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Contre la bienveillance

Yves Michaud Stock Essais et documents, 2016, 192 p., 18€.

Yves Michaud, philosophe reconnu, spécialiste de l'esthétique et de la politique, publie ici un essai contre «la tyrannie des bons sentiments». Écrit durant l'été 2015, Contre la bienveillance s'inscrit dans la vague d'essais conservateurs qui fleurissent dans le champ intellectuel français depuis plusieurs années. La forme essai permet à l'auteur de s'affranchir de la rigueur nécessaire au traitement de sujets aussi importants et complexes que le fondamentalisme religieux, le populisme ou la morale politique. Le philosophe ne s'en cache d'ailleurs pas dénonçant les chiffres «travaillés» des sociologues et du ministère de l'éducation à propos des adolescents n'ayant pas respecté la minute de silence suite à l'attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo. Des chiffres jugés minorés, ce qui lui permet de ne pas en opposer en retour. Concernant le fondamentalisme religieux (objet de la première partie), l'auteur y voit une caractéristique de l'islam: «L'islam sunnite, en attendant le moment où il deviendrait tolérant et s'ouvrirait à la critique, est aujourd'hui une religion obscurantiste, intolérante et antidémocratique» (p.31). Pour Yves Michaud, la France est attaquée pour ce qu'elle représente ou ce qu'elle est: la responsabilité de ses actions extérieures, la relégation sociale d'une partie de la jeunesse ou la crise durable de confiance en la politique ne sont que des excuses des bienveillants. Le terrorisme islamiste n'est jamais évoqué dans sa dimension longue, alors que la France est frappée par cette forme de violence au moins depuis les années 1990. La partie sur le populisme accumule aussi les approximations. Il serait l'apanage du FN ou du Front de Gauche, oubliant la surenchère terrible sur les thèmes sécuritaires ou identitaires de presque tout l'échiquier politique. Ciudadanos, Podemos ou Syriza sont mis dans un même panier d'infréquentables populistes... Pablo Iglesias est ainsi décrit comme un homme au «charisme vénézuélien bavard, à la queue-de-cheval 68 typique» (p.78). A propos du phénomène migratoire, l'auteur parle de «raz-de-marée», validant l'idée d'invasion chère à l'extrême-droite. Pourtant le solde migratoire n’a pas explosé depuis dix ans, il a même diminué. De même, la réflexion proposée en matière de théorie des relations internationales est bien faible. Si la conception exposée du contrat social est intéressante, nous sommes en désaccord avec son application au contexte actuel. Les bienveillants, les bien-pensants, sont attaqués pour leur angélisme et leur laxisme fondés sur l'idéologie des droits de l'homme... pour la énième fois.

Laurent Duarte
23 décembre 2016
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