Il y a aujourd’hui urgence à assurer l’accès à un logement abordable en France. Ce travail de sociologie quantitative, à partir d’une comparaison internationale (avec le Royaume-Uni) et temporelle (1980-2005 ; Fanny Bugeja-Bloch regrette de n’avoir pu, faute de données disponibles, étudier les effets de la crise des subprimes) très réussie, place cette question au cœur de son analyse. Celle-ci procède en deux temps : d’abord, les inégalités d’accès à la propriété et la contrainte budgétaire du logement. Ensuite, les conséquences sociales de ces inégalités, en particulier sur les styles de vie (une quarantaine de figures facilitent la lecture de ces phénomènes quantitatifs). L’auteure souligne comment « les contextes institutionnels nationaux (politiques de logement, systèmes de crédit, coûts d’acquisition, régimes de welfare) constituent des déterminants des inégalités de logement ». Premier poste de dépense des ménages, le logement tend à accentuer les fractures sociales et générationnelles, en France davantage qu’au Royaume-Uni. D’où une « spirale des inégalités ». D’un côté, jeunes adultes et ménages modestes font face à « une contrainte budgétaire inédite qui résulte, en partie, de leur incapacité à être propriétaires », de l’autre, près de 80% des générations nées entre 1930 et 1950 sont propriétaires et les ménages aisés consomment toujours davantage. La mutation des styles de vie liée à cette situation est particulièrement marquée en France. Cet ouvrage offre ainsi une réflexion sur la notion de contrainte et sur les modes de consommation. Il révèle à nouveau, près d’un siècle après les travaux fondateurs de Maurice Halbwachs, le pouvoir structurant du logement dans nos sociétés.