L’ouvrage inaugure une collection (« L’horizon des possibles ») qui entend relier les possibles de pensée à des possibles de lutte. Dans cette optique, Gérard Duménil et Dominique Lévy retracent les voies du changement social dans l’histoire du capitalisme, pour réfléchir ensuite à la manière dont la trajectoire actuelle du système capitaliste, le néolibéralisme, à contresens du progrès social, peut être inversée. La grande bifurcation est une analyse bienvenue, pour réveiller l’espoir dans une période où l’idée d’un vivre-ensemble solidaire est sacrifiée au profit de l’invasion des pratiques marchandes et financières dans toutes les sphères du quotidien. Le croisement d’une analyse contextuelle et d’une perspective historique, centrées sur le vieux monde, nous éclaire sur les apories du système néolibéral. La description minutieuse des réappropriations nationales des mécanismes libéraux aide à comprendre les oppositions et les convergences entre les conceptions anglo-saxonne, française ou allemande de l’économie. Nous retiendrons particulièrement la proposition de lecture du progrès social en termes de compromis de classe. Si le concept de classe nous semble assez faiblement défini, la proposition d’une alliance entre classe ouvrière et classe des cadres ouvrant une ère de progrès social (ce fut le cas lors du Front populaire ou dans la période d’après-guerre en France) peut renforcer l’idée d’un capitalisme néolibéral comme ordre social provisoire, comme horizon dépassable.