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L’illusion localiste L’arnaque de la décentralisation dans un monde globalisé

Aurélien Bernier Utopia, 2020, 192 p., 10 €

Le terme « arnaque » dans le sous-titre met vigoureusement en avant l’intention de l’ouvrage. Si l’idée localiste peut laisser entendre qu’il reste des espaces de liberté dans le cadre de la mondialisation, c’est en fait, selon l’auteur, la classe dirigeante qui a créé une illusion localiste, inventé la décentralisation pour éviter toute remise en cause radicale du capitalisme et soutenir un projet de régression sociale. Mais que signifie le localisme ? On retrouve cette réalité un peu floue dans tous les programmes politiques : « rapprocher le pouvoir du citoyen », « instaurer la démocratie participative », « soutenir le développement territorial et l’économie de proximité ».

Une analyse historique traque avec acuité ces deux idées (le localisme et la décentralisation) dans les discours et dans les actes des pouvoirs publics, mais aussi chez les partis politiques ou les syndicats, jusqu’au niveau européen. Vient ensuite un chapitre consacré à la centralisation mondiale et européenne et ses composantes que sont la dérégulation, la concentration, les transferts de compétence. Le contraste entre les deux conduit à la question du difficile rapport entre le local et l’État, dont traite le quatrième chapitre. Opposer l’État et les réalités locales (commune, région, associations) est, selon l’auteur, une erreur : il est impossible de rompre avec la mondialisation sans changer le cadre macroéconomique. C’est donc la loi qu’il faut modifier, et ce, au niveau de l’État.

Les transferts de pouvoir aux élites locales ne sauraient organiser le désengagement de l’État et le recul des services publics. Y a-t-il alors une place pour le local dans le processus de transformation ? Le propos de l’auteur ne vise pas à discréditer l’action de proximité ou l’engagement citoyen, mais cherche les moyens d’articuler l’action locale et celle de l’État. En changeant le cadre national pour relocaliser, en clarifiant ce qui ne doit pas être local, en réformant les institutions en profondeur, de manière à rendre obligatoires les mécanismes démocratiques, afin que la participation citoyenne ne soit pas ponctuelle mais systématique. Le lecteur s’accordera facilement sur ces derniers points, mais risque de rester un peu sur sa faim quant à la réalisation des perspectives proposées. Chercher à valoriser et rendre plus effectif le pouvoir d’« en bas » est un objectif incontournable. Reste à trouver comment ce pouvoir trouvera les moyens et les compétences pour s’exercer ; la délégation n’y suffit pas.

Jean-Marie Carrière
20 mai 2020
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