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Le catholicisme évangélique

George Weigel Desclée De Brouwer, 2015 [2013, trad. de l’anglais (États-Unis) par J-M. Brauns], 307 p., 19,90 €

L’ouvrage, écrit un peu comme un manifeste, entend dessiner les contours d’un catholicisme d’avenir. L’auteur prend acte, tout d’abord, de la fin d’un catholicisme de contre-réforme, qui entretenait la foi par le catéchisme et l’exercice des dévotions, et la transmettait comme par osmose, à travers des micro-cultures catholiques. Un nouvel âge s’ouvre donc pour l’Église, inauguré par Léon XIII, explicité par Vatican II, mis en musique par Jean-Paul II et le cardinal Ratzinger. Un catholique ne pourra résister au feu de la critique que s’il enracine sa vie dans une amitié avec le Christ, fortifie sa foi par une culture religieuse profonde et se reconnaît pleinement membre d’une Église porteuse d’un message contre-culturel.

C’est ici que le bât blesse. Car notre auteur dessine aussi les contours d’un catholicisme très monolithique : « La vérité de l’enseignement du Pape et du collège des évêques n’est pas sujette à débat, même si les termes utilisés pour exprimer et pour expliquer ces vérités peuvent être légitimement débattus. Il n’y a pas de ‘'jugement privé’ dans le catholicisme évangélique » (p. 85). Ce genre d’affirmation fait un peu froid dans le dos, et... fait sourire également lorsque l’auteur se met à décerner les bons et mauvais points aux théologiens, aux évêques (donnant des critères très précis pour les choisir), aux prêtres, aux congrégations religieuses, des Églises locales, et envoie un bon nombre de catholiques au purgatoire pour n’avoir rien compris au temps présent. Un seul exemple : « L’Église en Europe est en chute libre parce que trop de ses membres ne croient plus que l’Évangile est vrai. La crise du catholicisme européen n’est pas la conséquence des maladresses de l’institution, qui aurait fait partir beaucoup de fidèles. Elle est survenue parce que le peuple de l’Église, clergé compris, a cessé de croire avec passion et conviction » (p. 69). Quelle finesse d’analyse ! Or tout est à l’avenant dans cet ouvrage.

Celui-ci ne brille pas par son sens du discernement. Il est cependant important de le connaître, car ce type de slogans risque fort de faire mouche en une période difficile. Il est vrai que l’époque est anxiogène du fait, notamment, de l’effacement de beaucoup de repères (qui n’étaient pas tous évangéliques, loin de là !) et le réflexe, celui que des sociologues peuvent facilement prédire, est de se précipiter vers ce genre de lecture très simpliste. L’Évangile, précisément, appelle à autre chose. Le pontificat du pape François donne à entendre quelque chose d’un catholicisme évangélique : provocateur, mais débordant de joie et de miséricorde. Ce n’est pas celui de George Weigel. Dieu soit loué !

Étienne Grieu
13 juillet 2015
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