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Malaise dans la démocratie

Jean-Pierre Le Goff Stock, 2015, 262 p. 19 €

Malaise dans la démocratie est un énième essai sur le déclin du modèle démocratique et les ravages de la modernité individualiste sur les institutions républicaines françaises. Le terme « essai » n’est cependant jamais utilisé, laissant planer l’idée d’un écrit académique de la part d’un sociologue reconnu. Mais il s’agit bien d’un pamphlet contre le « gauchisme culturel » et ses hérauts : les bobos. Jean-Pierre Le Goff reprend le constat habituel d’un narcissisme triomphant qui a balayé les grandes structures politiques et historiques depuis Mai-68 en France. Le sociologue attaque ceux qui incarnent le mal français, les bobos – une catégorie sociale jamais définie –, fourre-tout pratique d’un essai de psychologie sociale bien superficiel. L’ouvrage aligne les poncifs – le chômage de masse questionne la relation au travail ; l’école a perdu en autorité ; la culture est nivelée par le bas – et des petites phrases de philosophie de comptoir : « Aujourd’hui l’émotion est plus ‘à fleur de peau’, on pleure plus facilement en public » (p. 10) ; à propos de l’écologie comme nouvelle forme de religiosité, « intégrant une version angélique des droits de l’homme, cette religion de l’amour universel forme un vaste prêchi-prêcha en dehors de l’histoire et de la réalité » (p. 236). Les auteurs contemporains cités en premier dans le livre l’ancrent dans un milieu politique adepte de la polémique et d’une rigueur intellectuelle toute relative : Christophe Guilluy, Laurent Bouvet et Éric Zemmour. La pensée d’Alain Finkielkraut est le socle du quatrième chapitre intitulé : « La culture animée et festive : imaginaire et déculturation du nouveau monde ». Notons qu’en 1988, dans la revue Le Débat, Marcel Gauchet et Alain Finkielkraut développaient déjà la matrice de l’ouvrage ici recensé, dans l’article « Malaise dans la démocratie : l’école, la culture, l’individualisme ». À lire J.-P. Le Goff, la France est contrôlée par une caste d’adeptes du multiculturalisme, de la pédagogie alternative et du bio au détriment des français « authentiques ». Le bobo rejette la France et son identité de par son relativisme culturel, son intérêt pour l’Autre et ce, par culpabilité. « Faux gentil », le bobo serait un donneur de leçons, détenteur d’une morale moderne supérieure. Cet exercice rhétorique s’éloigne finalement assez peu de la vindicte de l’extrême-droite contre les « bisounours » parisiens, qui par leur enthousiasme pour la culture cosmopolite et l’écologie mettraient en péril la France immuable et feraient même le jeu des terroristes par laxisme.

Laurent Duarte
27 septembre 2016
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