« Face aux grands défis du moment, la bataille ne se déroule pas dans un espace abstrait nommé France. Elle se livre dans la diversité des territoires, à Grenoble comme à Limoges, à Lens comme à Saclay, à Figeac comme à Dunkerque. » Pierre Veltz analyse ici les territoires – sans retenir leur définition administrative – sous les aspects de l’économie et de l’emploi d’une part, de la transition écologique d’autre part, avec finesse et pédagogie. Il part du constat d’un « tournant local », dans lequel prévaudraient « les impératifs écologiques ». Si ce tournant a des tenants économiques et politiques, il est d’abord culturel, ancré dans une nouvelle vision du monde portée par les millenials (personnes nées entre 1980 et 2000) qui s’affirment progressivement. Montrant les différents mécanismes à l’œuvre dans les dynamiques actuelles, moins déterminées que par le passé, Pierre Veltz convainc qu’il faut considérer les territoires sous l’angle de leur complémentarité et de leur solidarité de fait, plutôt que de monter des oppositions schématiques (à commencer par métropole/périphérie). Il pointe d’ailleurs le « dérapage » possible de l’objectif d’autonomie, valeur cardinale de ce « tournant territorial », vers celui d’autarcie, qui abandonnerait le principe de solidarité nationale, réel atout français en l’occurrence. Il convainc, aussi, qu’en matière d’écologie comme en matière de politique économique ou industrielle, « l’addition de politiques locales, aussi vertueuses soient-elles, ne peut à elle seule faire basculer les choses ». Il existe une nécessaire dialectique entre niveau local et niveau national – voire supranational –, de même qu’en matière de mobilité ou de santé, les attentes de l’individu (de plus en plus individualisées) sont indissociables de l’élaboration de systèmes collectifs complexes. Mais c’est plus particulièrement aux espaces métropolitains que Pierre Veltz s’intéresse ici : « S’agissant de l’énergie, de l’alimentation, des services écologiques multiples, les potentiels de complémentarité et de codéveloppement entre cœurs densément peuplés et espaces ouverts à faible densité humaine sont encore largement inexplorés ». Il concentre son attention sur la métropole parisienne, dans ses liens à ses territoires alentour comme au territoire national, et consacre un dernier chapitre à préciser une vision qui lui tient à cœur, celle d’une « charpente que j’ai appelée la « métropole-France », reliant Paris et les grandes métropoles provinciales dans une constellation exceptionnelle ouverte sur l’Europe et le monde ».