Une histoire des civilisations Comment l’archéologie bouleverse nos connaissances
Jean-Paul Demoule, Dominique Garcia et Alain Schnapp (dir.) La Découverte, 2018, 700 p., 49€L’archéologie nous permet d’en savoir plus sur la manière dont les êtres humains ont évolué jusqu’à devenir des Homo sapiens.
Qu’est-ce que l’archéologie permet de dire e l’être humain et de son histoire ? Nous avons, au fil du temps, colonisé la planète de nos réalisations : les traces de la vie humaine sont légion sur le globe. À notre disparition, nous laissons derrière nous un bric-à-brac d’objets, de constructions, de notes et autres effets personnels. Que permettront-ils de dire de nous à la femme et à l’homme du futur ?
Les édifices de notre temps, ainsi que nos histoires singulières, dont les traces seront encore visibles sur la surface de la terre après notre mort, permettront, d’une manière ou d’une autre, d’illustrer la vie de la femme et de l’homme du XXIe siècle ou ce que cela voulait dire d’être un être humain à cette époque.
La lecture de cette Histoire des civilisations, sous-titrée : « Comment l’archéologie bouleverse nos connaissances », permet de redire, notamment, que nos ancêtres ont, comme nous aujourd’hui, laissé des manifestations de leur passage sur terre et incarné les vestiges de leur existence, par leurs modes de penser, de vivre et, souvent aussi, de coexister.
Plus encore, cet ouvrage souligne comment l’archéologie continue encore de faire la lumière sur la grande « Histoire » à travers les histoires singulières de tombes, de monuments émergés ou engloutis, de hangars en béton datant de la Guerre froide et d’œuvres artistiques autrefois enfouies ou oubliées. L’un des premiers constats de cet ouvrage collectif est qu’il existe une réelle volonté de l’espèce humaine de laisser ces traces et de faire mémoire.
Un primate n’a pas toujours été défini comme il l’est aujourd’hui.
Tout en conservant les différents développements de l’être humain au cours des âges comme structure, les auteurs de cette Histoire des civilisations appuient leurs propos de clichés de pièces archéologiques, ce qui permet au lecteur de mettre les mots en images. L’ouvrage est découpé en quatre grandes parties, passant des sociétés de chasseurs-cueilleurs aux premières sociétés agricoles ; puis aux différents empires et à la mondialisation, pour terminer sur les nouveaux champs de l’archéologie.
Comment sommes-nous devenus Homo sapiens ? Pour retracer les premiers moments de l’Homme, il nous faut étudier le peu de restes de la vie des premières femmes et des premiers hommes par l’intermédiaire des fossiles du genre Homo, de squelettes, d’outils et de vestiges de rites funéraires. Toujours sous le prisme des apports de l’archéologie, notons que l’étude de ces traces a suscité des débats entre scientifiques et que la façon d’étudier les premiers êtres humains a elle-même connu des évolutions au fur et à mesure des découvertes.
Une brève allusion est faite à l’influence des Britanniques Thomas Henry Huxley et Charles Darwin pour nous dire que ce qui va de soi aujourd’hui en matière d’archéologie n’a pas toujours été tenu pour acquis. Ainsi un primate n’a-t-il pas toujours été défini comme il l’est aujourd’hui. Il a fallu distinguer les différentes familles gravitant autour des premiers hommes et femmes mais, aussi et surtout, il a fallu établir la distinction entre l’espèce humaine et les autres espèces d’Hominidés, que sont les chimpanzés, les gorilles et les orangs-outans.
Nos plus anciens ancêtres font partie de la sous-tribu des Hominines et se distinguent du chimpanzé dans une période s’établissant entre 9,3 et 6,5 millions d’années. Retrouvés en Afrique dans la région de l’actuel Tchad et de l’actuelle l’Éthiopie, les fossiles permettant cette distinction nous informent que nos ancêtres étaient différents des grands singes du fait de leur locomotion (bipède) et de leur denture.
Les premiers fossiles d’Homo sapiens sont datés de 300 000 à 200 000 ans avant le temps présent.
Vers 4,2 millions d’années apparaît l’ensemble d’espèces qu’on nomme « Australopithèques ». Il se diversifie ensuite du fait de la géographie et des changements environnementaux auxquels il se confronte, pour donner le jour à la séparation entre Paranthropus et Homo il y a environ 2,8 millions d’années.
Vient ensuite l’Homo erectus dont les traces les plus probantes nous viennent de Géorgie et du Kenya. Il se diversifie par la croissance de la taille de son cerveau. Ce qui est en cause est son changement de corpulence. Mais arrive un stade où les deux phénomènes ne se lient plus. La corpulence se stabilise mais la taille du cerveau continue de progresser du fait des activités technologiques et des développements sociaux de l’espèce.
Les premiers fossiles d’Homo sapiens sont datés de 300 000 à 200 000 ans avant le temps présent. Les découvertes réalisées sur le site de Jebel Irhoud au Maroc ont révélé les plus anciens restes d’Homo sapiens connus à ce jour et nous permettent de faire le lien avec l’Homme actuel grâce à sa denture et sa mandibule. Au fur et à mesure des développements des différents segments de formes de vies humaines, il ne restera plus que l’Homo sapiens.
Le Paléolithique supérieur voit l’apparition de ce que l’on pourrait appeler une forme de modernité en Europe.
Depuis les premiers silex affutés, témoignant de modes de vie aujourd’hui largement dépassés, qu’est devenu l’Homo sapiens ? Les autres formes de vies terrestres naissent et meurent sans laisser de grandes traces de leur passage, mais l’Homo sapiens, lui, fait hériter les nouvelles générations de ses réalisations bonnes ou mauvaises. Il cherche même parfois à laisser des traces.
Le Paléolithique supérieur voit l’apparition de ce que l’on pourrait appeler une forme de modernité en Europe, dont seraient issus les fondements universaux des sociétés humaines actuelles. Bien qu’héritage immatériel, ces fondamentaux peuvent se décliner comme suit : les formes de la parenté (monogamie ou polygamie), les liens de filiation, la circulation des biens et l’organisation politico-religieuse et sociale. L’Homme est devenu l’Homme et Homo sapiens s’est développé. Il a essaimé, faisant naître diverses civilisations.
L’ouvrage illustre différents temps de l’Histoire de ces civilisations qu’il est bon de découvrir au fur et à mesure que l’on tourne les pages. Il fait aussi le point sur la manière dont les différents empires du monde se sont côtoyés pour ensuite donner naissance à ce que l’on appelle aujourd’hui la mondialisation. Enfin, les nouveaux champs d’étude de l’archéologie sont abordés, comme l’archéologie sous-marine, autant d’occasions d’en découvrir un peu plus sur l’histoire ou les histoires des femmes et des hommes qui nous ont précédés.
20 janvier 2025