le totalitarisme.

Mais le problème fondamental est ailleurs : la misère de la société chinoise est qu’il n’y a pas de vrais syndicats, pas de respect pour les droits, pas de corps intermédiaires. Le Parti impose à la société un capitalisme d’Etat afin de maintenir la croissance et de rester au pouvoir. Il est impuissant pour lutter contre la corruption et contre les abus de certaines entreprises étrangères par crainte de décourager les investissements. Les libéraux, eux, souhaitent un cadre démocratique : à leurs yeux, la Chine n’a pas encore le cadre capitaliste qui permettrait de régler ces problèmes.

Projet – Mais ce cadre, en Occident, est le résultat d’une longue histoire. En Chine, quel est l’héritage du passé, de la période avant 1949 ? Du confucianisme, par exemple ?

Chen Yan – On ne peut pas dire qu’il y ait encore en Chine une structure sociale confucéenne. Elle a été complètement détruite par 150 ans de bouleversements, même si un certain confucianisme imprègne toujours les mentalités. L’apport le plus important du « nouveau » confucianisme est de montrer aux Chinois qu’il n’y a pas que l’Occident et que leur propre tradition est à prendre en compte. Elle est peut-être une source. Depuis la guerre de l’opium en 1840, une sorte de radicalisation intellectuelle a disqualifié la tradition. La redécouvrir est vital pour fonder un avenir. Ce sont les Chinois d’outre-mer qui ont réimporté le confucianisme. Celui-ci a longtemps joué le rôle d’idéologie officielle (le parallèle avec le marxisme sur ce plan est parlant). Mais il peut constituer aussi une base culturelle, une morale dans la famille, dans la société, dans l’économie. Ce sens du respect, ce sens moral, ne peut pas être négatif.

Projet – Que dire aujourd’hui de la société civile ?

Chen Yan – Elle émerge aujourd’hui, mais elle n’est guère institutionnalisée. Pour ne pas dire qu’elle est réprimée. Il n’y a aucun syndicat autonome. Les paysans n’ont même pas de syndicats officiels. Si l’on voit, en ville, des associations de consommateurs, ou des associations professionnelles, elles sont toutes officielles. Cependant, apparaissent depuis trois ou quatre ans des associations de petite envergure : amis de la nature, ou acteurs contre le sida. Ces groupes, non officiels, ne sont pourtant pas vraiment indépendants : ils doivent toujours trouver une tutelle auprès d’un ministère. Le parti peut à tout moment les dissoudre. C’est un très grand obstacle pour les Ong.

Les Chinois demandent à se resituer par rapport à l’Etat. Sur le plan économique, depuis un certain temps la production d’entreprises privées dépasse celles d’entreprises étatiques. Aujourd’hui, c’est en termes d’emplois que le secteur public est en train d’être distancé par le privé. Mais la société est privée de parole, d’organisation. Si l’on créait un cadre légal, on verrait émerger des milliers d’associations, qui étaient déjà là dans la clandestinité. La société est là, les gens sont là, qui demandent à s’organiser. C’est une question de jours. La société chinoise est mûre aujourd’hui.


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