Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !
Logo du site

La composition des mondes. Entretiens avec Pierre Charbonnier

Philippe Descola Flammarion, 2014, 380 p., 23 €

Ce livre d’entretiens permet de vulgariser la pensée de l’un des plus grands anthropologues français du début du XXIe siècle. La précision et la clarté du propos sont appréciables ; un index aurait permis de circuler plus commodément parmi les nombreuses références évoquées. Les deux premières parties (« Le goût de l’enquête » et « Le séjour amazonien »), sont pour Philippe Descola l’occasion de se livrer, qu’il parle de cette « inadéquation tranquille » au monde ressentie dès l’enfance, d’un moment d’exaltation vécu en pirogue ou des « habitudes de frugalité » acquises parmi les Achuars. Il retrace surtout ses cheminements, ses filiations (à commencer par celle de Claude Lévi-Strauss qui dirigea sa thèse), ses compagnonnages intellectuels ainsi que son parcours académique, où le hasard a aussi sa place. La troisième partie (« La diversité des natures ») est un retour sur son grand-œuvre Par-delà nature et culture (Gallimard, 2005), où il dresse, à l’issue d’une exploration systématique des relations des sociétés aux « non-humains » – terme employé à défaut d’un autre, pour éviter d’employer la nation de nature – , une combinatoire de quatre ontologies (des sociétés occupant des milieux très différents ayant un rapport analogue aux non-humains) : naturalisme, animisme, totémisme et analogisme. La dernière partie est plus directement politique. Pour Philippe Descola, l’anthropologie aide à « concevoir la destinée des humains et celle des non-humains comme intrinsèquement liées », participant ainsi d’une écologie plus large dont l’urgence n’est plus à démontrer. « La composition du monde que nous connaissons n’est pas la seule possible », il s’agirait d’instituer de nouvelles relations entre humains et non-humains, afin de « gouverner dans les mêmes termes la vie de l’ensemble des êtres ». Ce livre est aussi un plaidoyer pour « la diversité comme une valeur en soi, parce que vivre dans un monde où les formes de vie, les formes de pensée, les langues, les façons de se relier au monde, varient infiniment, est une source de joie et un défi pour la paresse de l’esprit ».

Jean Vettraino
27 janvier 2015
* Champs requis
Séparé les destinataires par des points virgules