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Le procès des médecins de Nuremberg. L’irruption de l’éthique médicale moderne

Bruno Halioua Érès, 2017, 234 p., 15 €

Quand l’eugénisme devient un système politique appliqué à grande échelle au nom de la « pureté raciale » par l’État national-socialiste. Certes, l’expérimentation médicale sur des cobayes en bonne santé n’est pas nouvelle, mais elle n’avait jamais été érigée en système. Parallèlement au procès des hauts dignitaires nazis, qui donnera naissance au concept de « crime contre l’humanité », celui des médecins de Nuremberg, devant un tribunal militaire pénal américain, aboutira à interroger la légitimité d’expérimentations sur des sujets sains et non consentants : c’est le code de Nuremberg (1947). Comparaissent 26 prévenus, tous d’éminents médecins, ni bourreaux ni sadiques, mais imprégnés de l’idéologie national-socialiste, où le choix volontaire de l’homme est remplacé par la volonté de l’État. L’État doit se séparer des « faibles » ! En 1933, stérilisations de ceux qui sont considérés comme une charge ; en 1939, début de l’opération T4 de gazage des « incurables » sur liste fournie par des hôpitaux psychiatriques, arrêtée grâce aux protestations des Églises (les gazages ont fait 70 000 victimes). En 1942, débute, dans les camps, des expériences médicales sur des prisonniers. S’appuyant sur des rapports extrêmement précis, l’accusation pose la question de la conscience face à des actes monstrueux. Pour leur défense, les prévenus se réfugient derrière le devoir d’obéissance et évoquent des expériences similaires pratiquées aux États-Unis, la difficulté de l’expérimentation animale… 16 des 20 prévenus ont été reconnus coupables. Mais si les actes commis par un État totalitaire ne sont pas assimilables à ceux d’une démocratie, il devint nécessaire d’établir un code international régissant l’expérimentation humaine. Adopté dans l’urgence, le Code de Nuremberg constitue le premier texte à prétention universelle. Pourtant, un certain flou demeure. Entre « le consentement éclairé » et les choix de l’État totalitaire, se pose la question de la conscience. Même s’il eut peu d’effets après-guerre, ce Code a ouvert la voie d’une réflexion pour la bioéthique médicale. Il ne cessera d’être amélioré, en particulier par les déclarations d’Helsinki (1964) et de Tokyo (1975). Cette réédition d’un livre de 2007, publiée soixante-dix ans après le Code de Nuremberg, est une œuvre salutaire.

Annie da Lage
12 décembre 2017
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