Historienne spécialisée dans l’histoire de l’immigration, Peggy Derder démonte une à une les principales « idées reçues » à propos des jeunes nés en France de parents immigrés : délinquance, échec scolaire, désengagement politique, religiosité excessive, mariages forcés, etc. S’appuyant sur les recherches les plus récentes, en particulier l’enquête « Trajectoires et origines », elle montre combien la réalité est loin de correspondre à ces fausses idées. Certes, celles-ci ne sont pas nées de rien, mais les comportements qu’elles mettent en avant sont minoritaires, voire ultra-minoritaires. Un exemple : l’idée s’est répandue que ces jeunes « ne se sentent pas français ». C’est vrai de 7 % d’entre eux, mais 93 % disent qu’ils se sentent français et qu’ils vivent d’autant plus mal la permanente injonction d’intégration qu’on leur adresse. Il en va de même pour les idées reçues sur la pluralité des références culturelles (notamment linguistiques) qui serait un handicap à l’intégration, ou encore sur l’échec scolaire : à niveau socio-économique égal, ces jeunes réussissent aussi bien, voire mieux que les autres. Quant à l’islam des jeunes Français, s’il est indubitablement bien plus visible et revendicatif que celui de leurs parents, on ne peut en conclure qu’il alimente des pratiques et des idées radicales chez un grand nombre. La grande majorité des jeunes musulmans dit se reconnaître dans les principes de la laïcité ; bien plus, parmi les Français ayant des parents maghrébins ou sub-sahariens, 20 % se disent « sans religion ». Cet ouvrage est utile, car il dépassionne bien des débats en présentant de simples faits et chiffres. Il fournit aussi quelques clarifications sur des notions floues, comme celles d’intégration, de métissage, d’identité. Au total, si l’intégration à la française connaît quelques ratés, elle fonctionne tout de même mieux qu’on ne le dit. Les jeunes Français d’origine étrangère sont attachés aux principes républicains, y compris la laïcité, et c’est précisément au nom de ces principes qu’ils dénoncent les discriminations qui les frappent.