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Jürgen Habermas. Une biographie

Stefan Müller-Doohm Gallimard, 2018, 656 p., 35 €

L’œil du sociologue Stefan Müller-Doohm est aiguisé pour comprendre comment la personne devient un individu unique et spécifique dans la mesure où il se confronte avec la société de son temps. Dans cet imposant exercice biographique (près de 500 pages, sans compter les notes), il nous invite à suivre l’itinéraire de Jürgen Habermas, depuis sa naissance en 1929 puis son enfance marquée par des difficultés d’élocution (premier clin d’œil à l’importance du médium langagier !) à l’exposition fort claire de ses thèses les plus tardives (postnationalisme, ordre mondial démocratique, verbalité et intersubjectivité). L’homme, que l’on sait être un grand intellectuel fascine d’autant plus que l’on s’intéresse à sa vie, depuis la dénonciation, à vingt ans à peine, de la complaisance allemande aux restes de national-socialisme, jusqu’à l’élaboration de la raison communicationnelle, son grand œuvre. À découvrir son histoire, on comprend que l’expérience de la catastrophe allemande révélée en 1945 et la volonté d’éviter toute possible rechute déterminera tout son rapport à la philosophie. On perçoit l’influence, d’abord de Heidegger, puis de l’école de Francfort, qu’il rejoint en 1956 – et en particulier des trois représentants de la première génération de la théorie critique (Adorno, Marcuse, et, de façon plus houleuse, Horkheimer). Influence aussi de Gadamer, de Jaspers, de Löwith, et de la psychanalyse. Et l’on suit, de publications académiques en diatribes polémiques, la formation d’une pensée originale, encore trop méconnue dans sa complexité, depuis ses écrits sur l’espace public dans les années 1960 à l’explication plus subtile de ces mêmes thèses, cinquante ans plus tard, dans le contexte d’une « modernité postmétaphysique ».

Louise Roblin
7 mars 2019
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