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Le pouvoir des multinationales

Christian Chavagneux et Marieke Louis Puf/Vie des idées, 2018, 108 p., 9,50 €

Avec la clairvoyance coutumière de la collection « La vie des idées », ce petit ouvrage se propose « d’analyser les firmes multinationales comme faisant partie d’un processus économique, politique et social au cœur de la mondialisation et de la gouvernance mondiale ». De fait, le pouvoir des multinationales excède largement le champ de l’économie ; la Compagnie des Indes l’attestait à sa manière dès le XVIIᵉ siècle. Le monde compte aujourd’hui environ 100 000 entreprises transnationales (contre 37 000 au début des années 1990), avec pas moins de 860 000 filiales. Les deux premières contributions posent quelques éléments de cadrage : celle de Christian Chavagneux, sur l’économie politique internationale (ÉPI), née dans le monde anglo-saxon dans le sillage des travaux de Susan Strange ; celle de El Mouhoub Mouhoud, expliquant que le ralentissement du commerce international n’empêche pas un approfondissement de la mondialisation du fait des firmes multinationales. L’analyse procède ensuite par touches d’autrices et d’auteurs d’horizons intellectuels et disciplinaires différents, faisant varier les échelles territoriales envisagées. On voit ainsi, à travers l’exemple de Michelin, qu’une multinationale est un acteur politique local au sens plein du terme (Thomas Zanetti). Mais l’est tout autant au niveau international, comme le montre son intense activité autour de la question de la responsabilité sociale, environnementale et fiscale des entreprises (Mathilde Dupré) et le déploiement d’une véritable diplomatie sociale (Marieke Louis). Thibault Le Texier, à partir des travaux de l’avocat Jean-Philippe Robé montrant que les multinationales ont su se constituer un système juridique autonome à leur seul profit, rappelle également une autre échelle : celle de l’entreprise elle-même qui peut être considérée comme « une communauté politique » en propre. Les auteurs se proposent ainsi de prendre la responsabilité de ces firmes au sérieux, pour reprendre le titre d’un ouvrage dirigé par Alain Supiot et Mireille Delmas-Marty (PUF 2015). On trouvera dans leur propos des résonances avec le numéro de la Revue Projet « À l’heure des multinationales, le retard du droit ? » (été 2016), comme avec de nombreux enjeux contemporains !

Jean Vettraino
11 octobre 2019
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