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L’Afrique, nouvelle frontière du djihad?

Marc-Antoine Pérouse de Montclos La Découverte, 2018, 160 p., 14 €

L’Afrique est particulièrement minée par les nébuleuses terroristes. Serait-elle aujourd’hui la dernière ligne de front face aux mouvances « djihadistes » ? Dans un contexte d’États jeunes et parfois fragiles, déstabilisés, minés par la corruption et victimes de nombreux fléaux (famines, épidémies, conflits), la pression des groupes armés (les chebab, Boko Haram, Al-Qaïda…) interroge la communauté internationale. Les explications abondent mais manquent parfois de justesse. C’est du moins ce que Marc-Antoine Pérouse de Montclos observe dans ce livre. Son analyse questionne précisément ce qu’il appelle « une mise en récit » du terrorisme en Afrique de l’Ouest et ailleurs. Il n’existe pas, à ses yeux, « d’arc de crise » en Afrique qui lierait plusieurs groupes terroristes dans un seul et même combat sous les ordres d’un commandement central (supposément localisé au sud de la Libye). Il souligne la complexité de tels phénomènes. « L’apparition et l’évolution des chebab en Somalie, d’AQMI au nord du Mali ou de Boko Haram au Nigeria s’expliquent davantage par les situations sociales et les rapports de forces locaux que par leurs références à une révolution islamique mondiale ». Les luttes armées se comprennent donc davantage par le sentiment d’injustice et de persécution qu’en référence à l’envie de renverser le monde, justifiée par des « références coraniques ». L’auteur met en garde contre l’analyse faussée d’un soi-disant « choc des civilisations » entre différentes communautés confessionnelles. Les antagonismes existants peuvent être tout aussi bien appréhendés par le prisme de l’opinion politique que par la culture ou le statut social. Ils n’opposent d’ailleurs pas des blocs « monolithiques », mais souvent des alliances pour le moins hétérogènes. Le lecteur est ainsi amené à s’interroger sur ses idées reçues, à propos d’une ligne de front africaine de la mouvance djihadiste, sa solidité, son homogénéité idéologique : une réalité certes avérée mais aussi construite par des médias qui ignorent les caractéristiques de la menace djihadiste en Afrique.

Sarah Maréchal
20 décembre 2018
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